Pyrénées-Orientales : des zones de mouillages écologiques entre Cerbère et Banyuls pour sauver la Méditerranée

L'Occitanie, destination préférée des touristes : ils ont été encore plus nombreux qu'en 2019 cet été. Sur le littoral, pour protéger les fonds marins, des bouées écologiques fleurissent par bouquets sur la Côte Vermeille et au Cap d'Agde, dans l'Hérault, où la fréquentation est la plus dense.

Les touristes ont afflué en masse cet été, plus nombreux encore qu'avant la crise sanitaire. Leur objectif principal : les plages et la grande bleue.

Si cette fréquentation en hausse est bonne pour l'économie, elle l'est moins pour la nature, en particulier pour les précieux herbiers de posidonie : on estime que 10% de leur surface ont disparu ces 100 dernières années, à cause de l’augmentation des loisirs maritimes.

La réglementation encadrant le mouillage des bateaux de plus de 24 mètres vient d'évoluer : les grands yachts ont désormais interdiction de jeter l'ancre dans cet écosystème si riche, mais le littoral du Languedoc et du Roussillon "doit encore s'équiper de zones de mouillages légers pour maîtriser l’impact des navires de petites à moyennes tailles" comme le stipule l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse dans l'un de ses derniers rapports sur l'état de santé de la Méditerranée.

L'herbier de posidonie, plus efficace que la forêt amazonienne

L'un des écosystèmes à protéger d'urgence, ce sont ces prairies sous-marines, connues sous le nom d'herbier de posidonie.

Ces plantes à fleur grouillent de vie : à la fois lieu de ponte, nurserie, garde-manger pour les poissons, cette espèce endémique de Méditerranée constitue aussi un puits de carbone atmosphérique majeur, à court et à plus long terme. Sa capacité de stockage du carbone serait supérieure à celle de toutes les forêts terrestres.

Ces plantes miraculeuses viennent du fond des âges. Elles ont survécu aux pires cataclysmes depuis l'époque des dinosaures et, pour Renaud Dupuy de la Grandrive, directeur de l'aire marine protégée de la côte agathoise : "Ce serait bien qu'elles survivent aussi aux humains !".

Voilà pourquoi au Cap d'Agde, comme sur la Côte Vermeille dans les Pyrénées-Orientales, le nombre de bouées dites "écologiques" se sont multipliées depuis ces dernières années. Grâce à elles, les ancres jetées à l'eau n'agissent plus comme des râteaux qui arrachent tout sur leur passage.

Une zone de mouillages et d’équipements légers (ZMEL) a été installée dès 2014 autour de l’île de Fort Brescou, qui se situe au coeur de l'aire marine protégée : désormais 33 bouées de mouillages écologiques peuvent accueillir des bateaux de 17 mètres de long maximum l'été du 1er juin au 30 septembre.

C'est une opération qui fonctionne bien, un gagnant-gagnant, car que ce soit les bateaux de plaisance ou les bateaux de plongée sous-marine, tout le monde y trouve son compte. Car en plus de protéger les fonds, ces bouées procurent un amarrage plus sécurisant.

Renaud Dupuy de la Grandrive, biologiste marin.

Une cinquantaine de bouées écologiques aussi sur la Côte Vermeille

L'autre zone majeure de forte fréquentation touristique se situe plus au sud, en Roussillon, sur la Côte Vermeille. Là aussi, chaque année, de gros chantiers sous-marins se déroulent en début de saison. C'est le cas dans la baie de Peyrefite, entre Banyuls et Cerbère, à quelques encablures du célèbre sentier sous-marin.

Pendant quelques jours, des plongeurs professionnels travaillent sous la surface pour installer des bouées de mouillage écologiques. Des scaphandriers se relaient pour enfoncer de grandes tiges au fond du sable. Une fois vissées en croix, on y attache une corde reliée à une bouée en surface. La corde doit elle aussi flotter entre deux eaux, car, comme l'ancre, elle peut endommager les fonds marins en raclant le fond de la mer.

Ce dispositif "anti-rague" doit avoir le moins d'impact possible sur la faune et la flore aquatique. Voilà pourquoi il faut aussi réfléchir au type de matériaux qu'on va immerger pendant toute une saison :

On fait abstraction de tout ce qui est en acier. On préfère le galva qui ne rouille pas, on fait également abstraction des outils hydrauliques qui présentent toujours des risques de fuites insidieuses et très polluantes pour la mer.

Julien Girodeau, gérant entreprises travaux sous marins à Collioure

Ces chantiers s'effectuent en collaboration avec la Réserve Naturelle Marine Cerbère Banyuls qui tente de concilier fréquentation touristique et protection de l'environnement marin.

"La baie de Peyrefite attire de plus de plus de plaisanciers. Nous avons donc installé 5 bouées d'amarrage écologiques. Nous allons passer à 8 très prochainement" explique Fred Cadène, le conservateur de la Réserve Naturelle Marine Cerbère Banyuls qui totalise désormais 32 bouées de ce type.

Le parc marin du Golf du Lion en a installé 14. Chaque unité coûte environ 4.000 euros aux collectivités locales.

Si la plupart sont en accès libre, certaines zones de mouillages écologiques peuvent être payantes pour les plaisanciers qui souhaitent y passer la nuit. C'est le cas à Collioure, célèbre cité balnéaire dans les Pyrénées-Orientales.

Près de la moitié des fonds côtiers encore menacés

Ces chantiers sous-marins se sont multipliés ces 10 derniers années et la formule semble pertinente car, désormais, les herbiers de posidonie, espèce protégée depuis les années 80, seraient en phase de stabilité et leur surface ne reculerait plus sur notre littoral. Ce qui n'est pas forcément le cas chez nos voisins de la Côte d'Azur.

Globalement, en Méditerranée, 45% des petits fonds côtiers sont encore menacés par les activités sur le littoral et les usages en mer, selon l'Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.

La bonne régulation de l’impact des navires de plaisance sur les habitats côtiers est vitale sous peine de voir disparaître les herbiers de posidonie. Ce poumon de la mer séquestre le carbone, produit de l’oxygène en grande quantité et abrite environ 20% des espèces animales et végétales.

Rapport de l'Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse. Septembre 2021.

En atténuant la houle, ces prairies sous-marines limitent aussi l’érosion du littoral. Elles constituent un rempart contre les effets du changement climatique dans la zone côtière.

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