Le laboratoire Sanofi a été reconnu coupable de "défaut d'information" sur les risques de malformations et de retards de développement chez l'enfant causés par la Dépakine. Un médicament antiépileptique prescrit aux femmes enceintes. Le laboratoire devra verser 285 000 euros d'indemnités à Marine Martin, et ses deux enfants de Pollestres dans les Pyrénées-Orientales.

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Elle a pleuré de joie et vécu cela comme une délivrance. Après 12 ans de procédure, Marine Martin a gagné son combat contre un géant de l'industrie pharmaceutique. "C'est une très grande victoire. Je n'y croyais plus", souffle-t-elle après le jugement rendu contre Sanofi le 9 septembre 2024 à Paris.

Défaut d'information

Le laboratoire a été reconnu coupable de "défaut d'information" sur les risques de malformations et de retard de développement pour les enfants de femmes enceintes ayant pris de la Dépakine. "Je suis encore bouleversée et sous le choc", a réagi la mère de deux enfants handicapés et lanceuse d'alerte qui vit à Pollestres dans les Pyrénées-Orientales.

Le tribunal a déclaré le laboratoire Sanofi « responsable d’un défaut d’information des risques malformatifs et neurodéveloppementaux de la Dépakine, qu’elle commercialisait, du maintien en circulation d’un produit qu’elle savait défectueux, et d’une faute de vigilance au moment des grossesses de Mme Marine Martin, entre 1998 et 2002 ».

Sanofi a été condamné lundi par le tribunal de Paris à verser près de 285 000 euros d'indemnités à Marine Martin et ses deux enfants.

8000 adhérents

Marine Martin a eu deux enfants, une fille et un garçon aujourd'hui âgés de 25 et 22 ans. Tous les deux sont nés avec des malformations. Sa fille souffre de troubles cognitifs, visuels et dyspraxiques. Son fils atteint de troubles de l'attention et du langage a été diagnostiqué autiste Asperger.

En 2011, face aux handicaps de ses deux enfants, Marine Martin, qui vit à Pollestres dans les Pyrénées-Orientales), avait créé l’Apesac (Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant). L'association compte aujourd'hui 8000 adhérents. Elle avait déposé plainte en 2012.

Jurisprudence

"C'est une très belle victoire, car depuis le dépôt de plainte il y a douze ans, Sanofi a tout fait pour retarder la procédure en commandant expertise sur expertise car ils avaient peur de perdre. Ils savent très bien que cette décision fera jurisprudence car elle va permettre à d'autres familles qui jusque-là pensaient que leur action était prescrite de pouvoir aller en justice demander réparation", ajoute Marine Martin, contactée par France 3 Occitanie.

Prescription rejetée

Cette victoire judiciaire l'est aussi pour "des milliers d'autres victimes. "C'est une décision très importante car cela concerne Marine Martin lanceuse d'alerte et cela tranche une question relative pour des enfants nés en 1998 et 2003. L'existence d'une faute permet de neutraliser les délais de prescription. Cela ouvre la voie pour d'autres victimes et permet de répondre aux arguments de Sanofi qui refuse d'assumer ses responsabilités en invoquant une responsabilité de l'Etat. Le jugement dit que ce n'est pas parce qu'il y a une responsabilité de l'Etat que cela fait disparaître la responsabilité de Sanofi", ajoute Me Charles Josph Oudin, avocat de Marine Martin.

 

Cela ouvre la porte à des milliers d’enfants, victimes majeures, qui ne pouvaient pas espérer entrer en justice.

Marine Martin

Lanceuse d'alerte

Le tribunal n'a en effet pas retenu la demande de prescription de 10 ans formulée par le laboratoire. Sanofi avait déjà été condamné à Nanterre en 2022 mais pour des plaintes plus récentes. 

Des milliers de victimes

La Dépakine a été commercialisée en 1967. Selon des estimations – contestées par Sanofi – de l’Assurance-maladie et de l’Agence nationale de sécurité du médicament, le valproate de sodium, son principe actif, serait responsable de malformations (cœur, reins, membres, doigts, visage…) chez 2 150 à 4 100 enfants, et de troubles neurodéveloppementaux (autisme, retard de langage…) chez 16 600 à 30 400 enfants, rapporte le journal Le Monde.

Suite à ce dernier jugement, Sanofi se "réserve le droit de faire appel". Marine Martin, elle, sait qu'elle devra continuer le combat.

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