"Inacceptable", "une déflagration"... La colère des éleveurs français après l'annonce par Lactalis de la baisse de ses collectes de lait. À partir de la fin 2024, le leader mondial va réduire de près de 9% ses achats de lait auprès de certains producteurs. La filière se retrouve plongée dans l'incertitude.
L'annonce a fait l'effet d'une bombe. Lactalis, le leader français de la collecte de lait, annonce diminuer de 8.8% ses achats dès le 1ᵉʳ janvier 2025. Les premiers à être touchés seront les producteurs installés dans les régions de l'Est et des Pays de la Loire. Mais la crainte se diffuse dans tout le pays. Des producteurs, installés dans des départements comme le Gers et le Tarn-et-Garonne, redoutent d'être les prochains sur la liste.
"Une filière abasourdie"
Damien Cantaloube est producteur de lait sur la commune de Montauban. Et ce représentant de la FDSEA du Tarn-et-Garonne est un peu sous le choc. "Aujourd'hui, la filière a été abasourdie par les annonces de Lactalis qui de manière unilatérale va baisser sa collecte en France, nous dit-il tout en s'occupant de ses vaches. On ne s'attendait vraiment pas à ce genre de communication alors que la filière est déjà dans des baisses de production depuis plusieurs années, voire une décennie."
Pour cet éleveur et producteur laitier, tout cela a été savamment orchestré. Compte tenu de la baisse de rentabilité, le nombre de producteurs ne cesse de baisser. Et la baisse de densité des producteurs entraîne fatalement une hausse du coût de la collecte de lait, explique-t-il encore. "Et aujourd'hui, ces industriels nous expliquent que cela coûte trop cher de collecter le lait dans certaines régions", commente avec amertume Damien Cantaloube.
"Encore plus d'incertitude"
Quel avenir pour la filière alors que la production de lait baisse déjà d'année en année ? Selon Damien Cantaloube, les producteurs n'ont plus vraiment de garanties. "La problématique aujourd'hui, dans 99% des cas, c'est que les producteurs n'ont qu'un seul client. Et sur un département comme le nôtre, on n'a pas vraiment le choix du collecteur. Et on peut vite se retrouver dans une situation embarrassante si notre seul client ne veut plus nous collecter", explique le représentant de la FDSEA du Tarn-et-Garonne.
Ce genre d'annonce créé encore plus d'incertitude. Ce n'est pas un bon signe envoyé à la filière.
Damien Cantaloube, producteur de lait à Montauban
Et cela n'encourage pas à investir. Quand vous investissez dans une exploitation laitière, il faut avoir en tête que les amortissements seront très longs, explique cet éleveur et producteur de lait de vache. "Et si vous n'avez aucune garantie, que dans trois ou quatre ans, on continuera à collecter votre lait, vous ne le faites pas." Maintenir la production, trouver des repreneurs... La situation est déjà bien assez compliquée dans la filière.
Plus de 600 producteurs de lait devraient subir les conséquences de l'annonce de Lactalis. À commencer par ceux installés dans les régions Pays de la Loire et de l'est de la France.
(Propos recueillis par Jordan Lasserre)