C’est un coûteux lifting pour une quasi centenaire : 3 millions d’euros investis dans les modifications et le nettoyage de l'usine hydro-électrique d'Ambialet.
Les Tarnais connaissent bien ce barrage de 5 mètres de haut et empruntent même – à pied ou en voiture - sa digue submersible en béton lors de leurs promenades estivales. Ils ignorent sans doute que cet ouvrage de 126 mètres dissimule deux clapets de 31 mètres permettant d’évacuer les crues et surtout deux "groupes bulbes" permettant de produire l’énergie en dérivant le cours du bras supérieur de la rivière Tarn vers son bras inférieur.
Le chantier devrait durer deux ans jusqu'à la fin 2017. Le "dégrilleur", son système de nettoyage, les vannes d’admission sont changés. Les différentes parties des turbines doivent également être - pour la première fois - extraites de leurs logements pour un grand nettoyage et une remise en état. Un pont roulant flambant neuf a donc été installé dans le vieux bâtiment.
En révisant et en modernisant les deux groupes installés en parallèle au plus profond du bâtiment, la centrale d’Ambialet produira l’équivalent de la consommation électrique de 8000 foyers. Chef de groupe pour Electricité de France, Pierre Astorg gère ce site et plus largement un parc de neuf centrales sur le Tarn. Pour lui, cet investissement prouve que l’hydroélectricité est plus que jamais une énergie d’avenir.
Un site historiquement dédié à la production d’énergie
A Ambialet, le Tarn fait une longue boucle de 3 kilomètres autour d'une aiguille schisteuse. Cet isthme est le plus étroit d’Europe, puisque - à hauteur de la centrale hydroélectrique - la presqu'île d’Ambialet ne fait qu'une trentaine de mètres de large. Cette particularité a été très tôt utilisée pour produire de l’énergie : en 1291, les moines du Prieuré de l’Oder élèvent une digue pour alimenter un moulin. Durant les siècles suivants une filature, une scierie, une huilerie et une manufacture d’armes utiliseront la puissance de l’eau.Au début du XXème siècle, la vallée du Tarn attire les investisseurs. Un pont et des tunnels sont construits à Ambialet en même temps qu’avance le chantier très compliqué d'une voie ferrée devant relier Albi à St Affrique en Aveyron (elle ne sera jamais réalisée, en 1930, le chantier sera abandonné alors qu’il ne restait plus qu’à poser les rails).
Les industriels de l’acier misent sur le dynamisme de la vallée du Tarn. Sur le site du Saut du Tarn, à Saint-Juéry, aux portes d’Albi, une centrale hydro électrique est construite et les productions se multiplient : aciéries et manufactures d’outils emploient jusqu’à 3800 ouvriers. Il faut de plus en plus de métal et d’énergie : quatre autres centrales hydroélectriques sont commandées à la fin de la première guerre mondiale.
Style bavarois
La petite chute d’eau d’Ambialet se trouve à 17 kilomètres du Saut du Tarn ; c’est un peu éloigné mais la promesse d’une importante production emporte l’adhésion des industriels : la cinquième centrale des usines du Saut du Tarn (Le sigle ST est encore bien visible à tous les niveaux du bâtiment et sur ses grilles) est construite sur ce site unique.Pour son aspect extérieur, les concepteurs veulent symboliser la prospérité et la puissance industrielle : ils s’inspirent de l’architecture bavaroise, à la mode depuis sa présentation à l’exposition universelle de Paris en 1900. Les tours rondes, les grilles massives et rivetées, les larges ouvertures, les toits recouverts de petites ardoises tranchent avec le modeste habitat rural du village d’Ambialet. Les travaux durent trois ans et les turbines sont mises en service en 1923. Depuis, elles n’ont été modifiées qu’en 1965.