L'Occitanie est l'une des régions les plus touchées par le phénomène : les sécheresses provoquent des fissures d'ampleur sur les habitations car les sols argileux se rétractent. Le réchauffement du climat rend la question encore plus sensible.
Patrick Gilavert se voit enfin sortir de l'ornière. Mais il aura fallu quatre ans, cinq pour les finitions à venir... Cet habitant de l'Union, une commune de l'agglomération toulousaine, a constaté des fissures qui n'ont fait que croître et, si on peut dire, embellir. Jusqu'à l'année 2018.
La sécheresse occasionne alors de gros dégâts sur ses murs. Mais sa maison n'est pas la seule concernée. La mairie prend un arrêté de catastrophe naturelle. Dès lors, commencent le ballet des experts pour analyser le sol. C'est l'argile qui est en cause. Le sol se crevasse du fait de la sécheresse avant de gonfler à nouveau avec la pluie comme le ferait une éponge. Ces mouvements déstabilisent l'ensemble de la structure.
"Les fondations sont bien faites, constate Patrick Gilavert. Mais chaque été, nous voyions de nouvelles fissures apparaître dans la maison. Avec les travaux, la maison est maintenant sur pilotis, des micropieux l'ont stabilisée. Il ne nous reste plus que les travaux d'embellissement, car il a fallu en mettre tout autour et six à l'intérieur". Un chantier dont Patrick ne verra la fin qu'en 2023.
"Une technique éprouvée"
"Dans la région, nous intervenons particulièrement dans le Tarn, la Haute-Garonne, le Tarn-et-Garonne, le Gers et l'Aude, explique Lionel Cavarec de la société Soltechnic qui a réalisé les travaux. Autour de Toulouse par exemple, on trouve des terrains plus sensibles que d'autre à ce phénomène retrait-gonflement comme les communes de Villeneuve-les-Bouloc, Bouloc, Gratentour".
L'entreprise a différents modes opératoires en fonction de la gravité des dégâts : des traitements de fissures par matage et harpage (élargissement de la fissure et remplissage au mortier avec pose d'agraphes), des injections de résine sous les fondations ou encore la pause comme chez Patrick de micropieux.
"Dans ce dernier cas, on passe à travers les fondations, on va ancrer le micropieux dans le substratum qui n'est pas sensible à la sécheresse, poursuit Lionel Cavarec. On place ces micropieux tous les deux mètres environ sous l'ensemble des murs porteurs tout autour de la maison, et même dans la maison. On a un retour d'expérience de 30 ans qui nous permet de constater que c'est une technique éprouvée et reconnue dans le temps".
Un phénomène qui risque de s'accentuer avec le réchauffement climatique
Sur son site écologie.gouv, l'Etat mentionne l'année 2018 comme "la plus chaude depuis 1900, avec une température annuelle moyenne supérieure de 1,4 °C par rapport à la normale. Et comme en 2017, la France a connu un phénomène important de retrait-gonflement des argiles. La sécheresse 2018 n'a débuté qu'à l'été, mais elle coûtera entre 750 et 880 millions d'euros, un montant très supérieur aux moyennes des dernières années".
Le réchauffement climatique à l'œuvre fait craindre une accentuation du phénomène qui a été identifié dans les années 1950. A l'heure actuelle, il constitue le premier poste d’indemnisation au titre de l’assurance dommage-ouvrage, pour les sinistres touchant les maisons individuelles.
"Les arbres, les chênes en particulier qui ont besoin d'eau pendant les périodes de sécheresse, pompent davantage l'eau du sol et accentuent le phénomène de rétractation", poursuit Lionel Cavarec. Un phénomène plus prégnant sur les habitations individuelles qui disposent de fondations moins profondes que les constructions collectives.
Les services de l'Etat, tout comme l'IFSTTAR, font part de préconisations pour les particuliers qui envisagent de faire construire. Si le premier des conseils est de consulter le PPR, plan de prévention des risques, voire le PPRS, plan de prévention des risques sécheresse, d'autres recommandations paraissent pertinentes.
Les risques existent en effet : distorsion des portes et fenêtres, une dislocation des dallages et des cloisons et, parfois, la rupture de canalisations enterrées, des perrons peuvent se détacher, tout comme des terrasses ou des garages. Un phénomène qui s’amplifie avec le changement climatique, et représente, d'après le site du ministère de la Transition écologique, 38 % des coûts d’indemnisation du dispositif Cat Nat (catastrophes naturelles) après les inondations.