Les Jeux olympiques de 1992 ont marqué d'un anneau doré l'histoire de la ville de Barcelone, la cité catalane, plus que toutes les autres villes organisatrices. C'était il y a 32 ans, pourtant l'héritage est toujours visible et fait partie du quotidien des habitants.
Le 25 juillet 1992, c'est le jour où Barcelone est devenu le centre de l'univers. Un gigantesque Hola se déploie sur les gradins du Stade olympique de Montjuïc, tel un orage qui gronde, les artistes de la Fura dels Baus envahissent le terrain et les voix de Montserrat Caballé et Freddy Mercury résonnent de toutes parts.
Une cérémonie qui a marqué l'histoire des Jeux
Près de 4 millions de téléspectateurs suivent en direct la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques. Elle restera l'exemple à suivre durant de longues années avec sa mise en scène d'avant-garde et ses références à la culture et à l'histoire de la Catalogne.
Cette cérémonie, c'est au barcelonais Lluís Bassat qu'on la doit. PDG d'une des plus grandes agences de publicité d'Espagne, il est plébiscité par Pasqual Maragall alors Maire de Barcelone. Ce dernier veut que la cérémonie marque les esprits du monde entier. Bassat décide de réaliser une vitrine de ce que représentent l'Espagne mais surtout la Catalogne sur le modèle de la publicité.
Quand Pasqual Maragall, le Maire de Barcelone m'a dit de participer au concours pour faire la cérémonie des Jeux olympiques, je lui ai répondu, non, ces cérémonies sont horribles. Il m'a alors demandé de penser cette inauguration comme une publicité de Barcelone, de la Catalogne et de l'Espagne.
Lluís Bassat, ancien PDG d'Ogilvy Espagne
"Barcelone était une ville obsolète"
Autre réussite, la transformation urbaine de la ville. Dès 1986, Barcelone entreprend sa métamorphose. Sur les 7 milliards d'euros de budget des JO, 83 % seront consacrés à l'évolution la ville, catapultée en quelques années comme destination touristique très prisée.
Après 40 ans de franquisme, Barcelone est une ville vieillissante, obsolète qui a été privée de toute évolution urbaine et de ses infrastructures. Barcelone se saisit donc de l'opportunité des Jeux olympiques pour tout changer.
Lluís Cantallops, Architecte Barcelone
En 2023, Barcelone a elle seule accueilli plus de 15 millions de touristes. Rançon du succès, des rues bondées, des parcs modernistes saturés, des tarifs hôteliers qui s'envolent et toujours de spéculation sur les logements à location de courte durée et des riverains qui n'en peuvent plus, qui ne s'y retrouvent plus.
L'héritage des Jeux
Contrairement à d'autres cités organisatrices qui ont laissé dépérir les infrastructures, Barcelone a su donner une continuité aux installations olympiques et notamment sportives comme le Palau Sant Jordi, ou les piscines de Montjuïc.
Un des plus grands succès de ces Jeux c'est que Barcelone a su faire perdurer ses installations au-delà des JO. Aujourd'hui, les sites sont toujours utilisés au quotidien comme c'est le cas des quatre piscines olympiques.
Josep Aymerich, responsable marketing des Piscines Picornell
Avant les Jeux, Barcelone tournait le dos à la mer
Autre symbole de la régénération de Barcelone, peut-être même le plus révolutionnaire, c'est la Vila Olimpica. Destiné à accueillir les sportifs du monde entier, le site est avant tout pensé comme un véritable lieu de vie à long terme. Un quartier de plus de 2000 logements qui fait table rase des vieilles usines qui déversaient leurs rebuts directement dans la mer. Objectif : proposer à Barcelone de faire un 180° en se tournant vers la Méditerranée.
Jordi Giró est président de l'Association de quartier Vila Olimpica. C'est sur plan qu'il a acheté son appartement avec vue sur la mer. À cette époque, le quartier était pollué par les usines et considéré comme malfamé. Sa famille et ses amis essaieront de l'en dissuader mais Jordi et son épouse ont maintenu leur pari. Aujourd'hui voilà 32 ans qu'ils vivent à la Vila Olimpica reconnu comme quartier à part entière de Barcelone depuis 2019, à deux pas du centre-ville et ils se réjouissent toujours autant du choix qu'ils ont fait en s'installant à cet endroit qui demeure un quartier vivant, dynamique et familial.
Plusieurs architectes de talent ont travaillé à la conception de la Vila Olímpica. C'est une belle réussite autant sur le plan urbanistique que paysager. Plus de 30 ans ont passé, pourtant le quartier n'a pas pris une ride. C'est un endroit plein de vie, au design apprécié, lumineux, l'ambiance y est très agréable.
Jordi Giró, président de l'Association de quartier "Vila olímpica"
Barcelone a fait de l'argent, de l'or
Malgré la bulle immobilière, qui aura tout de même poussé plusieurs milliers d'habitants à quitter Barcelone, rarement une ville aura été aussi positivement impactée par les Jeux. En réussissant le combo de mettre d'accord Mairie de Barcelone, Generalitat de Catalogne et Gouvernement Central espagnol, les Jeux de 1992 ont créé un précédent avec un budget à l'équilibre qui a longtemps été cité en exemple. Et même s'il semble aujourd'hui dérisoire, 7 milliards, devant presque 12 milliards pour les Jeux de Paris 2024, l'enveloppe était pour l'époque vertigineuse et plus chère jusqu’alors.
Infrastructures, équipements sportifs, embellissements de la ville, nouveau quartier et ouverture sur la mer comme atout majeur. Les olympiades de 1992 ont imprimé la mémoire de ceux qui les ont vécus et bien au-delà gravé l'histoire de cette cité méditerranéenne qui a su transformer l'argent des JO en Or. Une audace que la Catalane n'hésite pas aujourd’hui à renouveler avec l'organisation de la Coupe de l'America et ses nombreux aménagements urbains sur le littoral barcelonais.