"Déclarons la paix ! Pour un progrès de l'esprit", c'est le nouveau texte de 46 pages, de Stéphane Hessel.
Après son best-seller mondial "Indignez-vous!", Stéphane Hessel récidive avec "Déclarons la paix ! Pour un progrès de l'esprit", une conversation avec le dalaï lama, dirigée par Indigène éditions, à Montpellier, pour sa collection "Ceux qui marchent contre le vent".
L'intérêt ou la particularité du texte est de traiter des valeurs de l'esprit.
Hessel y développe l'idée d'"une démocratie spirituelle" tandis que le dalaï lama s'attache à l'usage d'une "carte de l'esprit" élaborée avec des amis neuroscientifiques.
Des auto-immolations au Tibet au fossé entre les riches et les pauvres jusqu'à la pratique de la non-violence ou les progrès scientifiques et de l'esprit, le dalaï lama échange sur tous les sujets avec Hessel, 94 ans, "ce corps sans canne" de dix-huit ans son aîné, qui le fait se sentir "très jeune".
Stéphane Hessel - "Déclarons la paix ! Pour un progrès de l'esprit" - 2012
Cet ouvrage a pour ambition de "révéler au plus large public possible ce qui se joue sur la planète: le retour de l'esprit" face à l'argent "première valeur de l'humanité", expliquent les éditeurs Sylvie Crossman et Jean-Pierre Barou dans la préface.
Ni profession de foi de Hessel ni suite d'"Indignez-vous!", l'idée est née le 15 août à Toulouse, où le dalaï lama a rencontré Stéphane Hessel auquel il a lancé: "Nous sommes deux démons maintenant et deux sont plus forts qu'un seul", allusion à la qualification que lui attribue le gouvernement chinois.
La conversation entre le pontife et l'ancien résistant et diplomate a eu lieu quatre mois plus tard à Prague en marge d'un forum sur les Droits de l'Homme en Asie du Sud-est. Le thème en était les valeurs qui se sont dégagées depuis le 10 décembre 1948, date de l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'Homme à laquelle Hessel participa.
"Déclarons la paix ! Pour un progrès de l'esprit" - dalaï lama, Stéphane Hessel - Indigène éditions - 46 pages - 5 euros.
Indigène éditions, l'esprit au-delà du succès :
Créée en 1996 à Montpellier pour lutter contre "le génocide culturel" des savoirs et arts premiers, Indigène éditions entend conserver son esprit militant sans céder aux sirènes commerciales après le succès mondial d'"Indignez-vous!", l'essai de Stéphane Hessel.
"Nous sommes une maison militante, oui de gauche", affirment sans ambages les deux patrons, Sylvie Crossman, ex-correspondante du Monde en Californie puis à Sydney, et Jean-Pierre Barou, cofondateur du journal Libération et ancien membre du comité directeur du Seuil.
"On ne se reconnaît pas dans un parti politique. S'il faut nous mettre une étiquette, nous sommes libertaires non-violents", précisent ces passionnés, ardents défenseurs des "hommes de conscience", à l'image du mouvement des Indignés, "des gens qui ont pris le souffle de cette conscience" et veulent "réduire l'écart entre les plus riches et les plus pauvres".
"Indignez-vous!", traduit en quelque 35 langues et vendu à 3,5 millions d'exemplaires dans le monde - 2,3 millions en France - ne changera donc rien à la philosophie d'Indigène, maison dédiée aux arts et savoirs des cultures non industrielles du monde.
Si le couple reconnaît avoir maintenant "plus de moyens et d'accès aux médias", il a remisé au fond d'une pièce les nombreux manuscrits reçus et se limitera "à six ou huit livres par an".
Leur série "Ceux qui marchent contre le vent", avec des petits fascicules à 3 euros, va donc continuer de s'enrichir. Vient de paraître le 13e de cette collection, le nouvel opus de Stéphane Hessel, un entretien avec le dalaï lama: "Déclarons la paix! Pour un progrès de l'esprit". Est prévu pour mai un 14e avec "Le courage de la non-violence", signé Barou lui-même.
Au programme aussi une série de trois livres sur les femmes ("Femmes, où en êtes vous ?"), des essais sur la "plasticité du cerveau" et sur un "futur sans médicament" ainsi qu'un projet avec Mikhaïl Gorbatchev, un "apôtre de la non-violence".
"On aimerait ramener le monde occidental vers des valeurs intérieures", souligne Jean-Pierre Barou, qui vient avec sa compagne de republier au Seuil "Tibet, une autre modernité", où ils s'interrogent sur l'existence d'un monde voué "au progrès de l'esprit".
Ce souci a toujours été le fondement de leur travail. Eux qui dénoncent un "Occident apeuré et dominé par la finance et l'économie", ont construit leur histoire commune sur l'art premier primitif et la mise en lumière des Aborigènes, Amérindiens, Inuits ou Tibétains.
En 1990, avec le soutien de Georges Frêche et Michel Rocard, ils avaient ainsi présenté une exposition mémorable au musée Fabre, à Montpellier, "L'été australien", suivie de quelques autres à Paris, à La Villette.
"On a joué un rôle de révélateur", soulignent Jean-Pierre Barou et Sylvie Crossman qui ont fait entrer "la peinture primitive dans un musée important avant le musée du quai Branly".
"Nous ne sommes pas des ethnologues", précise Sylvie Crossman, qui se voit comme une découvreuse. La trouvaille Hessel c'est d'ailleurs elle. En 2009, elle avait entendu le diplomate marteler dans le film "Walter, retour en résistance" que "résister, c'est refuser d'accepter le déshonneur, préférer la légitimité à la légalité".
La Normalienne avait pris alors son bâton de pèlerin et sonné à la porte de l'ancien résistant, dont le discours à son sens stigmatisait "ce génocide culturel dont l'époque moderne et Sarkozy se rendent coupables en portant atteinte aux acquis de la Résistance: liberté de la presse, Sécu, retraite..."
Le best-seller mondial, dont elle changera le titre, "Devoir d'indignation", en "Indignez-vous!", sera écrit après 3 séances d'entretien.