Après les réquisitions rendues par le parquet de Toulouse, Cédric Jubillar semble se rapprocher un peu plus chauqe jour de la cour d'assises dans l'affaire de la disparition de sa femme, Delphine. Maître Emmanuelle Franck, son avocate exprime ses doutes quant à l'équité du procès à venir.
Clôre au plus vite ce dossier après avoir fabriqué un coupable. L'argument des avocats de Cédric Jubillar n'est pas nouveau, mais après les réquisitions du parquet de Toulouse réclamant le renvoi de leur client devant une cour d'assises, Me Emmanuelle Franck, Alexandre Martin et Jean-Baptiste Alary veulent le faire entendre. Seul véritable suspect dans cette enquête, particulièrement médiatique, de la disparition de Delphine Jubillar dans le Tarn, son mari ne devrait pas échapper à la cour d'assises. Entretien avec Me Emmanuelle Franck.
France 3 Occitanie : Est ce que ces réquisitions du parquet de Toulouse sont une surprise pour vous ?
Me Emmanuelle Franck : Non, ce n'est absolument pas une surprise, cette décision du parquet, en tout cas cet avis du parquet. Depuis le début, malheureusement, nous savons bien que nous sommes, plus particulièrement que Cédric Jubillar, dans un engrenage judiciaire qui fait que les dés sont jetés depuis la disparition de Delphine. Tant l'enquête que l'instruction ne se sont pas véritablement s'attaché à découvrir la vérité, mais plutôt à la fabrication d'un coupable et d'un futur accusé. Donc en réalité, depuis à peu près le mois de décembre 2020, fin décembre, début janvier 2021, et nous le voyons quand nous lisons l'enquête, nous savons déjà que cet homme est désigné comme le coupable, qu'il faut qu'il le soit coûte que coûte et que ça se terminera devant une cour d'assises.
France 3 Occitanie : Selon le ministère public, ce dossier n'est pas si vide que cela.
Me Emmanuelle Franck : Quand on lit le réquisitoire définitif, on se rend compte qu'il est quand même assez vide, puisque les éléments relatifs à ce qu'on appelle la discussion, c'est-à-dire l'argumentation qui doit être celle du ministère public pour justifier son avis de renvoi devant une cour d'assises, c'est à peu près 4 pages et demie. C'est vrai qu'on sait que dans le dossier nous avons 15 000 pages à peu près de procédures, et au final l'argumentation est en 4 pages et demie, et c'est une argumentation qui est très mal nommée, puisque ça n'en est en réalité pas une. On vous égrène des éléments de contexte. Il aurait préféré ne pas divorcer. On nous reparle des expertises des lunettes de Delphine, du sens du véhicule et des cris de femmes entendus par les voisines pendant la nuit, et puis on vous met ça sur 4 pages, sans qu'il n'y ait aucun lien entre les différents éléments, sans qu'on ait le début d'un élément de preuve. On vient vous expliquer que cela ne peut être que lui, donc c'est forcément lui. Ce qui est tout, sauf un raisonnement judiciaire.
France 3 Occitanie : Et ce ne sont pas des charges suffisantes selon vous ?
Emmanuelle Franck : Selon nous, ce ne sont pas des charges suffisantes, de la même manière que ça n'était pas des indices graves ou concordants, justifiant une mise en examen. On est quand même dans un dossier où le seul raisonnement qui est utilisé depuis le début, c'est un raisonnement déductif. Cette femme ne s'est pas suicidée et n'aurait pas pu vouloir partir en quittant ses enfants, donc forcément il lui est arrivé quelque chose, premier élément de déduction. Deuxième élément de déduction, on n'a pas trouvé un autre coupable que Cédric Jubillar, en même temps il faut dire qu'on n'a pas vraiment cherché, donc ça ne peut être que lui, deuxième élément de déduction. Et c'est vrai que ça fait un peu peur quand on voit que c'est avec un raisonnement comme ça qu'on peut incarcérer un homme et ensuite le renvoyer devant une cour d'assises.
France 3 Occitanie : C'est-à-dire que vous écartez totalement le fait que la justice puisse avoir des éléments déterminants ?
Emmanuelle Franck : Elle n'a aucun élément déterminant, ça nous le savons. Il n'ya aucun élément de preuve. Nous arrivons à un stade où nous allons nous retrouver devant une cour d'assises et ce que doivent juger des jurés c'est l'existence ou non de preuves, c'est-à-dire pas des charges, pas des indices, pas des raisons plausibles de soupçonner qu'on est au stade maintenant de la preuve. Et au stade de la preuve, les médias le savent autant que nous, s'il y en avait une, ça fait bien longtemps que vous le sauriez, nous n'avons aucun élément sur l'endroit où se trouverait Delphine, aucune scène de crime. Cédric Jubillar, par ailleurs, clame son innocence et nous n'avons pas le début de l'embryon d'une explication de ce qui a pu se passer cette soirée-là. Avec des gendarmes qui en dépit de ce qu'ils ont bien voulu laisser entendre n'ont absolument cherché aucune autre piste, puisque dès le 16 décembre 2020, c'était Cédric Jubillar