5 ans après la mort de Rémi Fraisse, le jeune militant écologiste tué lors d'affrontements avec la gendarmerie sur le chantier du barrage de Sivens (Tarn), deux cents personnes lui ont rendu hommage dans la forêt proche du site du drame.
Voir le reportage de Sylvain Duchampt et de Jean-Pierre Duntze :
Des membres du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet, du collectif Tant qu'il y aura des bouilles, d'anciens occupants de la ZAD...Ils étaient deux cents ce samedi matin à être venus faire une ballade botanique en forêt de Sivens, près de l'ancien site du projet de barrage où le jeune militant Rémi Fraisse a trouvé la mort il y a tout juste 5 ans, victime du tir par un gendarme d'une grenade offensive.
5 ans après la mort de Rémi Fraisse un nouveau projet de barrage considéré comme "un affront" à sa mémoire
Comme chaque année à la même époque, les associations écologistes rendent hommage à Rémi Fraisse. Mais ce cinquième anniversaire prend un relief particulier avec la réapparition d'un autre projet de barrage sur la zone humide. Au début de cet été, le projet de réalisation d'une retenue d'eau 300 mètres en amont du projet initial a en effet refait surface, relançant du même coup la polémique. Ses opposants dénoncent un "affront" à la mémoire du jeune militant.Les Gilets jaunes ont par ailleurs décidé d'associer leur acte 50 à cet hommage en appelant à un rassemblement contre la répression des mouvements sociaux.
Le 26 octobre 2014, le corps du botaniste de 21 ans avait été découvert vers 02H00 du matin sur le site du barrage controversé de Sivens, après des affrontements violents entre les opposants au projet et les forces de l'ordre. Il sera avéré quelques jours plus tard que le jeune homme a succombé à l'explosion d'une grenade offensive tirée par un gendarme.
"Cinq ans plus tard, le souvenir est d'autant plus vif qu'un prétendu projet de territoire entaché de dysfonctionnements remet le barrage de Sivens sous les projecteurs", affirme Camille ainsi prénommé de façon générique, comme tous les militants souhaitant garder leur anonymat.
Le projet initial retenu en 2012 avait provoqué une levée de boucliers des environnementalistes, opposés notamment à la destruction d'une zone humide.
Il fut définitivement abandonné à la suite de la mort de Rémi Fraisse.
"Meilleur compromis"
Un nouveau projet d'irrigation dans la vallée du Tescou est aujourd'hui sur la table. Le 9 septembre, élus locaux, associations environnementales et agriculteurs se sont mis d'accord sur un schéma de principe actant le lancement d'une étude spécifique sur les besoins en eau de l'ensemble de la vallée et les différentes pistes pour y répondre, notamment la création d'une retenue sur le haut-bassin du Tescou.souligne le président du Conseil départemental du Tarn, Christophe Ramond.Le besoin en eau dans la vallée est avéré. Maintenant, il faut le quantifier,
"Il y a eu un drame, et il est hors de question que l'on revive le même drame dans cette vallée", affirme-t-il, appelant tous les acteurs locaux à "trouver le
meilleur compromis pour permettre à la fois le développement d'activités économiques et la préservation de la biodiversité et la richesse de la vallée".
Mais pour Camille, cette eau est destinée à "répondre aux besoins d'agriculteurs cultivant du maïs hybride, qui n'est plus adapté à nos régions". Il dénonce par ailleurs "un affront fait à la mémoire de Rémi Fraisse" avec ce "barrage ou retenue, quelle que soit la dénomination qu'on lui donne".
Cet "affront", les proches du jeune homme le ressentent également avec l'ordonnance de non-lieu en faveur du gendarme rendue en janvier 2018 par les juges d'instruction. Dans ses réquisitions, le parquet avait estimé que le gendarme avait "effectué dans des conditions d'absolue nécessité et de stricte proportionnalité un lancer de grenade OF-F1".
"On ne peut pas tolérer qu'il n'y ait pas de procès public, on a aujourd'hui l'impression que la justice n'est pas rendue", a déclaré le 10 octobre le père de Rémi, Jean-Pierre Fraisse, à l'issue d'une audience à la Cour d'appel de Toulouse, au cours de laquelle l'avocat général a demandé également le non-lieu.
Le délibéré sera rendu le 9 janvier.
Le décès de Rémi Fraisse aura eu pour conséquence l'interdiction définitive des grenades offensives quelques mois plus tard.
Mais pour l'une des avocates de la famille de Rémi Fraisse, Me Claire Dujardin, "aucune leçon n'a été tirée de ce qui s'est passé à Sivens". Dans les manifestations des "gilets jaunes" notamment, "on assiste à une vraie dérive de la doctrine du maintien de l'ordre. On a l'impression que beaucoup d'unités spécialisées agissent sans forcément avoir reçu d'ordre, avec des cartes blanches pour tirer", accuse-t-elle, dénonçant "le nombre très élevé de manifestants mutilés, victimes de la violence policière et de l'usage d'armes".
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