Le département du Tarn, berceau de Jean Jaurès, et territoire ouvrier historiquement à gauche, a vu l'extrême-droite gagner du terrain d'année en année. Alors que la majorité présidentielle présentait ses trois députés sortants, les électeurs tarnais ont choisi d'accorder un siège à chaque bloc politique : la Nupes, LREM Ensemble et le RN.
Trois circonscriptions, trois candidats de partis différents. Hier, les électeurs du Tarn, département qui comptait trois députés de la majorité présidentielle, a fait le choix d'en écarter deux en donnant ses voix à la Nupes pour la deuxième circonscription, au Rassemblement National pour la première. Seul le député sortant Jean Terlier conserve son siège pour le parti présidentiel.
Si ce choix marque bien le recul de la majorité présidentielle, il confirme aussi une tendance tarnaise qui progresse d'année en année, d'élection en élection, qu'elles soient locales ou nationales : la montée de l'extrême-droite dans un département historiquement à gauche, où Jean Jaurès fut député.
Pour la première fois, le Tarn comptera donc un député RN en la personne de Frédéric Cabrolier, militant historique du parti d'extrême-droite dans le département. Lors du deuxième tour qui l'opposait à Gérard Poujade, un ancien du PS passé à La France insoumise et investi par la Nupes, Frédéric Cabrolier l'a emporté avec 53,09%. Muriel Roques-Etienne, députée sortante macroniste, avait été éliminée
dès le premier tour.
"En ce qui me concerne, c'est la victoire de la persévérance", a déclaré Frédéric Cabrolier, nouveau député RN de la première circonscription du Tarn. "Ma première élection remonte à 1993, dans le canton de Vaour, ça fait loin. Je n'ai connu pratiquement que des défaites mais j'ai persévéré et je suis surtout content pour nos électeurs, des électeurs patriotes. Ils voient que renouveler leur vote, ça porte ses fruits".
On va montrer dans le Tarn qu'un député RN, eh bien, ça détonne par rapport aux autres. Je serai un élu de terrain.
Frédéric Cabrolier, nouveau député RN de la première circonscription du Tarn
Frédéric Cabrolier a également rappelé qu'au premier tour, la première circonscription tarnaise comptait pas moins de neuf candidats de droite contre trois de gauche et qu'il a donc bénéficié de reports de voix de ce côté. Ce que confirme son adversaire, Gérard Poujade, ancien du PS passé à La France insoumise et investi par la Nupes. "Ce qui est grave et qui se passe partout où il y a des duels entre la Nupes et le Rassemblement national, c'est le syndrome Jean-François Copé qui se reproduit, c'est-à-dire que le centre et la droite sont en train de basculer vers l'extrême-droite. Et ça c'est extrêmement dangereux", a déploré Gérard Poujade dimanche soir.
Des voix de LREM sont allées sur des voix d'extrême-droite, des voix fachisantes et ça, c'est exactement ce qui s'est passé dans les années trente en Allemagne, c'est ce que disait Jean-François Copé à François Bayrou il y a quelques jours. Je me retrouve dans la mécanique que l'on trouve dans ces duels-là.
Gérard Poujade
Gérard Poujade n'a pas mâché ses mots à l'encontre des élus de droite et de la majorité présidentielle mais aussi socialistes dans le Tarn. Citant la maire d'Albi, Stéphanie Guiraud-Chaumeil, Muriel Roques-Etienne, la candidate LREM Ensemble battue au premier tour ou Christophe Ramon, le président du conseil départemental, le maire du Séquestre a déclaré ceci : "Maintenant, ce sont des gens d'extrême-droite, capables de laisser faire que l'extrême-droite arrive au pouvoir. C'est gravissime parce qu'avec les échéances que l'on a devant nous, je crois qu'on a des choses compliquées, sur une montagne brune, un pays brun et c'est ça qui est en train de se passer".
Le Rassemblement National était aussi présent au second de ces législatives, dans la deuxième circonscription du Tarn, dans une triangulaire avec LREM Ensemble et la Nupes mais dans cette circonscription qui englobe l'ancienne ville minière de Carmaux où Jean Jaurès fut député, Gaillac, Karen Erodi (37,5%), militante LFI, y a devancé la députée sortante macroniste Marie-Christine Verdier-Jouclas (35,05%) et le délégué départemental du RN Julien Bacou (27,45%).
"Ce n'était pas gagné", confie Karen Erodi, "parce que la députée sortante était active médiatiquement, c'était une députée emblématique donc on voit que les électeurs ont sanctionné la politique de Macron, sa politique à elle, leur politique anti-sociale, liberticide et anti-climatique". Il va falloir se mettre au travail et aller au combat, ajoute la nouvelle députée tarnaise qui se dit catastrophée par le résultat de l'élection dans la première circonscription du Tarn.
Dans la troisième circonscription, le député sortant LREM Ensemble Jean Terlier s'était qualifié in extremis pour le second tour avec seulement 14 voix d'avance sur la candidate RN Virginie Callejon. A l'issue de ce second tour, il a devancé Julien Lassalle, candidat issu de La France insoumise investi par la Nupes, avec 53,71%. Le seul député sortant donc à avoir sauvé son siège dans la majorité présidentielle. On dit souvent que le Tarn est représentatif du territoire français en matière d'élection : il le confirme en donnant un siège à chacun des principaux camps politiques actuels.