Exposition dans une galerie parisienne : une BD vers les terres intranquilles de la planète Mars

2132, une date plus lointaine que la plupart des récits martiens. Les planches au style âpre de la bd On Mars sont à voir à Paris. La planète rouge y est présentée comme un nouvel espoir pour l'humanité, après l'épuisement des ressources terrestres. Une résonance aux choix politiques actuels.

2021, une année marquée par les conséquences politiques, économiques et sociales de la pandémie du codiv-19. Une année placée aussi sous le signe de la poursuite des projets de conquête spatiale. La planète Mars est devenue la destination prisée des utopistes contemporains. Leur rêve n’est toutefois plus de partir à la rencontre d’autres habitants hypothétiques de l’univers ; la croyance en l’existence d’extraterrestres a en effet laissé place ces dernières décennies à un désir de transporter l’humanité vers un lieu de vie alternatif - un projet présenté comme la seule réponse possible à la survie de l’espèce humaine, depuis que les données scientifiques montrent sans ambiguïté que la planète Terre n’est plus en capacité d’absorber les rêves d’expansions infinies issus des courants de pensée du capitalisme et du libéralisme.

Les auteurs de la bande dessinée On Mars, Sylvain Runberg et Grun, s’emparent de ces projets d’apparence philanthropique pour interroger leurs fondements cachés dans un album de science-fiction en trois tomes. Le scénario que Sylvain Runberg a imaginé, mis en dessin par Grun, invite le lecteur à mettre en perspective cet imaginaire d’un futur âge d’or de l’humanité sur Mars avec la réalité historique des expériences passées de conquêtes et de colonisations sur Terre. Le détour par l’Histoire fait surgir quelques questions fondamentales quand on évoque une possible colonisation de Mars :  Tous les êtres humains émigreront-ils sur cette planète ou bien seulement une partie d’entre eux ? Quels seront alors les critères de sélection ? La société qu’ils formeront sera-t-elle fondée sur un principe d’égalité ou bien reproduira-t-elle des hiérarchies discriminantes ? Qui participera à la construction et à l’aménagement de territoires adaptés à la physiologie de l’être humain ? Cette participation sera-t-elle libre ou bien imposée ? Sylvain Runberg apporte des réponses bien éloignées de tout optimisme béat, notamment dans le tome 3 qui vient admirablement clore cette fresque d’anticipation politique.

Tout ne se passe pas en effet comme prévu au fil de trois tomes de ce récit de science-fiction aux dessins très réalistes signés Grun. Avec leurs couleurs aux teintes ocre-poussière immédiatement reconnaissables, près de soixante-dix planches, couvertures et dessins originaux de la série, dont une dizaine d'illustrations inédites spécialement réalisées pour l'événement, sont à découvrir jusqu'au 23 juillet dans la galerie spécialisée en bandes dessinées de Daniel Maghen, qui est également l'éditeur de cette trilogie.

Dans une interview à BD-Box, le dessinateur précise son travail :

Graphiquement, on repart à zéro. J’ai joué sur l’idée, promesse faite aux détenus, de la construction d’un nouvel Eden.

Grun, dessinateur

"On sait maintenant qu’il y a de l’eau dans le sous-sol de Mars. J’ai dessiné d’immenses baobabs, des réservoirs d’eau, qui vont participer au nouvel écosystème que l’homme tente de mettre en place. Il y aussi l’omniprésence des drones. La surveillance et la sécurité de la colonie pénitentiaire sont assurées par ces engins. La technologie, la flore, la faune, les visages…"

Qui dit colonies, dit constructions.  Et forcément, il faut financer les ambitions des Terriens. Mais engager une main d'oeuvre de volontaires ferait exploser les budgets envisagés. Les gouvernements ont donc imaginé d'exploiter une main-d'oeuvre de prisonniers pour construire les infrastructures de Mars. Un système qui a fait ses preuves sur Terre en d'autres temps, comme en Australie.

De son coté, le scénariste Sylvain Runberg confie qu'il s'est inspiré de "ce qui a été fait jadis avec le bagne de Cayenne en Guyane.

Nous nous sommes aussi inspirés de la politique sécuritaire qui prédomine actuellement.

Sylvain Runberg, scénariste

"Il y a de plus en plus de monde dans nos prisons. Les peines sont de plus en plus longues. Que ferons-nous de tous ces prisonniers ? La colonisation, présentée comme un nouveau départ, une nouvelle chance, pourrait apparaître comme la solution. Et un moyen utile de payer sa dette envers la société." 

Dans leurs albums, être condamné à la prison en l'an 2132, devient donc désormais un aller simple assuré dans les camps de travail de Mars. Sans aucun espoir de retour donc.

L'oginalité du scénario tient aussi par le choix du personnage principal : une femme, Jasmine, ancienne policière condamnée à l’exil suite à une bavure. L'univers carcéral qu'elle découvre est particulièrement violent. "Mais elle a de la ressource. Elle va découvrir sur la planète rouge, une forme de résistance. Et quand ils ne résistent pas, ils suivent un gourou. Les humains ont beau avoir quitté la Terre... ils n'en restent pas moins hommes", comme cela est soligné dans Bulles de BD sur France Inter.

Ce récit d'anticipation ne manque pas d'entrer en résonance avec notre époque et les rêves de colonisation de la planète rouge. A lire sans hésiter donc !

Pour lire un extrait : Sylvain Runberg et Grun, On Mars : Ceux qui restent (tome 3) - Editions Daniel Maghen

 

L'exposition des planches d'On Mars

Décors, costumes, robots, technologies... L'esposition dévoile près de soixante-dix planches, couvertures et dessins originaux de la série, dont une dizaine d'illustrations inédites spécialement réalisées pour l'événement.Galerie Daniel Maghen
36 rue du Louvre Paris 1er
Du Mardi au Samedi de 10h30 à 19h00

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