Il est connu pour être le seul clocher au monde à avoir les pieds dans l'eau. Le clocher de Collioure est également connu pour sa forme qui n'est pas sans rappeler l'organe sexuel masculin. Un visuel atypique auquel s'est intéressé le plasticien catalan MA2F depuis plusieurs décennies. Il a même élaboré toute une théorie artistique autour du fameux clocher qui fait aujourd'hui l'objet d'une exposition.
Il est la star incontestée de la baie de Collioure. Un des monuments préférés de la côte catalane. D'abord fanal au Moyen-Age, puis tour de défense et finalement devenu clocher de l'église en 1693, celui que les Catalans appellent le "Campanar" de Collioure attire toujours le regard des passants tant autochtones que vacanciers et titille l'imagination. Il est le seul clocher au monde à avoir les pieds dans l’eau mais il possède une particularité encore plus singulière puisqu'il est surnommé : le clocher phallique.
Il y a un côté phallique. Ce serait mentir que de ne pas le voir.
vacancier
Le clocher phallique
À partir de cette idée, le plasticien et enseignant à l'Université de Paris VIII, Marc-André De Figueres, MA2F, a élaboré une “Théorie Érotique du Clocher de Collioure”, articulée autour de 23 toiles, de dessins et d’une publication. Une théorie, éditée dans un ouvrage en 2002, alimentée par la confrontation de deux documents : une vue topographique de Collioure et une coupe anatomique longitudinale d’une femme enceinte, réalisée d’après des études de Léonard de Vinci sur le corps humain.
L'idée était d'utiliser la topographie de Collioure. Alors, au Fort Saint-Elme on s'aperçoit que l'aspect phallique du clocher n'est qu'une question de point de vue. C'est-à-dire que si on le voit de très près, il devient immense, si on le voit du Fort Saint-Elme il devient clitoridien. Et là, la jonction entre les deux, le masculin et le féminin s'établit.
MA2F
Point de vue et vue de l'esprit
La comparaison va s'établir par le jeu d’associations anatomiques des différentes parties du port, observées à partir de deux points de vue particuliers, de près ou de loin. Celle-ci est une vue de l’esprit, une reconstruction de la réalité un peu comme dans un procédé en trois dimensions. Une transposition du paysage à partir de deux images juxtaposées, à priori identiques mais en réalité légèrement différentes parce que conçues l’une pour l’œil droit et l’autre pour l’œil gauche.
Les deux yeux ne voyant pas les mêmes choses, le cerveau va superposer les deux propositions pour n'en former qu'une seule, une image nouvelle, recomposée, imaginaire mais bien vivante, qui va synthétiser les nouveaux pôles topographiques attribués au corps.
De la théorie à une exposition
De cette réflexion entamée il y a plus de vingt ans est née, cette année, une exposition. Forte d'une vingtaine de toiles pour exprimer la dualité du genre du monument colliourencque en utilisant trois états du spectre de la lumière.
Quand on est en dessous du rouge, la première couleur qu'on voit, on est dans l'infrarouge. Donc là on voit un côté beaucoup plus féminin. Quand on passe au-delà du violet, c'est-à-dire dans l'ultraviolet, on voit la partie beaucoup plus masculine. Quand les deux se réunissent, on a un ensemble possible des visions de l'œuvre.
MA2F
Une nouvelle édition de cette théorie vient de paraître, 88 pages chez Balzac Editeur. Quant à l'exposition, elle est à découvrir à la galerie de l'ancienne Mairie à Collioure jusqu'au 14 septembre. Sea, sex and sun.