Un Français, fils d'un Républicain espagnol exilé, a demandé le retrait de la Légion d'honneur que Paris avait accordée en 1928 au dictateur Franco (1939-75), une procédure, qui semble cependant avoir peu de chance d'aboutir.
Dans un courrier adressé à la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur, dont l'AFP a obtenu copie mercredi, Jean Ocana demande de retirer à Francisco Franco les titres d'officier, délivré en 1928, puis de Commandeur, en 1930, qui lui avaient été décernés pour avoir créé la première école militaire espagnole, à Saragosse.
Durant la guerre civile espagnole (1936-39) puis la dictature, "des centaines de milliers d'opposants (...) ont été ensevelis dans des fosses communes", écrit Jean Ocana dont la démarche est soutenue par Caminar, coordination nationale qui réunit 13 associations mémorielles françaises des descendants et amis de l'Espagne républicaine.
Jean Ocana, ancien consul honoraire d'Espagne qui vit à Mazamet (Tarn), cite également dans son courrier du 6 avril la déportation vers les camps nazis. Le père de Jean Ocana a survécu à celui de Mauthausen, en Autriche, à la différence de plus de 7.000 autres Républicains.
L'intérêt de la déchéance "est symbolique mais elle aurait aussi une valeur de reconnaissance historique", a expliqué Jean Ocana, 76 ans.
Cette démarche fait suite aux initiatives similaires lancées en Espagne et qui visent à retirer à Franco des distinctions, parallèlement à la suppression de références au franquisme, notamment des noms de rues.
Selon le règlement de la Chancellerie, "tout acte contraire à l'honneur est susceptible" d'entraîner une procédure disciplinaire. Seules une dizaine sont étudiées chaque année en vertu d'un processus très long.
La Légion n'est automatiquement retirée qu'aux personnes coupables de "crime" ou condamnées à un an ou plus de prison ferme.
Mais "on ne peut pas retirer la Légion à un mort", a réagi la Chancellerie. "Toutes les procédures disciplinaires sont contradictoires. La personne incriminée est amenée à se défendre. On ne peut pas demander à un mort de se défendre", précise l'Ordre.
Parmi les plus célèbres "exclus", figure Maurice Papon, dont la Légion lui avait été retirée après sa condamnation à 10 ans de réclusion en 1998 pour complicité de crime contre l'humanité pour son rôle dans la déportation de juifs. Il avait été condamné en 2004 à 2.500 euros d'amende pour avoir malgré tout continué à porter la décoration.
Midi-Pyrénées a accueilli de très nombreux réfugiés espagnols, au cours du XXème siècle : les immigrés "économiques" à partir des années 20, puis les révoltés des Asturies en 1934 (dont certains trouveront refuge dans les mines de charbon tarnaises) et enfin les réfugiés politiques de la guerre civile, à partir de 1936. La région entretient un lien très fort avec cette importante communauté.