Des riverains se mobilisent à Banyuls-dels-Aspres, dans les Pyrénées-Orientales, pour protester contre le projet de construction de quatre éoliennes sur des parcelles communales. La mairie se justifie par la nécessité d'avancer vers des énergies renouvelables, et les retombées fiscales pour le village.
Ils étaient une cinquantaine, rassemblés devant la mairie de Banyuls-dels-Aspres (Pyrénées-Orientales), mercredi 3 avril au soir, à manifester leur colère. "Les éoliennes n'apportent que des problèmes", "On veut nous voler la beauté de nos paysages"... Riverains et élus des communes voisines étaient venus réaffirmer leur opposition au projet d'implantation de quatre éoliennes sur des parcelles communales.
150 mètres de haut
Le maire de Banyuls-dels-Aspres, Laurent Bernardy (sans étiquette), souhaite en effet que sa commune de 1500 habitants accueille quatre éoliennes, afin d'avancer vers les énergies renouvelables. Problème : elles mesureraient 150 mètres de haut, et seraient implantées à 500 mètres des premières maisons.
Devant le gîte de Stéphanie et Dominique Keller, du vert à perte de vue, et la mer Méditerranée en fond. "C'est un endroit magnifique, on a la nature, on n'entend que les oiseaux. Cette vue, on la vend à nos touristes", pose d'emblée la propriétaire des lieux. Pour le couple, qui tire ses revenus principalement du tourisme, voir des éoliennes sortir de terre devant leur gîte serait "une catastrophe".
Les gens qui viennent ici cherchent le silence, le calme, un endroit naturel pour se ressourcer. Avec des éoliennes, on redoute une baisse de fréquentation, ça serait une perte énorme de chiffre d'affaires.
Stéphanie Keller, propriétaire d'un gîte à Banyuls-dels-AspresFrance 3 Occitanie
Le couple craint de voir son chiffre d’affaires divisé par deux, si des éoliennes venaient effectivement "saccager le paysage". Et les propriétaires du gîte craignent également "des nuisances sonores" : "500 mètres de distance des maisons, ce n'est rien !" déplorent-ils.
Défendre la biodiversité
Avec d'autres riverains, Stéphanie et Dominique se mobilisent contre ce projet municipal. Ils sont soutenus dans leur démarche par un collectif, "le vent tourne", qui souhaite défendre la biodiversité des lieux. L'installation d'éoliennes sur des parcelles jusque-là en friche viendrait en effet perturber des espèces protégées, plantes comme animaux.
"Ici, on a par exemple le lézard ocellé, qui est protégé. Mais aussi, à proximité, l'aigle de Bonelli, qui se trouve sur le Perthus et la Jonquera, dont le domaine vital arrive jusqu'à Banyuls", liste Jean Blin, un membre du collectif.
Quand on voit qu'on va devoir utiliser 500 mètres cubes de béton par éolienne, pour moi, c'est plutôt une catastrophe écologique.
Dolorès Carré, élue de l'opposition à Banyuls-dels-AspresFrance 3 Occitanie
De son côté, le maire de Banyuls-dels-Aspres, Laurent Bernardy, évoque "l'obligation* pour les communes, depuis 2023, de définir sur leur territoire des zones d'accélération de production des énergies renouvelables". Selon lui, mieux vaut agir maintenant et "pouvoir encore négocier avec les porteurs de projet", plutôt que d'être mis face à une obligation d'implanter des éoliennes dans quelques années.
En plus d'une nécessité de développement durable, le maire invoque des retombées fiscales pour sa commune. "Nous allons bénéficier de loyers sur deux terrains communaux, à hauteur de 18 000 euros par an. Cela nous permettrait de faire de petits travaux, ou bien de thésauriser pour pouvoir prétendre à de plus gros aménagements", avance-t-il.
Je suis conscient que les éoliennes ne sont pas la panacée. Mais en tant qu’élu, je me dois de mettre les pieds dans le plat, pour faire avancer un petit village qui doit se débrouiller pour trouver des retombées fiscales pérennes.
Laurent Bernardy, maire (SE) de Banyuls-dels-AspresFrance 3 Occitanie
Des retombées qui bénéficieraient également aux communes alentour, grâce à la communauté de communes des Aspres qui récupérerait "80 % de l'impôt sur la fabrication d'électricité, qui seront ensuite bien sûr redistribués aux autres villages", selon Laurent Bernardy.
D'après l’un des opérateurs des futures éoliennes, Engiegreen, la mise en service des équipements pourrait être envisagée en 2027, pour ce projet que la mairie de Banyuls-dels-Aspres a dans les cartons depuis 2018. Les opposants au projet vont eux tenter tous les recours possibles, afin que ces éoliennes restent en terre.
*Selon la loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables, promulguée en mars 2023, "à compter du 1er juillet 2023, et jusqu’à la fin de l’année 2023, les élus locaux [étaient] invités à proposer leurs zones d’accélération". Il n'est pas fait mention dans le texte d'une obligation pour les communes de déterminer des zones d'accélération.