"Soit vous prenez cette offre, soit on va au tribunal." Des propositions de relogement d'un bailleur social inacceptables pour les habitants d'une cité bientôt détruite

La cité du Pavé Blanc, qui abrite 100% de logements sociaux, laissera bientôt la place à un quartier flambant neuf composé de 70% de logements privés. Si la plupart des habitants ont déjà été relogés, une quarantaine de familles continuent d'occuper les lieux, faute de mieux. Ils dénoncent les méthodes de leur bailleur.

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"C'est de la tristesse, de la solitude et de l'injustice." Cette ancienne locataire de la cité du Pavé Blanc, qui souhaite rester anonyme, garde un souvenir amer de ces derniers mois passés dans ce quartier voué à disparaître dans les prochains mois. Elle reproche à son bailleur, le groupe 3F, d'avoir mené des "actes de dégradation et de vandalisme volontaires pour exercer une pression".

"Ils ont laissé dépérir l'immeuble. On nous a coupé le chauffage, les câbles qui permettaient l'accès à Internet ont été sectionnés. Des personnes sans domicile venaient dans notre immeuble, on retrouvait de l'urine et des excréments dans les parties communes et c'était à nous de nettoyer", raconte la mère de famille. "Notre eau était marron, les poubelles n'étaient plus vidées. Les rats et les cafards pullulaient. On a sollicité les services d'hygiène de la mairie mais personne n'est venu."

"On dirait qu'on est oubliés"

Si cette Clamartoise a fini par accepter l'une des propositions qui lui a été faite, ce n'est pas le cas d'une quarantaine de familles qui vivent encore dans la cité du Pavé Blanc. Comme Maly Diallo, habitante du quartier depuis 30 ans. 

"J'ai eu plusieurs propositions de relogement, mais aucune d'elles ne me convenait car c'était soit trop loin, soit trop petit. Mon mari est gravement malade, il a fait un AVC et donc nous avons besoin de place dans notre chambre pour installer toutes ses machines. Nous ne pouvons pas non plus quitter le quartier car il serait perdu, il a tous ses repères ici, et tout le monde le connaît", explique-t-elle.

Quand elle parle de son quotidien au Pavé Blanc, son émotion est palpable : "Nous n'avons plus de chauffage, il y a des gros problèmes d'humidité dans mon appartement. Mon mari a fait une infection pulmonaire." Elle aussi estime que tout est fait pour les mettre dehors le plus vite possible. "On dirait qu'on est oubliés. Les gardiens s'en foutent. Je n'en dors plus".

Contacté, le bailleur 3F indique que : "Il peut y avoir des dysfonctionnements, mais en aucun cas il n'y une intentionnalité de ne pas maintenir le service". Ajoutant que : "Les poubelles sont ramassées, les ascenseurs continuent de fonctionner. Dans l'un des immeubles, il continue de fonctionner alors qu'il ne reste plus qu'une locataire." Quant à la qualité de l'eau, le bailleur assure que : "lorsque le réseau d'eau est moins sollicité, l'eau peut prendre une couleur marron. Mais elle ne présente aucun risque sanitaire."

Des pressions ressenties 

Sur les 558 logements que comprend le quartier du Pavé Blanc, près de 95% des familles ont déjà été relogées. Mais là encore, les résidents dénoncent les méthodes.

"On nous fait remplir une fiche de besoin, et fonction de nos critères on nous attribue un logement", explique une ancienne habitante. "Les propositions que j'ai reçues étaient toujours hors critère. Après leur deuxième proposition, ils m'ont dit "soit vous prenez cette offre, soit on va tribunal"."

L'ex-locataire dit avoir ressenti de la pression, mais ne pas s'être laissée impressionner. "J'ai certains de mes voisins qui ont accepté la première proposition mais qui le regrette aujourd'hui. Quand les gens entendent justice ou tribunal, ils prennent peur quand bien même ils sont encore dans leurs droits", souligne-t-elle.

Plusieurs résidents et anciens habitants du quartier se sont mobilisés pour dénoncer ces méthodes samedi dernier. La conseillère municipale de l'opposition et membre de l'association Clamart Citoyenne, Agnès Hartemann, était présente pour les soutenir : "Ces personnes n'ont pas pu accepter les solutions de relogement qui leur étaient proposées car il s'agissait de logements soit plus petits, soit hors de Clamart ou soit plus chers".

Elle estime que la démolition de ces logements sociaux et la construction d'un nouveau quartier "ne feront pas la part belle au logement social". "Il fallait préserver cette cité qui venait d'être rénovée, elle pouvait être améliorée mais il ne fallait pas la démolir et chasser une partie des habitants de Clamart". 

De 100% à 30% de logements sociaux 

Car bientôt, les logements sociaux du Pavé Blanc feront place nette pour devenir le quartier Le Nôtre. Un changement de nom mais également d'identité avec un parc immobilier principalement privé, qualifié de "renaissance pour tout un quartier" par Vallée Sud Habitat. Contacté, le maire n'a pas souhaité s'exprimer sur le sujet. 

Pour le bailleur social 3F, la démolition des 558 logements du Pavé Blanc au profit d'un nouveau parc de 1000 logements, "dont 318 logements sociaux", permettra de "faire évoluer ce quartier monofonctionnel vers un quartier avec plus de mixité fonctionnelle", explique Olivier Perret, directeur des territoires franciliens de l'Immobilière 3F. 

Pour le bailleur, un accompagnement personnalisé a été réalisé auprès de chaque locataire. "Nous avons fait des propositions en fonction de souhaits exprimés. Actuellement, nous avons 523 familles relogées, 65% d'entre elles le sont à Clamart à leur demande. 14% des autres familles ont été relogées dans une autre commune des Hauts-de-Seine, également à leur demande", indique Olivier Perret. 

Quant aux locataires actuellement sans solutions de relogement, il précise que : "Nous allons continuer à leur faire des propositions dans un cadre amiable, tout en engageant des procédures contentieuses pour réussir à libérer les lieux et permettre la création de ces 318 logements sociaux neufs qui sont pour l'instant bloqués."

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