Alors que le mois de septembre est déjà bien entamé, bon nombre de bacheliers sont toujours sans affectation sur la plateforme Parcoursup. Une situation difficile à vivre et source d'incompréhension pour Sirine, une jeune bachelière, désireuse de commencer sa vie étudiante.
"Je suis juste déçue, car je suis une toute jeune bachelière et on ne me laisse pas la chance d'étudier", souffle, émue, Sirine, 19 ans. Elle fait partie des 77 000 candidats qui n'ont pas eu d'affectation sur Parcoursup lors de la phase principale d'admission cette année, selon l'Etudiant.
La phase complémentaire, qui devait permettre aux étudiants laissés-pour-compte de trouver un établissement dans l'enseignement supérieur s'est terminée ce jeudi. Mais pour Sirine, la bonne nouvelle n'est jamais arrivée. Au total, sur les 20 vœux formulés depuis l'ouverture de la plateforme, elle a été refusée ou mise en attente dans toutes les écoles ou universités demandées.
"J'ai formulé le nombre de vœux maximum dans la première phase, soit dix vœux. Mais j'ai été soit refusée, soit mise sur liste d'attente. J'ai reformulé dix autres vœux lors de la phase complémentaire, et là encore je n'ai rien eu." Une situation incompréhensible pour cette bonne élève qui a obtenu la mention assez bien au bac. "J'ai étudié, j'ai obtenu des bonnes notes, je me suis donnée à fond pour au final, n'être affectée nulle part."
Prête à tout pour ne pas quitter la région
Habitante des Hauts-de-Seine, la jeune femme a pourtant candidaté dans des établissements de son secteur. Nanterre, Paris 8, Paris Cité ou encore Assas, aucune de ces universités ne l'a acceptée. Sirine envisage désormais de partir en Belgique pour poursuivre ses études, une décision qu'elle prendra en dernier recours, et à contrecœur.
"Lors de la phase complémentaire, j'ai élargi mes choix en demandant des licences de langues, de lettres et même de philosophie pour ne pas avoir à partir loin. Je voudrais vraiment rester près de chez moi", confie-t-elle, inquiète. "J'ai des camarades qui voulaient faire du droit, ils se retrouvent à faire de la physique chimie juste pour pouvoir rester en Île-de-France."
Une situation aberrante mais prévisible pour Ephram Beloeil, président du syndicat La Voix Lycéenne. "C'est une situation à laquelle on se prépare depuis longtemps. Chaque année, des milliers de lycéens se retrouvent sans affectation ou mal orientés", dénonce-t-il.
"Repenser structurellement le système"
Avec la Voix Lycéenne, il dénonce le fonctionnement de la plateforme Parcoursup et l'opacité des critères de sélection de l'algorithme. "C'est une machine à anxiosité pour les élèves", note Ephram Beloeil, qui intégrera lui-même une classe préparatoire à la rentrée, après plusieurs semaines d'attente. "J'ai eu de la chance comparé à d'autres, car j'ai su que j'étais accepté à la mi-juillet, mais j'ai passé un quart de mes vacances à regarder Parcoursup tous les jours", raconte-t-il.
Pour le premier syndicat lycéen, la suppression de cette plateforme, mise en place en 2018, est l'une des mesures importantes à prendre, bien qu'encore insuffisante. "Il va falloir repenser structurellement le système. Car il y a de plus en plus d'étudiants, et de moins en moins de places", argue Ephram Beloeil. "Il faut cesser avec le processus de mise en compétition des élèves. Aujourd'hui, certaines filières sont devenues très sélectives, comme en première année de médecine, où seuls les élèves excellents sont admis. Les bons voire très bons élèves ne sont pas pris, alors que nous manquons de médecins", déplore-t-il.
Au pied du mur, bon nombre des oubliés de Parcoursup font le choix de prendre une année sabbatique, de mettre en pause leur étude pour trouver un travail étudiant, ou encore de partir à l'étranger. Certains retentent leur chance l'année suivante, quand d'autres quittent définitivement les bancs de l'école.
Autant de situations qui accroissent les inégalités selon le président de la Voix Lycéenne : "Dans le cas des candidats qui se voient acceptés dans des établissements loin de chez eux, ils n'ont pas nécessairement les moyens ou des parents qui peuvent subvenir à leurs besoins. Les bourses sont très souvent insuffisantes, ces jeunes doivent travailler en parallèle de leur étude, quitte à redoubler par manque de temps pour travailler leur cours. C'est un cercle vicieux pour les étudiants précaires, et qui commencent par Parcoursup".