Incendie de Notre-Dame : une juge désignée pour enquêter sur la pollution au plomb

Alors qu'Emmanuel Macron visite ce vendredi la cathédrale, une juge d'instruction enquête sur une possible mise en danger d'autrui, suite à une plainte accusant les autorités de n'avoir pas pris toutes les précautions pour éviter des contaminations il y a quatre ans.

Des flammes gigantesques au-dessus de Notre-Dame, un immense panache de fumée jaune s’échappant de la cathédrale, et la crainte d’une intoxication au plomb pour les riverains… Suite à une première plainte à l'été 2021, l'association Henri Pézerat, l'Union départementale CGT-Paris et deux parents d'élèves ont obtenu, via une plainte avec constitution de partie civile déposée en juin 2022, la désignation d'une juge d'instruction parisien pour enquêter sur la pollution au plomb après l’incendie des 15 et 16 avril 2019. Une information confirmée auprès de l’AFP ce mercredi, de source judiciaire.

Dans le brasier qui a ravagé le chef-d'œuvre de l'architecture gothique, 400 tonnes de plomb du toit et de la flèche de Notre-Dame sont parties en fumée, soit "près de quatre fois les émissions annuelles de plomb dans l'atmosphère, dans la France entière", notent les plaignants.

Si le risque lié à une pollution de l'air a été assez vite écarté, des riverains et des associations ont pointé du doigt la retombée au sol de ce métal lourd toxique, qui peut être rapporté chez soi sous ses semelles et être ingéré par les enfants. "Il n'existe pas de concentration dans le sang qui soit sans danger", avertit d'ailleurs l'Organisation mondiale de la santé (OMS). 

"Aucun risque pour la santé" d'après la mairie de Paris

12 jours après l'incendie, la préfecture de police avait d’ailleurs recommandé aux riverains de nettoyer leurs habitations. La PP avait également interdit temporairement au public certaines zones, notamment des jardins aux abords de la cathédrale présentant des traces de plomb. A l'été 2019, le parvis avait été fermé et le chantier suspendu plusieurs semaines, après différentes alertes sur les niveaux de plomb mesurés. Et à la réouverture du chantier, de nouvelles mesures de protection avaient été prises pour les travailleurs.

Au même moment, un "nettoyage approfondi", "par précaution", avait été lancé dans certaines écoles à proximité de la cathédrale. Des mesures avaient ensuite provoqué un report de quelques jours de la rentrée dans cinq écoles privées. 

De son côté, la mairie de Paris a assuré qu'il n'y avait "aucun risque pour la santé" des enfants, sur la base de prélèvements réalisés un mois après l'incendie - une interprétation des résultats contestée par des associations de riverains. En juillet 2021, l'agence gouvernementale Santé publique France a, elle, indiqué que l'incendie n'avait pas causé d'augmentation "significative" de la concentration de plomb dans le sang des enfants riverains.

"Aucune précaution particulière (...) pendant plus de trois mois après l'incendie" selon les plaignants

Mais d’après les plaignants, "en dépit de l'ampleur de l'incendie et de la connaissance des risques de pollution et de contamination (...), aucune précaution particulière n'a été prise par les autorités concernées pendant plus de trois mois après l'incendie", mettant en danger les "enfants (dans les crèches et écoles), les riverains et les travailleurs (du quartier et de la cathédrale)".

Selon eux, l'Agence régionale de santé (ARS), la préfecture de police, la mairie de Paris ou encore le ministère de la Culture auraient dû prendre les mesures les plus drastiques juste après l’incendie. Les plaignants s'inquiètent par ailleurs de la dissémination accrue du plomb imputée au chantier titanesque lancé juste après l'incendie, ainsi que du manque de mesures de protection suffisantes pour les personnels intervenant sur les travaux.

"Nous demandons que des investigations soient menées rapidement afin que les responsabilités soient dégagées concernant la contamination d'enfants scolarisés ou vivant à proximité de Notre-Dame et concernant l'exposition massive des travailleurs présents sur le chantier", a réagi l'avocat des plaignants, Me François Lafforgue, "satisfait" de l'ouverture d'une information judiciaire.

La mairie de Paris "mettra à disposition de la justice tous les éléments matériels nécessaires"

De son côté, la mairie de Paris a réagi en indiquant "prendre acte de cette désignation". "Cette enquête participera à apporter toutes les réponses aux questions sur la gestion des conséquences sanitaires de ce drame par les différentes autorités publiques compétentes", déclare la Ville dans un communiqué.

La mairie de Paris "participera comme toujours à la manifestation de la vérité", ajoute le communiqué. La Ville affirme enfin qu’elle "mettra à disposition de la justice tous les éléments matériels nécessaires à l’enquête".

A noter qu’une autre plainte, déposée par l'association Robin des Bois, a été jugée irrecevable par la cour d'appel de Paris en décembre pour des raisons procédurales. Une information judiciaire est en outre toujours en cours pour tenter de déterminer les causes de l'incendie. La réouverture de l'édifice est, elle, prévue en 2024. 

Les plaignants demandent "la suspension du chantier en attendant les décisions judiciaires"

Dans un communiqué publié le vendredi 14 avril, l'association Henri Pézerat et l'Union départementale CGT-Paris ont exprimé leur "satisfaction" suite à l’annonce de la désignation d’une juge d’instruction et "demandent la suspension du chantier en attendant les décisions judiciaires". "Le pouvoir politique a fait le choix d’une re-constrution 'à l’identique', c’est-à-dire avec du plomb. De nombreuses voix se sont élevées pour protester contre cette décision, prise au mépris des dangers pour la santé des travailleurs et des riverains", indique le communiqué.

"C’est une caractéristique du plomb laminé, utilisé pour les toitures, que de re-larguer des poussières fines de plomb dès la pose de la toiture et au fil du temps, provoquant une pollution environnementale durable, poursuivent l’association et le syndicat. Nous demandons que le chantier soit suspendu, qu’une évaluation rigoureuse des risques de contamination au plomb issue de l’incendie soit menée sur le site et ses environs, en tenant compte des cascades de sous-traitance qui font obstacle à la mise en œuvre de mesures de prévention."

"Sachant que d’autres matériaux de couverture existent, nous demandons également que la décision de reconstruction avec du plomb soit remise en cause, tant qu’il en est encore temps", ajoute le communiqué.

Avec AFP.

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