Jugés depuis trois semaines pour le cambriolage mortel du 5 octobre 2017 au Jardin Saint-Adrien, à Servian, les trois accusés ont pu s’exprimer ce vendredi matin, avant que le jury ne se retire pour délibérer. Le verdict est attendu dans la journée.
La voix est tremblotante, peu assurée, même si les mots semblent ce précipiter. Invité à s’exprimer aux derniers instants de son procès, Daniel Malgouyres avait manifestement beaucoup de choses à dire, à tel point que la présidente de la cour, Danielle Chamayou-Dupuy s’est sentie obligée de l’interrompre.
Ses premiers mots sont pour Richard Llop : « On a été trahis par homme qu’on aimait, qui ment encore, qui a toujours menti. » La veille, les avocats de Daniel Malgouyres s’étaient attachés à instiller le doute sur le moniteur d’éducation, ami de la famille Malgouyres, suspecté d’avoir recruté les deux cambrioleurs pour la funeste soirée du 5 octobre 2017.
Un vrai/faux cambriolage ?
Ce soir-là, deux cambrioleurs pénètrent par effraction dans le domaine du jardin Saint-Adrien, une propriété à Servian, près de Béziers. Avec un jardin exceptionnel, dont les propriétaires, le couple Malgouyres, font payer l'entrée aux nombreux visiteurs. Les malfrats menacent le mari et la femme pour se faire remettre des espèces. Alors que Daniel Malgouyres est à l'étage avec l'un d'entre eux, David Viers, il fait usage d'une arme et le tue sur le coup. Le second, qui s'avèrera être Richard Bruno, prend la fuite.
Il est finalement interpellé le 17 octobre suivant et dès ses premières déclarations, il livre un scenario incroyable : il désigne Daniel Malgouyres comme l'organisateur de ce vrai/faux cambriolage, apparemment destiné à effrayer sa femme, Françoise Malgouyres. Le couple est en conflit depuis plusieurs mois et le mari craint, d'après le dénonciateur, que Françoise ne cherche à récupérer la moitié du jardin Saint -Adrien.
Après la dénonciation du rôle joué, selon lui, par Richard Llop, Daniel Malgouyres a parlé de lui et de sa famille, revenant sur ses accusations passées. Il avait pendant un moment soupçonné sa femme, aidée de leur fils Olivier Malgouyres, de l'avoir piégé et s'en était ouvert au juge d'instruction : "Quand j'ai été incarcéré, ca a été un tsunami. J'écrivais à la terre entière, j'ai dénoncé ma femme et mon fils. Pardon ! Je t'aime Olivier ! Je n'ai rien à voir avec ça je l'ai toujours proclamé."
Daniel Malgouyres interrompu par la présidente
Avant d'avoir une pensée pour la famille de sa victime : "J'ai une pensée pour madame Viers. J'ai pas la larme facile, c'est vrai. quand les proches de David Viers ont témoigné, j'ai pris une claque." Le principal accusé, contre qui 30 ans de prison ont été requis mercredi, a ensuite tenté de revenir sur des points précis du dossier ou du procès, avant de se voir interrompre vertement par la présidente. Il a conclu par une adresse tonitruante aux jurés : "Réfléchissez bien avant, sinon vous allez mettre un innocent en prison !"
Avant lui, au début de cette courte audience, Richard Bruno s'était exprimé. 18 ans de prison ont été requis mercredi contre lui. Le second cambrioleur a consacré l'essentiel de cette dernière intervention pour présenter ses excuses à la famille de David Viers. C'est ensuite Richard Llop qui a pris la parole, contre qui 18 ans de prison aussi ont été requis : " Si j'ai commis ces faits, c'est sous les ordres de Daniel Malgouyres, qui voulait faire fuir Françoise." Avant de présenter, lui aussi, ses excuses. A Françoise Malgouyres et Olivier Malgouyres d'abord, puis aux proches de David Viers, ajoutant qu'il aurait "toujours honte " de ce qu'il a fait. Et exprimant une dernière fois ses regrets : "Je n'aurais pas envoyé ces hommes si j'avais su. Ils n'étaient pas armés."
La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : « Avez-vous une intime conviction ? »
Article 353 du Code de procédure pénale
Comme le code de procédure pénale l’impose , la présidente de la cour d’assises de l’Hérault, Danielle Chamayou-Dupuy a ensuite fait lecture de l’article 353 du code de procédure pénale : « la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d’assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve ; elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faites, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : « Avez-vous une intime conviction ? » » Les jurés devront notamment répondre à deux questions portant sur la légitime défense ou non de Daniel Malgouyres. Le verdict est attendu dans la journée.