Fermés jusqu’au 2 juin, les refuges attendent l'autorisation d'ouverture. Dans les Pyrénées, sur le massif du Canigou, certains gardiens se préparent déjà malgré les incertitudes. Quand et comment accueillir les amoureux de la montagne restent des questions sans réponse pour l'heure.
Comme un air de liberté retrouvée en cette première semaine de déconfinement. Le pic du Canigou est masqué par d’épais nuages ces derniers jours, mais l’appel de la montagne démange déjà les adeptes des ascensions et randonnées.
Rien n’interdit plus désormais d’accéder aux sentiers de randonnée mais en revanche, il faut encore patienter pour la perspective d’une nuit en refuge. Il en existe 5 sur le massif du Canigou. Tous fermés traditionnellement jusqu'à la mi-mai. Une fermeture qui se prolongera au moins jusqu’au 2 juin cette année. Et la plus grande incertitude plane sur une date d’ouverture. Comme tous les autres établissements d’accueil, les refuges devront s’adapter à la crise sanitaire du covid- 19.
Se préparer coûte que coûte
Thomas Dulac est le gardien depuis 10 ans du refuge des Cortalets. Ne pas savoir quand et dans quelles conditions son refuge pourra ouvrir ses portes au public est source d’angoisse et de stress. « D’habitude j’embauche 8 personnes pour la saison. On ouvre d’habitude le refuge le dernier week-end de mai et jusqu’à mi octobre. Mais à ce jour la seule chose qui soit certaine c’est que nous serons fermés jusqu’au 2 juin et ensuite…on ne sait pas ! »Mais pas question pour cet amoureux de la montagne d’attendre les bras croisés. Lui, prépare l’ouverture des portes de son refuge.
« Ouvrir un refuge, c’est un peu comme préparer une traversée de l’Atlantique, il faut charger les cales et vérifier le matériel. On doit s’y prendre à l’avance »
Une capacité d'accueil réduite
A plus de 2000 mètres d’altitude, le refuge des Cortalets est le plus grand du massif du Canigou. Une centaine de personnes peuvent y dormir et s’y restaurer. Thomas Dulac sait qu’il devra proposer un accueil un peu différent cette saison si l’autorisation d’ouvrir est donnée. Il a d’ores et déjà prévu un protocole avec l’aide de médecins infectiologues de l’hôpital de Perpignan.« Début mai, sur leur temps de repos des médecins sont montés au refuge pour m’aider à envisager l’organisation de l’accueil du public. Ca m’a touché de recevoir ce soutien bénévole. Maintenant, si nous avons l’autorisation d’ouvrir, je sais comment faire », explique le gardien des Cortalets.
Un protocole pour l’accueil de nuit et la restauration est défini. Le masque sera de rigueur à l’intérieur. Un intérieur organisé avec un sens de circulation. « Bien sûr pas de masque pour dormir ou manger. Pour ces moments là nous prévoyons des distanciations. Pas question de manger côte à côte sauf si les gens sont issus d’une même famille bien sûr », précise-t-il.
L’hébergement sera donc réduit de 105 à cinquantaine de places.
Autant de précautions qui devront être validées officiellement avant une éventuelle ouverture.Nos hôtes devront s’adapter. Par exemple en débarrassant eux-mêmes leurs tables, en amenant leur propre sac de couchage.
Des espaces de camping
Le gardien du refuge de Mariailles lui attend d’en savoir plus. « Tout est en stand by pour nous. Il faut être patient », explique Laurent Gobil.La décision d’ouvrir ne peut intervenir selon lui avant mi-juin ou début juillet. Il n’imagine pas pouvoir accueillir plus de 30 personnes contre 53 habituellement.
« Nous proposerons en plus 5 à 6 places de campings avec des tentes que nous désinfecterons. Nous réflechissons mais à l’heure actuelle on ne sait rien et on imagine tout ! », reconnaît-il. Sa crainte serait également qu’un nouveau confinement soit mis en place en cours de saison avec la difficulté de gérer ses 3 emplois saisonniers. « Rien ne nous assure de la mise en place d’un chômage partiel si tel était le cas. C’est très compliqué pour nous toutes ces incertitudes », regrette laurent Gobil.
Dans tous le scas les conséquences financières seront réelles. Au refuge de Mariailles, la clientèle catalane ne sera sans doute pas au rendez-vous. Elle représente 20% de la clientèle. Du côté des Cortalets, Thomas Dulac espère que les montagnards sauront patienter et reporter leur séjour prévus fin mai ou début juin.
Une année blanche
Thomas Dulac s’attend dans tous les cas à une saison difficile. « J’ai en moyenne 5000 nuitées chaque année mais cette saison sera dans le meilleur des cas une année blanche financièrement. J’espère juste être en mesure de pouvoir embaucher au moins 3 salariés qui ont besoin de ce travail. »
Thomas Dulac espère que l’horizon des gardiens de refuge s’éclaircira au plus vite. A ses yeux la population a aujourd’hui besoin d’un peu de rêve.Une commission interministérielle centrée autour du tourisme se réunit ce jeudi 14 mai. Les gardiens des refuges espèrent que leur horizon s’éclaircira alors, quitte à devoir patienter quelques semaines encore avant d’ouvrir leurs portes.« Je crois que les gens n’ont pas seulement besoin de manger ils ont aussi besoin de rêve et d’évasion. Et la montagne permet cela ! »