A Bruniquel dans le Tarn-et-Garonne, les réfugiés prennent un nouveau départ

Déjà un an qu'ils ont débarqué sur cette terre inconnue du Tarn-et-Garonne, après leur longue odyssée du Soudan à la jungle de Calais. Dans le village isolé de Bruniquel, Abdallah, Isam, Mokhles ou encore Magdi ont repris leur souffle, pansé leurs plaies, et démarré une nouvelle vie.

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Sur les 24 jeunes exilés soudanais, débarqués au Centre de Bruniquel (82) à l'automne et à l'hiver 2016, 11 ont décroché le précieux sésame de réfugié.
"Je suis heureux maintenant, on m'a donné le droit de vivre dans ce pays, c'est le pays des droits de l'Homme", lance Isam, 30 ans, qui figure parmi les tout premiers arrivants au Centre d'accueil et d'orientation (CAO) de Bruniquel. "A tous mes amis qui souffrent et qui attendent, je leur dis : soyez patients, vous êtes dans un pays qui est bien et qui va vous accueillir", a-t-il assuré au micro, lors d'une soirée du CAO, à l'attention de ses compagnons encore plongésdans la longue procédure de demande d'asile.

Les yeux rougis et les traits tirés, ces jeunes migrants, mariés pour certains mais sans enfant, ont débarqué il y a plus d'un an à Bruniquel par bus de Calais, après avoir fui les conflits au Darfour (province de l'ouest du Soudan)  et au Soudan du Sud, en passant par la Libye pour la plupart. Comme tant d'autres, ils avaient traversé la Méditerranée au péril de leur vie, rejoint l'Italie en bateaux pneumatiques, puis la France à pied. Beaucoup avaient enduré le froid parisien porte de la Chapelle, avant d'échouer dans la cauchemardesque jungle de Calais.

"Bruniquel restera toute notre vie au fond de nous", déclare Mokhles, qui vient de déménager à Toulouse, son titre de réfugié en poche. "Au début c'était difficile,c'était un petit village, on ne comprenait pas pourquoi on venait ici, mais ils nous ont fait sentir qu'on n'était pas des étrangers".
"Même loin de nos racines, on n'a vécu que des belles choses ici", renchérit Mohammed, qui commence sa nouvelle vie à Montauban, "vous êtes notre famille maintenant, jusqu'à la fin de ce monde, on n'oubliera jamais ce que vous avez fait". Des dizaines de bénévoles, voisins et habitants de communes plus éloignées, se sont croisés chaque jour dans l'ancienne gendarmerie de Bruniquel transformée en CAO, autour de ses cinq salariés.

"Le CAO c'était le premier toit sur leur tête, le premier lieu un peu humain qu'ils ont traversé, même s'ils se sont demandés ce qu'ils faisaient ici à la campagne", constate Stéphanie Roger, l'assistante sociale, soulignant "l'élan de solidarité" dans le village, qui a fourni meubles, nourriture et aide quotidienne. "Cela a permis à des gens qui autrefois étaient parqués de connaître notre pays, et à deux publics qui ne se rencontrent jamais de se connaître", observe la jeune femme qui les a accompagnés dans toutes les démarches pour obtenir l'asile.
"Au début, personne ne croyait avoir un jour des papiers, ils croyaient qu'on voulait juste les cacher à la campagne", souligne leur traducteur Mohamed Abchir.

Main dans la main avec salariés et bénévoles, les migrants ont réalisé une fresque sur le mur de l'école, découvert la région et appris le français assis sur les coussins colorés du salon du CAO.
Après une première réunion mouvementée "noyautée par l'extrême droite", "les hostiles, on ne les a plus entendus", se félicite Michel Montet, le maire de ce petit village médiéval classé. C'était une "vraie valeur ajoutée" pour Bruniquel, estime l'édile, qui s'était personnellement impliqué pour l'ouverture du CAO dans l'ancienne gendarmerie inoccupée et déclenchait des sourires chez les migrants à chacune de ses visites.
Prévu pour durer trois mois, le centre de Bruniquel aura finalement vécu plus d'un an. Le bâtiment, propriété du département, a fini par être revendu et ses occupants déménageront d'ici fin janvier à Parisot (Tarn-et-Garonne) dans six chalets d'une capacité totale de 50 places. Les Soudanais qui vivent toujours à Bruniquel rejoindront les Afghans et Erythréens, actuellement hébergés non loin de là dansun gîte à Verfeil.
Pour Anaïs Rondeau, la responsable du centre, "le pari est réussi", "une formidable aventure humaine" qui se poursuit désormais sous un autre toit.

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