Un plan de sauvetage pour l'apiculture française
Au creux de l'hiver qui ne laisse pas plus de place aux insectes qu'aux fleurs des champs, les apiculteurs font leurs comptes.
Depuis le début des années 2000, les populations d'abeilles diminuent de manière massive et anormale partout sur la planète. Les pertes annuelles atteignent jusqu'à 30% du cheptel. Si les causes de la surmortalité des abeilles sont diverses, elles pourraient bien, malheureusement, s'additionner.
Des causes multiples
Aux causes climatiques quasiment incontournables, s'ajoutent des causes virales et parasitaires comme le Varroa, et la toxicité des pesticides est toujours évoquée. La guerre des apiculteurs contre ces produits à base de néonicotinoïdes défraie la chronique depuis de nombreuses années. Des scientifiques de l'INRA sont allés jusqu'à tracer des abeilles à l'aide de puces RFID collées sur leur abdomen, démontrant ainsi la désorientation des butineuses confrontées à ces insecticides neurotoxiques. De plus, un nouvel arrivant sème la panique aux abords des ruches depuis 2004: le frelon asiatique. Celui-ci s'étend peu à peu sur tout le territoire.
Que faire pour protéger les abeilles et assurer leur développement ?
L'abeille, sentinelle de l'environnement
"Il ne doit pas y avoir en France de territoire où les abeilles n’auraient pas le droit d’exister. Le service de pollinisation qu’elles assurent est un bien commun entre les apiculteurs, les agriculteurs et la société tout entière."C'est avec ce préambule comme une prise de conscience que le ministère de l'agriculture introduit son Plan de Développement Durable de l'Apiculture le PDDA .
Le PDDA, Plan de Développement Durable de l'Apiculture
L'apiculture était une oubliée des mesures agricoles européennes, et ce projet du ministère devrait changer la donne.Dans son PDDA, Stéphane Le Foll ministre de l'agriculture a dévoilé début février les mesures que le gouvernement compte mettre en place, grâce à un budget de 40 millions d'Euros sur trois ans.
Un tel projet était attendu par les syndicats d'apiculteurs, mais l'UNAF, Union Nationale de l'Apiculture Française ne cache pas une certaine déception...
Pas de nouvelles interdictions de pesticides à l'horizon
Dans sa lettre ouverte au ministre de l'agriculture, l'UNAF déplore l'attentisme du gouvernement en matière d'interdiction de produits phytosanitaires dangereux pour les abeilles. Son président Olivier Belval cite en exemple l'Italie, qui a "interdit toutes les molécules insecticides néonicotinoïdes pour les maïs et a offert aux apiculteurs italiens, en terre de grandes cultures, un recul fulgurant des intoxications d'abeilles..."et ce "sans différence de rendement des cultures..."
Un cortège de décisions pour un encadrement structuré de la filière
Entre autres points, il s'agit de:- Placer la thématique apicole dans l’enseignement agricole et vétérinaire, avec des spécialités "apiculture" dans les Bacs pro et les BTS.
- Faciliter les installations de jeunes apiculteurs, en rédigeant un guide des bonnes pratiques apicoles.
- Afin de diminuer la mortalité des cheptels, encourager les agriculteurs à moins traiter leurs cultures, et pas à n'importe quel moment: aux heures d'affluence des abeilles, aucun produit chimique ne devrait être épandu.
- Multiplier là où c'est possible les plantations de fleurs mellifères, sur des terres en jachères à la campagne, comme en ville dans des espaces inoccupés. Les surfaces dites «d’intérêt écologique » doivent pouvoir bénéficier aux abeilles.
- Devenir autonomes en production de miel: sur 40 000 tonnes commercialisées en France chaque année, seulement 18 500 tonnes sont issues de la production française.
« Un beau plan pour les abeilles, elles n'ont plus qu'à voler et à produire du miel !»
Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, en visite sur une exploitation apicole sarthoise.
(Images: ministère de l'agriculture, 8 février 2013)
Quels dégâts cette année?
À quelques semaines du printemps alors que les températures sont encore très basses, pour les apiculteurs c'est l'appréhension. Quels seront les dégâts cette année? Il va bien falloir ouvrir les ruches, dès que la météo le permettra. Pour quelles constatations?
Pour les moins chanceux ce sera peut-être la fin de leur exploitation. On ne peut alors qu'espérer aux prochains rayons de soleil que les apiculteurs français, à l'examen de leur cheptel, pourront constater avec soulagement une vibrante activité, comme la promesse d'une récolte abondante.