La filière française de pommes est arrivée à un point de rupture. Ce samedi 14 janvier, des arrachages de vergers se dérouleront chez les producteurs de pommes du Tarn-et-Garonne. Une arboricultrice témoigne.
Les arboriculteurs sont à un point de rupture. Ce samedi 14 janvier, dans les grandes zones de production de pommes, ils vont mener les premières actions d’arrachage de vergers. Les producteurs de fruits du Tarn-et-Garonne veulent mettre la pression sur les centrales d'achat pour essayer de trouver un terrain d'entente.
"80% de nos fruits partent dans les grands magasins et dès qu'il y a une guerre des prix qui se réveille en grande surface, c'est le cas cette année avec l'inflation, tout flambe", explique Françoise Roch, arboricultrice à Moissac.
Ça met le feu aux exploitations parce que l'on a des magasins en face qui mettent des contraintes énormes sur les producteurs et qui veulent absolument des prix très bas.
Françoise Roch, arboricultrice à Moissac
L'arrachage des vergers, prévu ce samedi, vise à "dénoncer les centrales d'achats qui, selon l'arboricultrice, mettent des pressions folles sur les producteurs et qui importent de la pomme polonaise à bas prix pour nous faire de la concurrence, et qui ne jouent pas le jeu de la production française".
20 centimes de plus au kilo
Les producteurs demandent 20 centimes supplémentaires au kilo pour assurer l’avenir de leurs vergers. "20 centimes sur la pomme ne représentent pas une somme complètement folle sur la marge que produisent, de façon importante, les grandes surfaces sur les fruits et les légumes. Par exemple, la Gala calibre 115/150 en sachet de 2kg est commercialisée à 0,71€/kg alors que son prix moyen de 2018 à 2022 était de 0,84€/kg", souligne Françoise Roch.
La production avec l'industrie, les frais de la station, le choix, le calibrage et l'emballage... C'est un produit qui part aux centrales à 1 euro, 1 euro 20 en plateaux de 8 kilos. Aujourd'hui, pour que l'on puisse s'en sortir , il faudrait qu'il soit à 1 euro 40 ou 1 euro 50.
Françoise Roch, arboricultrice à Moissac
Françoise Roch possède 20 hectares de fruits (pommes, prunes et raisin de table) et pour elle, les arboriculteurs français ont la quantité nécessaire pour fournir le marché français, "on produit 1,5 million de pommes et la France en consomme à peu près 800.000 tonnes, donc on peut largement approvisionner le marché français".
Concurrence déloyale
Mais aujourd'hui, les arboriculteurs estiment que la concurrence est déloyale. Et le risque est de perdre la production française au profit de pays qui sont capables de produire moins cher.
"Des pays comme la Pologne ou l'Italie sont capables de produire beaucoup moins cher que nous avec des conditions sociales bien plus dégradées qu'en France, des conditions de production qui n'ont rien à voir avec la France", insiste Françoise Roch.
En France, on a des contraintes écologiques, environnementales, sociales, c'est bien plus compliqué que dans certains pays.
Françoise Roch, arboricultrice à Moissac
L'arboriculture française a perdu 40% de ses vergers en 20 ans
Mais le problème ne date pas d'hier, "pour la pomme, cela fait une vingtaine d'années que l'on voit que cela se dégrade, ça ne s'est pas fait du jour au lendemain, on perd des vergers, on perd des parts de marché, l'arboriculture française a perdu 40% de ses vergers en 20 ans".
Cela nous coûte de plus en plus cher de produire, ça devient très compliqué. Lorsque l'on décide des arrachages, c'est que l'on est au bout du bout.
Françoise Roch, arboricultrice à Moissac
Le rendez-vous est prévu à 8 heures devant la Chambre d'agriculture du Tarn-et-Garonne ce samedi 14 janvier 2023. Des opérations qui devraient malheureusement se multiplier ces prochains mois si les enseignes de la grande distribution ne se décident pas à payer aux producteurs de pommes le prix de leur travail.