Dimanche, le ville gardoise a accordé 35,33% de voix expimées à la candidate de l'extrême droite.
Saint-Gilles(30): la ville & ses amours frontistes
Dans le Gard, seul département à avoir placé Marine Le Pen en tête au 1er tour, Saint-Gilles, toute première commune de France gérée par le FN (1989-92), est revenue à ses amours en accordant dimanche 35,33% de voix à la candidate de l'extrême droite.
Dans le Gard, seul département à avoir placé Marine Le Pen en tête au 1er tour, Saint-Gilles, toute première commune de France gérée par le FN (1989-92), est revenue à ses amours en accordant dimanche 35,33% de voix à la candidate de l'extrême droite.
Dans cette petite ville tranquille de 11.600 habitants à l'entrée de la Camargue, le score des élections (25,51% pour le FN sur l'ensemble du Gard) alimentait lundi les conversations. Des regrets que "Marine ne soit pas allée plus haut" pour Marie-Christine Richoux, restauratrice, au fatalisme de Mohammed, Français d'origine marocaine: "C'est comme d'habitude!"
"Le vote FN n'est pas nouveau, même s'il n'est pas vraiment compréhensible," poursuit
Mohammed devant un café. "Ici, les communautés s'entendent. On se respecte. J'ai de bonnes relations avec les gens même si je sais qu'ils votent FN. On est allés à l'école ensemble".
"Je revendique mon vote FN", assure Mme Richoux, expliquant son choix autant par son adhésion à la candidate - alors qu'elle n'aurait "pas voté pour son père" - que par une situation locale où les petites incivilités, la délinquance l'agacent.
A 15 km de Nîmes, Saint-Gilles avec ses 52 lotissements, ses maisons de pierre et ses petites rues étroites n'a pourtant rien des standards des quartiers difficiles. Mais une vraie particularité: une instabilité politique récurrente marquée par une parenthèse frontiste à la mairie entre 1989 et 1992 avec Charles de Chambrun, ancien secrétaire d'Etat du général du Gaulle.
Aux yeux de la municipalité socialiste arrivée en 2010, c'est pourtant sur le terrain de l'insécurité qu'il faut chercher les raisons du retour du FN. "Il y a une petite délinquance, des bagarres, des cambriolages, des jeunes qui traînent, font du bruit", affirme le premier adjoint au maire Daniel Aniort.
Les analyses des experts voient cependant bien d'autres raisons, économiques et historiques, dans la progression du FN à Saint-Gilles et dans cette Camargue, longtemps
considérée comme un socle pour Jean-Marie Le Pen.
"Il y a une histoire du FN en Camargue", souligne Daniel Van Eeuwen, politologue à l'IEP d'Aix-en-Provence. "Il y a une très forte proportion d'immigrés parce que les propriétaires terriens les ont fait venir et exploités. C'est un paradoxe car aujourd'hui, ce sont ces mêmes groupes qui dénoncent l'immigration".
"C'est une terre qui a toujours été à droite. Au XIXe siècle, elle était monarchiste, et ce conservatisme favorise le FN", renchérit Michel Crespi, professeur de sociologie à Montpellier.
De Saint-Gilles à Vauvert, les villes de la circonscription où l'avocat Gilbert Collard se présente aux législatives sous les couleurs de Marine Le Pen, en passant par bien d'autres comme Beaucaire (34,16%), Pont-Saint-Esprit (31%), Bellegarde (34%)..., un peu partout le FN a donc ranimé sa flamme après un scrutin 2007 moins conquérant.
Evénement plus inattendu, même sur le relief des Cévennes, des communes jadis acquises au PC ont aussi massivement voté pour l'extrême droite, à l'image de Navacelles (37%).
"C'est la conséquence des fermetures des mines, des licenciements. Dans cette région frondeuse - en témoigne son vote communiste - le FN représente une contestation contre les hommes en place, contre l'Europe...", estime M. Crespi.
"Il y a une population qui souffre", admet le président PS du Conseil général, Damien Alary, mettant en exergue la pauvreté de son département avec un taux de chômage "à deux chiffres". "Je compare avec l'Aveyron, un département riche: Hollande est devant avec 30 % et Marine Le Pen à 14 %", dit-il.
Malgré 18 des 46 cantons passés sous la bannière FN, M. Alary refuse pourtant de désespérer. Et croit dans un second tour plus favorable, d'autant que lors des élections précédentes, la gauche est souvent passée facilement. "La moitié voire les trois quarts de ces cantons voteront Hollande", prévoit-il.