Jeudi 16 mai 2019, 4ème jour d'audience du procès en appel d'Edith Scaravetti, poursuivie pour avoir tué et coulé dans du béton son compagnon Laurent Baca, l'instruction du dossier s'est achevée vers 16 heures. Donnant l'impression d'approcher la vérité sans la toucher vraiment.
Elle a beaucoup pleuré, Edith Scaravetti, durant ces quatre premiers jours d'audience. Et ce matin du jeudi 16 mai 2019, elle a semblé chanceler. Au point qu'il a fallu suspendre l'audience quelques minutes, pour lui permettre de se reprendre.
C'était après l'audition de son frère Jocelyn, initialement prévue la veille. Ce dernier ne s'étant pas présenté, un mandat d'amener a donc été délivré.
Jocelyn, c'est celui des deux frères de l'accusée qui lui présente Laurent Baca, quand elle a 17 ans. Il est ami avec la victime. Mais petit à petit, il prend de la distance avec Laurent et sa soeur car il ne supporte plus, dit-il, les accès de violence du compagnon d'Edith quand celui-ci a bu excessivement.
C'est aussi le frère qui accueille les trois enfants du couple chez lui, quand Edith Scaravetti est mise en examen et incarcérée en maison d'arrêt. Pour cela, il agrandit sa maison. Où Edith Scaravetti vient vivre après sa libération.
Elle quitte le domicile de son frère et de sa belle-soeur en septembre 2018, pour prendre son indépendance car elle étouffe. Il en prend ombrage. Ils ne se parlent plus. Au point qu'il ne souhaite pas se présenter à la barre. Les explications sont rares. Décidément, la communication n'est pas le point fort de la famille. Il en convient. Tout comme il concède qu'il a pris les enfants pour compenser le fait d'avoir laissé tomber sa soeur.
Alors, est-ce cette évocation qui trouble tant l'accusée ? Ou le fait d'être confrontée plus précisément à ses faits et gestes qui ont conduit à la mort de Laurent Baca, ce matin du 6 août 2014 ?
Car l'audience, ce jeudi 16 mai 2019, s'est concentrée sur les faits et rien que les faits et non plus le contexte et les circonstances. Avec à l'appui, les nombreuses photos de la reconstitution.
A chaque geste, à chaque photo, le président interroge l'accusée. La poussant dans ses retranchements et ses contradictions. Il ne veut plus se contenter de "Je ne sais pas", "une phrase qui revient souvent dans cette famille" souligne-t-il dans un soupir.
Pourquoi, s'il y a dispute violente cette nuit-là, les trois enfants du couple ne se réveillent-ils pas ? Pourquoi, alors qu'elle décrit une avalanche de coups sur le visage et le corps, personne n'en voit trace le lendemain et le sur-lendemain ? Pourquoi, si elle pense l'arme déchargée comme elle le dit, ne s'enfuit-elle pas, lorsque Laurent Baca l'en menace ? Pourquoi s'enferme-t-elle dans la salle de bain après le tir, alors qu'il est manifestement mort ? Pourquoi, si c'est un accident, décide-t-elle de le cacher et surtout de dissimuler le corps ?
Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Edith Scaravetti a des réponses partielles. "On dirait que c'est profil bas dès qu'on vous pose une question. C'est un choix, de ne pas parler ? Une stratégie, ou une impossibilité ?", demande le président de la cour d'assises. Edith Scaravetti répète ce qu'elle a souvent dit : elle a des trous noirs, elle ne se souvient pas de tout.
Mais les mensonges, insiste le président. "Ils sont très construits, vos mensonges ?". Il revient sur les transports du corps qu'elle a effectués : du salon au garage, puis du garage à la pergola où elle creuse un trou pour cacher le corps, puis du jardin aux combles de la maison. Pergola, combles : deux endroits dont elle a affirmé que Laurent Baca l'y avait humiliée. "C'est une vengeance, madame ?"
"Sur le moment, je ne l'ai pas perçu comme ça", explique-t-elle.
Les parties civiles, comme le ministère public, tentent de fendre l'armure. Edith Scaravetti est-elle bien sûre d'avoir conduit ces "opérations de dissimulation hyper techniques" seule ? La réponse est oui.
Avait-elle décidé de tuer Laurent Baca ? Non.
L'accident, comme elle le qualifie, n'a-t-il pas plutôt eu lieu plus tard dans la matinée, alors qu'elle avait déjà déposé les enfants au CLAE ? Non.
Elle l'aimait, assure-t-elle. "Aujourd'hui, c'est toujours difficile. Je le vois chaque jour dans nos enfants"...