70 ans plus tard, Gaillac expose les Villon, Brayer et autres artistes fuyant l'Occupation

De Brayer à Villon, 1939-1945", ils étaient des dizaines d'artistes réfugiés dans le sud-ouest français, fuyant l'occupation allemande. Le musée des Beaux-Arts de Gaillac rend hommage, 70 ans après la fin de la 2e Guerre mondiale à ceux installés dans le Tarn.

Ils s'étaient réfugiés en "Petite Toscane" 
Une pléthore de peintres, sculpteurs, architectes se sont constitués en "écoles" dans cette région rebaptisée "petite Toscane". Leurs croquis, peintures et sculptures, souvent réalisés avec de petits moyens en période de pénurie, ont été acquis autant par le Centre parisien Georges Pompidou que par le Musée américain de Cleveland.
Cette période foisonnante est palpable à travers une soixantaine d'oeuvres présentées du 6 juin au 13 décembre par le musée gaillacois qui trône en plein Parc Foucaud sur les bords du Tarn.

Jacques Villon
Le peintre-graveur cubiste Jacques Villon, frère de Marcel Duchamp et Raymond Duchamp-Villon, y a laissé ses marques avec ses paysages colorés en carrés. Il s'est vu rattacher au groupe géographique dit de La Brunié, du nom de la demeure de Marc Vêne, marié à la fille d'André Mare, son ami.

Mare et ses hôtes
Mare, architecte, peintre et co-fondateur de l'Art déco, ami d'enfance de Fernand Léger, avait exposé au salon des Indépendants à Paris avec les frères Villon.
Parmi ses hôtes, le pianiste Vlado Perlemuter (juif inscrit sur les listes noires nazies) très lié à Ravel, mais aussi les plasticiens Hans Bellmer, Georges Artemoff ou Hans Reichell, Allemand indésirable car ami des surréalistes...

Art en campagne et résistance 
Yves Brayer, l'un des contemporains les plus célèbres, avait loué une maison à Cordes-sur-Ciel, village à l'époque quasi à l'abandon. Avec le début de la guerre puis l'occupation allemande, ses amis issus comme lui de la villa Médicis l'ont rejoint.
Cette jeunesse bruyante incommodait "le voisinage qui ne voyait pas d'un bon oeil tous ces fêtards", explique le conservateur en chef des musées de Gaillac, Bertrand de Viviès.
A Cordes est alors née "une vraie académie artistique qui a duré près de deux ans", dit M. Viviès. "Pendant la guerre ici, la zone était très tranquille. Les
Allemands ne sont jamais venus à Cordes", raconte-t-il. "Les juifs et les maquisards se promenaient dans ce village perché en hauteur en toute tranquillité", selon les mémoires d'Hermione Brayer, épouse du peintre.
Les jeunes filles du village comme les réfugiées espagnoles servaient de modèle à l'artiste. L'emblème de l'exposition est d'ailleurs une toile représentant une jeune Espagnole nue dans un fauteuil Voltaire près d'une fenêtre donnant sur un paysage pastoral.

Cavaillès
D'autres groupes ont été constitués, dont celui de Castres, de la Montagne Noire, ou de la Berbie autour de Jules Cavaillès à Albi.
Cavaillès, revenu dans sa région natale après sa démobilisation, avait connu certains artistes à Paris lorsqu'il enseignait aux Arts décoratifs.
Mais tout comme Mare et d'autres, il "a aussi fait un travail important dans la résistance, en particulier avec le marquis (Charles) d'Aragon", l'un des chefs
de ces résistants, explique M. de Viviès. L'épouse de Cavaillès a d'ailleurs été "très grièvement blessée dans un combat dans la Montagne Noire".
Membre du mouvement des peintres dits de la réalité poétique, Cavaillès était très lié au résistant Jean Cassou, écrivain, critique et plus tard fondateur du Musée national d'art moderne à Paris.

Ceux qui sont restés
Certains n'ont fait que passer dans la région, d'autres sont restés, comme le Russo-Estonien Nicolaï Greschny, ou les Espagnols Francisco Bajen et son épouse Martine Vega. Leur maison de Monestié, près de Cordes, est devenu un musée des oeuvres des deux Républicains.
"Finalement, il n'y a pas eu coupure" entre les deux mondes de l'occupation et de la campagne tarnaise. Les artistes ont continué à vendre et à honorer des commandes. "C'était simplement beaucoup plus discret" durant l'occupation allemande, selon le conservateur de l'exposition.
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