Incendies volontaires, pillages... Les émeutes de 2023 ont touché toute la France mais la région francilienne a été particulièrement sinistrée. C'est l'un des bilans d'un rapport que vient d'établir la commission des lois du Sénat.
1 milliard. À l'échelle nationale, c’est l'estimation "colossale", selon un rapport sénatorial, des dégâts provoqués par les émeutes de l'été 2023, après la mort de Nahel Mezrouk, tué par un policier lors d'un contrôle routier en juin 2023 à Nanterre dans les Hauts-de-Seine. Les rapporteurs de cette commission d'enquête dressent le bilan du déferlement de violences survenu entre le 27 juin et le 7 juillet 2023. Un épisode qualifié par le rapport "d'inédit par son ampleur et son intensité".
Les émeutes de l'été 2023 ont fait plus deux morts à Cayenne et à Marseille, au moins une quarantaine de blessés graves et plus d’un millier de personnes blessées "dans une fourchette basse", évalue ce rapport. Sur le plan matériel, l’Île-de-France a été sans conteste"la région la plus touchée par ces émeutes". Soit, "42,5 % du coût total" des dégâts.
En matière de sinistres déclarés, la région francilienne, Paris inclus, est surreprésentée (38,9% des sinistres) selon l'analyse effectuée par France Assureurs. À noter que tous les sinistres ne sont pas nécessairement déclarés ou acceptés par les assureurs. Le coût supporté par les assurances ne prend pas en compte tous les dommages.
Principales cibles des émeutiers, des bâtiments des forces de l’ordre comme par exemple, le commissariat de police à Elancourt, des mairies comme à Persan dans le Val d'Oise fin juin, ou des établissements scolaires comme l'école maternelle de Dammaries-lès-lys en Seine-Marne.
À l'échelle nationale, le rapport recense "273 bâtiments des forces de l’ordre, 105 mairies et 243 écoles incendies ou dégradés", mais aussi plus de 12 000 véhicules incendiés et notamment ceux appartenant aux forces de l'ordre. Le rapport relève également "le préjudice financier et moral indéniable" pour les commerces. Les surfaces les plus touchées sont des débits de tabac, des agences bancaires, des commerces alimentaires et d'habillement mais aussi des opticiens. Autour de 1 500 commerces "ont été vandalisés ou pillés", estiment les rapporteurs.
Une expansion "fulgurante" des violences
Les auteurs du rapport distinguent nettement deux phases pendant les émeutes de l'été 2023. Une phase "émotionnelle" des émeutes, suivi d'une "phase insurrectionnelle".
Du 27 juin - jour de la mort de Nahel Mezrouk - au 30 juin 2023, l'Île-de-France connaît une première flambée de violence. Les départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne sont d'abord particulièrement affectés. Les communes des Hauts-de-Seine sont "surreprésentées, avant que le mouvement ne se diffuse plus largement à l'ensemble des départements d'Île-de-France, dès la nuit du 28 au 29 juin 2023".
Une deuxième phase de violence "fulgurante"et "insurrectionnelle" se répand à l'ensemble du territoire national du 30 juin et du 1erjuillet 2023.
672 communes réparties sur 95 départements sur la période du 27 juin au 7 juillet 2023 sont touchées par les émeutes. Fait notable : les violences ne se déroulent pas seulement dans les grandes métropoles, dans les quartiers considérés habituellement comme sensibles mais gagnent "les villes moyennes et rurales".
Des propositions pour l'avenir
Le rapport souligne la jeunesse des émeutiers. "Selon le ministère de l’Intérieur, un tiers des 3 500 personnes interpellées au 4 juillet 2023 sont des mineurs, la moyenne d’âge globale se situant entre 17 et 18 ans", et "60 % des personnes interpellées sont des primo-délinquants", peut-on lire. Le rapport évoque "une colère, violemment exprimée à l’encontre des institutions et des représentants de l’autorité publique" mais aussi l'opportunisme des auteurs "encouragés par un effet de groupe et la recherche d'adrénaline", motivés notamment par le pillage.
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La mission parlementaire estime toutefois que les recherches sur l'établissement d'un profil type de l'émeutier sont encore inachevées. La commission émet 25 propositions "pour tirer les leçons d’une réponse opérationnelle des pouvoirs publics qui a été effective mais, qui s’est révélée en partie inadaptée" et notamment des "réponses de long terme dans d’autres champs de l’action publique".