Mohamed Lamine Aberouz est jugé devant la cour d'assises spéciale de Paris depuis lundi. Il est accusé de complicité présumée dans l'assassinat d'un couple de policiers à Magnanville le 13 juin 2016, dont le mari, était originaire de Pézenas. Ses propos dans le box laissent apparaître une personnalité troublante.
Devant la cour d'assises spéciale de Paris, Mohamed Lamine Aberouz s'est dit "convaincu dans sa religion", à l'occasion de l'examen de sa personnalité, tout en niant toute velléité de violence.
Sur son front, on distingue une marque sombre appelée "tabaâ", le signe de l'observance assidue des cinq prières quotidiennes de l'islam.
Durant 4 heures, il a répondu aux questions de la cour. En plus d'être soupçonné d'avoir été présent le jour de l'attentat dans le pavillon des policiers, sur la foi d'une trace ADN, Mohamed Lamine Aberouz est considéré par l'accusation comme le mentor du terroriste.
"Mon identité propre c'est d'être un musulman d'origine arabe"
Français d'origine marocaine âgé de 30 ans, l'ami de Larossi Abballa, l'assassin de Jessica Schneider, 36 ans et de son compagnon Jean-Baptiste Salvaing, 42 ans, ne se reconnaît pas dans "les valeurs de la République" comme "la démocratie" ou "la laïcité".
Il comparaît depuis lundi pour complicité d'assassinat sur personne dépositaire de l'autorité publique, association de malfaiteurs terroriste criminelle et complicité de séquestration en relation avec une entreprise terroriste.
"Les valeurs de l'islam ne sont pas compatibles avec les valeurs de la France", soutient-il.
"Pourtant vous êtes Français", s'étonne le président de la cour Christophe Petiteau.
"Tout dépend de ce que vous entendez par Français", répond l'accusé. "Pour moi, Français c'est ethnique", assène-t-il. "Moi, je me considère comme Arabe".
"Mon identité propre c'est d'être un musulman d'origine arabe", poursuit-il calmement.
À propos des "valeurs de la République", Mohamed Lamine Aberouz entend distinguer "la théorie et la pratique". "J'ai l'impression que les valeurs fonctionnent uniquement si vous rentrez dans le cadre", estime-t-il en critiquant au passage l'interdiction du port de l'abaya à l'école.
"Je considère que l'islam est la vérité, le Coran est la vérité", assène-t-il encore d'une voix posée.
La religion comme planche de salut
Quatrième enfant d'une fratrie de cinq au sein d'une famille d'origine marocaine des Mureaux, dans les Yvelines, Mohamed Lamine Aberouz a fait des études chaotiques (renvoyé du collège, abandon de ses études au lycée...). "L'école c'était difficile. Je n'étais pas le seul à faire des conneries", reconnaît-il avant d'ajouter : "Je n'étais pas le pire".
A l'entendre, c'est la religion qui a été sa planche de salut.
En 2010, à 17 ans, il part étudier en Mauritanie où résident des parents de sa mère et c'est une révélation. Aberouz parle d'un "éveil spirituel".
Lundi, au premier jour de son procès, il a dénoncé "l'acte monstrueux" commis par Larossi Abballa au nom de l'organisation Etat islamique. Depuis son arrestation, il n'a eu de cesse de proclamer son innocence.
Condamné pour la tentative d'attentat aux bonbonnes de gaz près de Notre-Dame de Paris
Une ex-"fiancée", Sarah Hervouët, qui purge une peine de 20 ans de réclusion criminelle pour avoir poignardé un policier en civil en septembre 2016, après une tentative d'attentat aux bonbonnes de gaz près de Notre-Dame de Paris, a affirmé lundi, lors d'une audition en visioconférence depuis sa prison, que Mohamed Lamine Aberouz avait vainement tenté de la dissuader de passer à l'acte.
"Il ne savait pas ce que j'allais faire, il n'a pas compris", a raconté à la cour Sarah Hervouët.
"Si vous aviez suivi ses conseils, pensez-vous que vous seriez en détention aujourd'hui ?", demande les avocats de M. Aberouz.
"Non", répond la jeune femme.
Dans ce dossier, Mohamed Lamine Aberouz a été définitivement condamné en juin 2021 à cinq
ans d'emprisonnement pour non-dénonciation de crime terroriste.
À l'isolement en prison, il raconte que sa vie est uniquement rythmée par ses "pratiques religieuses" et les règles de la détention. "Je lis, je sors rarement", dit-il. Il se défend de tout prosélytisme en prison.
Son interrogatoire sur le fond est prévu les 5 et 6 octobre. Il encourt la réclusion criminelle à perpétuité.