Face à la sécheresse persistante, les collectivités accentuent leur traque des fuites d'eau sur leurs réseaux pour économiser la ressource. Dans la métropole de Perpignan, où cette compétence est partagée entre une régie directe et 3 opérateurs privés, nous avons suivi des équipes chargées de repérer les défaillances.
Chaque année, près de 5 millions de mètres cubes d’eau sont perdus dans le département des Pyrénées-Orientales. En cause : les fuites d'eau sur les réseaux. Un fléau contre lequel la métropole de Perpignan a décidé de lutter. Car en ces temps de sécheresse et de restrictions d'usages, la moindre économie est essentielle.
Si le captage, la potabilisation, la distribution et le traitement des eaux usées de 14 communes sont gérées directement via la Régie publique des Eaux, la ressource des 22 communes restantes est déléguée à 3 opérateurs privés : Véolia, Suez ou la SAUR. Nous avons suivi l'une des équipes de ce dernier délégataire.
Ecouter les tuyaux
Pour repérer une fuite au milieu du bruit sourd que génère l’eau dans le réseau, Damien Jiménez, agent recherche de fuites, utilise un microphone piézoélectrique avec lequel il ausculte littéralement les tuyaux : "On vient positionner l'appareil au contact de la canalisation via les carrés de vannes ou de branchements. Cela nous permet d'écouter le bruit que la fuite génère sur le matériau, c'est en quelque sorte un stéthoscope".
Capteurs de débits
Pour traquer les fuites, l’entreprise a installé des capteurs de débit sur les canalisations afin de mesurer les mètres cubes consommés par quartiers. Marlène Gieulles, ingénieure à la SAUR, nous explique pourquoi ces relevés se font de nuit :
On observe les débits la nuit parce que c'est là où la consommation est la plus faible, donc forcément si un débit est élevé à ce moment-là, ça veut dire qu'on a beaucoup de fuites sur le réseau. On va, dès lors, engager des recherches sur le secteur concerné.
Marlène Gieulles, ingénieure à la SAUR
Sur la commune de Toulouges, des débitmètres ont même été installés sur le réseau. Une automatisation qui permet de localiser et de réparer plus vite les fuites, avec des résultats conséquents, selon Frédéric Rolland, le directeur régional de la SAUR Languedoc-Roussillon :
En quelques années , à Toulouges, le débit des fuites a été divisé par 2, soit environ la consommation de 1800 usagers.
Frédéric Rolland, directeur régional de la SAUR Languedoc-Roussillon
Des économies d’eau bien venues au regard de la baisse du niveau des nappes phréatiques en cette année 2022 marquée par une sécheresse persistante. Comme le dit Théophile Martinez, le vice-président de Perpignan Métropole délégué à l'Eau : "L'eau qu'on ne perd pas, c'est celle qu'on économise le plus vite !". Cette chasse au gaspillage d'eau n'est pourtant pas nouvelle.
Gaz traceur à Sète
En 2016 déjà, à Sète (Hérault), 80000 mètres cube d'eau avaient été économisés grâce aux campagnes de recherche de fuites. A l'époque, la société Véolia inspectait l'état du réseau à l'aide d'un gaz traceur, l'hélium. Au-dessus de la chaussée, un appareil "renifleur" permettait de détecter les fuites grâce aux échappements d'hélium. Toutes les canalisations d'un même périmètre étaient ainsi sondées pour trouver d'éventuelles fuites.
Chiens renifleurs
L'an dernier, le même opérateur Véolia a expérimenté pour la première fois en France des chiens renifleurs de chlore pour détecter des fuites sur les réseaux d’eau à Teyran, toujours dans l'Hérault. Une technique qui, si elle s'avérait efficace, représenterait un espoir pour certaines communes qui connaissent d’importantes fuites difficiles à identifier. C'est le cas de Nîmes par exemple. Près de la moitié de l'eau de la cité gardoise se perdrait dans la nature, soit plus de 7 millions de mètres cubes par an.
20% d'eau potable perdus en France chaque année
En France, on estime que les fuites sur le réseau national, qui est vieillissant, sont responsables de la perte de 20 % du volume d'eau potable chaque année, soit la consommation annuelle d'environ 18 millions d'habitants.