1500 euros dans les 40 départements les plus touchés, seulement 500 euros sur le reste du territoire. Dans les établissements considérés comme n’étant pas en première ligne, l’attribution de la prime aux soignants promise par le gouvernement est loin d’être comprise.
Dans une lettre ouverte aux différents responsables politiques, l’Union Syndicale Départementale Santé et Action Sociale CGT du Tarn dénonce une « usine à gaz créatrice d’inégalités insupportables », écartant « de fait une grande partie des professionnels de la santé et de l’action sociale publics et privés pourtant tous mobilisés depuis le début de la gestion de la pandémie »
Dans les faits, le décret paru vendredi 15 mai prévoit que « Le montant de la prime s'élève à 1 500 euros pour les professionnels des établissements situés dans les départements les plus touchés par l'épidémie (premier groupe de départements), ceux impliqués dans un certain nombre d'établissements du reste du territoire (…) ou à 500 euros pour ceux des établissements des autres départements (second groupe de départements) » et le Tarn faisant partie du second groupe, les agents ne pourront prétendre à la prime maximale.
« Après les effets d’annonces et comme il était à prévoir la publication du texte est venue limiter de façon injuste et drastique le nombre de bénéficiaires du montant maximum ! » dénonce l’USD SAS CGT 81 dans son texte. Et le syndicat de rappeler l’engagement, la réactivité et l’adaptation de tous les personnels, la création d’unités de soins en urgence, l’accompagnement des patients jour et nuit, et surtout le risque très élevé pris par ces personnels comme partout ailleurs.
Dans ce texte, la secrétaire de l’Union Syndicale Départementale Santé et Action Sociale du TARN , Brigitte LAROCHE, explique « Cette différenciation de traitement entre régions, départements, établissements et agents est propre à ce gouvernement qui nous a déjà fait « le coup des primes » avec la prime Ile de France, la prime des urgences, la prime grand âge, et demain la prime EHPAD….
Primes qui n’ont servi qu’à amplifier les colères et à jouer la carte de la division des personnels, du clivage. A chaque fois de nombreux salariés restent sur le quai… »
Les établissements pourrait-ils revaloriser cette prime de leur propre chef ?
Décret : « Par dérogation aux dispositions de l'article 4, le chef d'établissement peut relever le montant de la prime exceptionnelle à mille cinq cents euros pour les services ou agents impliqués dans la prise en charge de patients contaminés par le virus covid-19 »C’est donc possible mais là encore seulement pour une liste d’hôpitaux définis comme étant en première ligne et désignés en annexe du décret. Aucun établissement tarnais n’en fait partie.
Des personnels moins méritants que d'autres ?
Et cela a le don d’exaspérer Patrick Estrade, secrétaire CGT du Centre Hospitalier de Lavaur :« C’est mettre un masque sur notre colère, alors qu’il a fallu une pandémie pour qu’on s’intéresse à nos revendications, cette prime inégalitaire et clivante provoque un sentiment de déception ». A Lavaur où deux services COVID positifs ont été créés, les personnels ont le sentiment d’être oubliés malgré une présence à plein temps dans ces services. D’autant que cet hôpital est organisé en direction commune avec le CHU de Toulouse qui lui, bénéficie de la dérogation pour revaloriser la prime à ses personnels, c’est donc une double incompréhension : « il y a ceux qui sont COVID et ceux qui sont moins COVID ! Qu’est ce qui permet de dire que les uns ont été moins méritant que les autres ? »
Un sentiment partagé par les soignants de son établissement. Louise et Alice sont infirmières en psychiatrie à Lavaur. Contrairement à ce qui avait été annoncé en début d’épidémie, un service COVID+ a bien été créé dans cet hôpital, en raison de l’afflux de malades.
Et elles ont été en première ligne, en contact avec des patients COVID avérés, dans leur quotidien, toute la journée, avec peu de moyen et des masques périmés de plus de dix ans.
« On ne comprend pas bien, peu importe le nombre de patients atteints, la prise de risque est la même, d’ailleurs du personnel a été touché par le virus et mis en quatorzaine. »
En colère mais déterminées, elles affirment d’une même voix : « Les valeurs d’attribution de cette prime ne sont pas objectives. Deux poids deux mesures, c’est assez injuste. »« On nous demande une distanciation sociale là où notre cœur de métier c’est la relation avec le patient. D’autant plus en psychiatrie où les règles d’hygiène sont difficiles à faire respecter»
« D’un point de vue politique y a pas mieux pour cliver les gens, mais on ne veut pas se laisser embarquer là dedans. Nous continuerons tout de même nos luttes sur les conditions salariales et de travail. Ils ne nous feront pas taire avec cette prime. »
Les élus interpellés
Le syndicat tarnais en appel donc aux responsables politiques locaux et nationaux, pour que soient reconnus les compétences et les engagements de tous les soignants « par le versement de la prime exceptionnelle de 1 500 € pour l’ensemble des personnels de la santé et de l’action sociale. »Défiscalisée, cette prime de 500€ ou 1500€ sera versée aux personnes ayant exercé leurs fonctions de manière effective sur leurs paies de mai ou juin.