Pyrénées-Orientales : la construction d’une deuxième prison nouvelle génération à côté d'une cave coopérative fait débat

La construction d’une prison à Rivesaltes dans les Pyrénées-Orientales est à l’étude. Mais le choix du site fait débat. L’établissement pénitentiaire serait le deuxième du département. L’occasion de faire un point sur la situation dans la région. 

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Le projet est colossal. 15 hectares de construction, soit l’équivalent de 28 terrains de football, entourés par un mur de 6 mètres de hauteur. La prison pourrait accueillir jusqu’à 500 détenus et prévoit même la mise à disposition de studios pour les familles. 

Une prison “nouvelle génération”

Parmi les innovations prévues : un glacis de 20 mètres de large entre les deux murs d'enceinte, pour empêcher les jets d’objets depuis l’extérieur. 

Les détenus seront séparés en quartier en fonction de l’évaluation de leur niveau de dangerosité. Différents secteurs pour s’adapter aux profils. Chaque cellule mesurera 10,5 mètres carrés et sera équipée d’une douche.  

Une localisation qui fait débat

Cette nouvelle prison verra le jour sur la commune de Rivesaltes dans les Pyrénées-Orientales. Idéalement située en termes d’accès, dans la zone d’activité du mas de la garrigue, entre la départementale 900 et l’autoroute A9.

Mais dans ce secteur est installée de longue date la cave coopérative Arnault de Rivesaltes. Avec 240 vignerons et une production annuelle de 3,5 millions de bouteilles, la coopérative est un acteur économique majeur dans le département. 

Brice Cassagnes, son président, s'insurge contre le projet, craignant qu’il nuise à son activité : “Le chemin d’accès majeur pour l’entrée des raisins et pour l’activité industrielle du site sera supprimé purement et simplement. Et on va se retrouver avec un conflit d’usage par la suite, puisque les chemins qui seront reproduits seront aussi utilisés par les personnes qui iront à la prison. On nous a annoncé un flux de 400 à 450 véhicules jour qui vont venir fatalement en plus de notre flux d’activité régulier.”

Une aubaine pour le village ? 

Du côté du village, le projet est plutôt accueilli favorablement. Les élus anticipent déjà les gains pour la commune en termes de démographie et d’économie. "Ça va générer 300 familles, des personnels du pénitencier qui vont venir vivre sur l'agglomération de Perpignan en grande partie et qui vont consommer”, se réjouit Laurent Gauze, le vice-président de la communauté urbaine de Perpignan, attaché à l’économie. “On va également bénéficier des services adjoints à l’usage d’un établissement pénitencier comme les repas, le linge, la construction, et Dieu sait que le bâtiment et la fédération du bâtiment, moteur important de notre économie, a besoin de projets structurants”

Un plan pour lutter contre la surpopulation carcérale

Avec un budget de 148 millions d’euros et une capacité d’accueil théorique de 500 détenus, le projet de cet établissement carcéral est ambitieux. Mais est-il suffisant pour autant ? 

La France est l’une des championnes de la surpopulation carcérale en Europe. Avec une moyenne de 116 détenus pour 100 places en avril 2019, elle se trouve juste derrière la Roumanie et la Macédoine du Nord. Un triste palmarès qui lui a valu en janvier 2020 d’être épinglée par la Cour européenne des droits de l’Homme. 

Le problème est bien présent en Occitanie : avec un taux de matelas au sol dans les cellules de 15 à 23% en 2020, les maisons d’arrêt de Perpignan (Pyrénées-Orientales), Carcassonne (Aude), Seysses (Haute-Garonne), Nîmes (Gard) et Béziers (Hérault)sont les plus touchées. 

Lors de la condamnation de la France l’an dernier, la Cour européenne des Droits de l’Homme demandait au pays de prendre des “mesures contre le surpeuplement” et d’ “améliorer les conditions matérielles de détention”. 

Bien conscient du problème, le ministère de la Justice a initié en 2018 un plan immobilier pénitentiaire. Objectif : construire d’ici 2027, 15 000 places en détention supplémentaires. Ce plan immobilier prévoit également la construction de nouvelles prisons comme celle de Rivesaltes et ses 500 lits. En Occitanie, ce plan prévoit également une nouvelle maison d’arrêt à Toulouse en Haute-Garonne (600 places) et à Alès dans le Gard (500 places), une structure d’accompagnement vers la sortie à Montpellier (150 places) et une extension de la prison à Nîmes (150 places).

Actuellement, l’Occitanie compte 16 établissements pénitentiaires. 

Les centres pénitenciers face à la pandémie

Le premier confinement et la baisse d’activité des tribunaux au printemps dernier avaient entraîné une baisse de la population carcérale dans la région. Une baisse accentuée par l’ordonnance de libération simplifiée décrétée pour limiter la propagation du coronavirus au sein des prisons. Mais les chiffres sont depuis repartis à la hausse : au 1er janvier 2020, ils étaient 4 359 détenus (hommes et femmes) pour 2 561 places dans les maisons d’arrêt d’Occitanie. Soit un taux d’occupation de 170% d’après l’Observatoire international des prisons.

Une surpopulation d’autant plus difficile à gérer pour l’administration pénitentiaire qu’il a fallu gérer les cas de Covid-19 : libérer certaines cellules pour isoler les malades et surcharger encore d’avantages celles restantes.

La construction de la maison d’arrêt de Rivesaltes devrait partiellement alléger cette surpopulation carcérale mais il faudra être patient : sa mise en service n’est pas prévue avant 2026.

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