Autoroute Castres-Toulouse : y-a-t-il réellement eu "2500 individus radicaux et violents" lors de la manifestation contre l'A69 ?

Samedi 21 octobre 2023, selon la préfecture du Tarn, 5000 personnes ont manifesté près de Castres contre le projet d'autoroute A69 dont "2500 individus radicaux et violents en dehors du cortège" précise les services de l'Etat. Un dernier chiffre largement contesté sur le terrain

"2500 individus radicaux et violents en dehors du cortège", samedi 21 octobre ce chiffre, concernant la manifestation contre le projet d'autoroute A69 aux environs de Castres (Tarn) tourne en boucle sur certains médias et sur les réseaux sociaux. 

Dans un message adressé à la députée LFI, Mathilde Panot, sur X (anciennement Twitter) le ministre des transports Clément Beaune s'en empare : "C’étaient 2400 manifestants, deux fois moins qu’à la précédente manifestation en avril. Et 2500 éléments radicaux, cagoulés et violents, que vous ne dénoncez toujours pas."

Cagoulés, vêtus de noir, casqués

Ce chiffre ne sort pas de nulle part. Il est tiré directement du communiqué de presse de la préfecture du Tarn faisant le bilan de cette journée de mobilisation : "2500 individus radicaux, qui étaient presque tous cagoulés, vêtus de noir, casqués, portant des boucliers, des bâches noires et des parapluies, se sont détachés du cortège déclaré pour commettre des exactions.
• Les individus hostiles ont dégradé une cimenterie et y ont déclenché un incendie. Après avoir été entravés par les manifestants, qui ont été repoussés par les forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers sont intervenus sur le lieu de l’incendie. Les dégâts matériels comprennent un algéco, trois véhicules toupies et un engin de travaux publics.
• Les individus hostiles se sont également introduits par effraction sur le site d’une entreprise de travaux publics. Ils ont pris son vigile à partie, dégradé le bâtiment et arraché ses clôtures, avant d’être repoussés par les forces de l’ordre."

L'exemple de Saint-Soline

Lors de sa diffusion, plusieurs journalistes, couvrant l'événement, ont cru à une erreur. D'où d'abord en raison de son ampleur. Lors de la manifestation contre les bassines à Sainte-Soline, les autorités avaient identifié 800 à 1000 "radicaux", français et étrangers, parmi lesquels "400 à 500 black blocs expérimentés et ultra-violents" sur un total de 8000 manifestants.

Dans le Tarn, le nombre de personnes présentes a été évalué à près 5000 personnes, soit deux fois moins que dans les Deux-Sèvres. 

Mais il y a aussi la réalité du terrain. Selon plusieurs témoignages, il n'y avait pas "2500 individus radicaux qui étaient presque tous cagoulés, vêtus de noir, casqués, portant des boucliers, des bâches noires et des parapluies" ayant attaqué deux entreprises, une cimenterie et une entreprise de travaux publics.

La réalité du terrain

A partir de cette description, les reporters de France 3 Occitanie évaluent le nombre de Black Bloc à 400 personnes grand maximum. 

Il suffit d'observer les photos et les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux pour constater qu'ils n'étaient guère plus. Plusieurs images, visibles ci-dessous, réalisées par le journaliste de France 3 Occitanie, David Bobin, avant le départ du cortège et lors des dégradations contre les locaux de Bardou Promotion confirment ce constat.

durée de la vidéo : 00h01mn10s
Deux cents manifestants habillés de noir, masqués, équipés de parapluies, de drapeaux rouge et aux couleurs palestiniennes tapent des mains et reprennent un slogan antifasciste dans le cortège de la manifestation ©David Bobin - FTV

durée de la vidéo : 00h01mn22s
Un incendie s'est déclaré dans une cimenterie, l'entreprise sous-traitante du chantier de l'A69 Carayon Castres. Un groupe de manifestants s’en est pris au bâtiment. ©David Bobin - FTV

D'ailleurs, dans l'après-midi, la préfecture, elle-même, évoquera un "groupe de 400 personnes extrêmement virulent" s'en prenant à une "entreprise de cimenterie et a déclenché un incendie." Un chiffre confirmé par France 3 Occitanie auprès de diverses sources au sein des forces de l'ordre.

Criminaliser et délégitimer le mouvement ?

Du côté des Soulèvements de la Terre à l'origine, avec des collectifs locaux, de cette mobilisation, on se moque de ce décompte : "Selon la préfecture il y aurait donc : - eu 2400 personnes contre l'A69 - pour 1600 policiers- et 2500 personnes "au profil radical" ayant tenté d'intégrer le cortègeIl faut arrêter l'alcool @prefet81. Sinon on a vraiment compté, on était 10 000 !

Pourquoi ce chiffre a-t-il été surévalué ? Une volonté de "criminaliser" et de délégitimer le mouvement  comme le dénoncent plusieurs collectifs d'opposition à l'A69 ? Celle de différencier les manifestants locaux aux membres des Soulèvements de la Terre, dont le gouvernement a demandé la dissolution, avant qu'elle ne soit suspendue par le Conseil d'Etat, catégorisé comme un "groupe éco-terroriste" ?

Sollicités à plusieurs reprises, les services de la préfecture du Tarn n'ont pas daigné répondre à nos demandes. 

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