Grâce au confinement, bientôt de nouvelles espèces d’oiseaux à Paris ?

Avec le confinement contre le coronavirus, synonyme d’une chute de la pollution sonore, on entend beaucoup plus le chant des oiseaux en région parisienne. L’occasion de compter les espèces à sa fenêtre et même, qui sait, d’en découvrir de nouvelles.

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Depuis le début du confinement contre la propagation du Covid-19, le vacarme parisien provoqué par le moteur des voitures et les machines de chantier semble (temporairement) en voie d’extinction. La pollution sonore est en effet en chute libre depuis la semaine dernière d’après Bruitparif, l'observatoire du bruit en Île-de-France.

"Le niveau sonore décroit sur tout la région depuis le confinement, explique Fanny Mietlicki, la directrice de l’association, qui base son réseau de surveillance sur un total de 150 stations de mesure, et dont les résultats sont notamment résumés via des cartes. En moyenne, on note une baisse de sept décibels sur une journée. Le bruit a été environ été divisé par sept, et c’est encore plus impressionnant la nuit, avec une baisse de neuf décibels, ce qui représente un niveau sonore presque divisé par 10. Dans certains quartiers animés, vers 2 heures du matin, on perd même 15 décibels. Et la forte baisse du trafic routier, autour de -80%, se confirme aussi au niveau sonore, avec nos observations."Arrêt des chantiers, circulation, activités nocturnes… Ce répit pour nos tympans est venu progressivement, précise Fanny Mietlicki : "Mardi dernier, au premier jour du confinement, il y avait encore du trafic à Paris, les gens se sont confinés petit à petit, ça se ressent. L’évolution varie aussi selon les stations de mesure. Pour ce qui est du bruit autour des aéroports, c’est contrasté. A Roissy par exemple, on note une nette diminution sur le doublet Sud, mais ce n’est pas le cas sur le doublet Nord avec le report des vols."

"On entend à nouveau les oiseaux à Paris"

Si la capitale – densément peuplée – et sa banlieue sont d’ordinaire bruyantes, "le paysage sonore a beaucoup changé" selon la directrice de Bruitparif : "Les bruits mécaniques s’effacent et le naturel reprend le dessus. On entend à nouveau les oiseaux à Paris."

Du côté de la Ligue pour la protection des oiseaux, c’est surtout l’occasion de sensibiliser à la biodiversité : l’association de protection de l’environnement a même lancé un défi, "Confinés mais aux aguets !". La LPO, qui propose depuis plusieurs années aux citoyens de l'aider à recenser les espèces, appelle ainsi les volontaires à compter pendant 10 minutes par jour les oiseaux depuis leur jardin, leur balcon ou leur fenêtre, avant d’enregistrer les données sur le site de l'observatoire dédié. A noter que participer ne nécessite pas de connaissances ou de compétences particulières. "Les gens sont très réceptifs et intéressés, c’est frappant, réagit Fréderic Malher, délégué régional à la LPO Île-de-France. La capacité du portail des saisies a explosé ces derniers jours. On n’avait pas prévu une aussi grosse fréquentation, et on peut espérer que cela va perdurer." Cet ornithologue, qui habite dans le 19e arrondissement de la capitale, explique qu’environ 60 espèces d’oiseaux nichent et se reproduisent à Paris. L’association propose même une sélection de 86 chants d’oiseaux qu’on peut rencontrer dans la région, via une sonothèque.

Merle, mésange charbonnière, troglodyte… Une soixantaine d’espèces à Paris

Si vous habitez dans la capitale, vous devriez donc avoir l’embarras du choix selon l’emplacement du logement où vous restez confinés, détaille le spécialiste : "On peut d’abord écouter des merles qui sifflent. On les remarque bien la nuit, certains Parisiens se plaignaient même dernièrement d’être réveillés à 4 heures du matin. C’est le chant le plus mélodieux, avec un beau son fluté et grave. Parmi les oiseaux communs, il y a aussi la mésange charbonnière, qui monte facilement dans les étages si elle trouve à manger sur un balcon. La mésange bleue, elle, a un chant plus aigu. On trouve aussi le troglodyte près des buissons : une petite boule de plumes d’à peine 10 grammes, avec un chant extrêmement puissant par rapport à sa taille."

"En ville, on peut également observer le rougequeue noir, avec un chant un peu aigrelet qui se termine comme par un crissement de papier de verre, poursuit Fréderic Malher. A part le pigeon domestique, c’est l’occasion d’écouter la tourterelle turque, un peu plus en banlieue, avec un chant assez monotone. Il y a aussi le pigeon ramier, ou palombe. Les migrateurs comme l’hirondelle ne vont aussi pas tarder à arriver, dans les semaines qui viennent." Reste maintenant à savoir si de nouvelles espèces vont s’installer à Paris, profitant du calme. Certes, dans la capitale, le nombre d’espèces ne baisse pas, explique l’ornithologue : "Ça peut sembler contre-intuitif mais depuis la fin du 19e siècle, le nombre d’espèces a nettement augmenté, car nombre d’entre elles se sont adaptées à la vile. Le faucon pèlerin a par exemple fait son retour en ville il y a quelques années, du côté de Beaugrenelle. Et pour ce qui est du nombre total d’individus recensés, le nombre dépend en fait essentiellement de quelques espèces comme le moineau, dont la population se casse la figure : trois quarts d’entre eux ont disparu en 15 ans à Paris. Mais les oiseaux des parcs et des jardins, en général, se portent bien."

Certains oiseaux migrateurs pourraient décider de "rester sur place"

D’après Fréderic Malher, le silence apporté par le confinement pourrait faciliter l’implantation d’espèces : "Avec la fermeture des parcs, les oiseaux ne sont plus dérangés par les chiens et les humains par exemple, ce qui peut favoriser la reproduction. Et avec la période de migration, certains oiseaux pourraient aussi décider de se poser en ville et rester sur place. Il y a un phénomène de hasard, certaines espèces pourraient résister au retour du bruit. Tout ceci est plausible mais reste complètement hypothétique, pour être clair." Une chose est sûre : le retour du tumulte dans les rues de la capitale continuera à perturber la communication entre oiseaux. "Le chant a deux fonctions, précise le délégué régional à la LPO Île-de-France. Il y a d’un côté la défense du territoire, et de l’autre le rapprochement des sexes. Plusieurs espèces trouvent ceci dit parfois des échappatoires face au bruit ambiant des villes : le merle et le rouge-gorge peuvent décaler l’horaire du chant la nuit, d’autres espèces comme le rossignol, qu’on trouve à Berlin par exemple, peuvent chanter plus fort, et enfin certaines comme la mésange charbonnière chantent plus aigu."

Fanny Mietlicki de Bruitparif, elle, espère en tout cas que les habitants "se rendront compte de l’importance de préserver son environnement sonore" : "Les Parisiens seront peut-être davantage attachés au calme".
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