INTERVIEW. Colère des agriculteurs, loi Egalim, pesticides... 3 questions à Gaspard Manesse, porte-parole de la Confédération paysanne d'Île-de-France

Gaspard Manesse est maraîcher dans les Yvelines et porte-parole de la Confédération paysanne d'Île-de-France, le troisième syndicat agricole de France. Il réagit aux annonces faites par Gabriel Attal ce mercredi pour tenter d’apaiser la colère du monde agricole à trois jours du Salon de l’agriculture.

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Les annonces du gouvernement étaient attendues. Quel est votre sentiment ? 

J'ai un sentiment de spectacle. Nous sommes dans une société de spectacle, donc lorsque nous sommes dans une crise spectaculaire le gouvernement se doit de faire des annonces spectaculaires. À voir maintenant si les récentes annonces seront suivies de faits, si elles seront appliquées et porteuses.

Ce à quoi on assiste n'arrive pas de nulle part, c'est le fruit d'une politique agricole menée depuis les années 50. Le tissu agricole a été laminé par soixante ans de libéralisme économique, de modernisation à tous crins avec la mécanisation et la chimie. Autant de technologies qui sont aujourd'hui responsables du plus grand péril que l'humanité ait connu, avec l'effondrement de la biodiversité et le dérèglement climatique. Cette industrialisation engendre énormément de dégâts sociaux et environnementaux. Ces bouleversements, les paysans les ont vécus dans leur chair.

Le Premier ministre a notamment annoncé le renforcement de la loi Egalim qui vise à garantir un meilleur revenu aux paysans. Que pensez-vous de cette loi et surtout comment faire selon vous pour améliorer ce revenu ? 

Cette loi est présentée comme étant vertueuse mais elle ne protège pas réellement le revenu des agriculteurs. Pour garantir un meilleur revenu, il y a un ensemble de mesures qui peuvent être mises en place. Notamment par l'imposition, avec la taxation des superprofits. Mais aussi faire en sorte qu'il y ait plus de transparence sur les marges que prend la grande distribution. D'ailleurs nous remarquons aujourd'hui que la crise du bio est provoquée par les profits scandaleux qui sont faits sur les productions bio, et qui devraient être encadrés. 

Il n'y a pas de transparence. Nous sommes dans un système de compétition qui entraîne forcément la misère d'une certaine partie des agriculteurs, avec des petits éleveurs qui sont en dessous des seuils de pauvreté. Il faut donc passer par des leviers fiscaux, et par des dispositifs dont l'intention serait de maintenir une population agricole autonome. Car tout a été fait pour faire disparaître les agriculteurs, c'est le plus grand plan social du vingtième siècle. 

Le Premier ministre a également annoncé un allègement des normes sur l'utilisation des pesticides avec l'abandon de l'indicateur de référence du Nodu (un outil qui permet de mesurer la réduction de l'usage des pesticides). Que pensez-vous de cela ? 

Ces annonces remettent en cause des rares avancées en matière d'écologie, avec la possibilité de recours à des néonicotinoïdes, la mise sous tutelle de l'Office français de la biodiversité ou encore les mesures de simplification pour l'usage de pesticides. Ce n'est pas sérieux. 

La Confédération paysanne demande la sortie des pesticides. L'agriculture industrielle est dommageable d'un point de vue écologique et environnemental. On prend le problème à l'envers, les agriculteurs n'épandent pas des pesticides par gaieté de cœur. Ils le font car ils sont contraints, or s'ils étaient réellement accompagnés dans une démarche de transition et qu'ils pouvaient vivre de leur agriculture en ayant des méthodes vertueuses, ils le feraient. 

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