Le parquet national antiterroriste requiert un procès devant le tribunal correctionnel de Paris, pour 13 hommes et 3 femmes. Ce groupe appelé Action des forces opérationnelles est suspecté d'avoir préparé des actions violentes visant les musulmans en France.
Ils projetaient d'empoisonner de la nourriture halal ou "tuer 200 imams radicalisés". Les membres de ce groupe clandestin appelé Action des forces opérationnelles (AFO) doivent être renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris.
Certains des membres de ce groupe sont soupçonnés d'"association de malfaiteurs terroriste". D’autres se voient reprocher "des infractions à la législation sur les armes ou les explosifs". Dans ses réquisitions, mardi 30 mai, le Pnat suggère de requalifier les faits. Ils seraient alors jugés en tant que délits, et non plus comme crimes. Ce qui fait encourir une peine moins longue pour ces 16 personnes. Le parquet a, en revanche, demandé un plaider-coupable distinct pour un 17e mis en cause.
Le Pnat justifie cette requalification par sa "politique pénale habituelle (...) lorsque les projets d'action violente ne sont pas pleinement finalisés", même s’il évoque "la gravité des projets proposés". La décision finale appartient à un juge d'instruction antiterroriste saisi du dossier. La requête du parquet national anti-terroriste (Pnat) porte sur des faits plus ou moins accomplis, entre 2017 et 2018.
Des conspirations plus ou moins abouties
Le groupe se voit reprocher d'avoir, à des degrés divers, cherché des armes, planifié d'utiliser les femmes du groupe, dissimulées sous des niqabs, pour empoisonner de la nourriture halal en supermarché avec un composant de la mort-aux-rats. Parmi les nombreuses cibles évoquées, dans des projets parfois à peine déclaratifs : "tuer 200 imams radicalisés".
Ces membres voulaient viser le rappeur Médine ou le prédicateur Tariq Ramadan. Dans un document, la cellule d'AFO en Île-de-France, particulièrement active, "évoquait clairement la prise d'assaut d'une mosquée" de Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine) dont la porte devait "exploser" et qui pouvait être encerclée de "tireurs à longue distance", détaille le ministère public.
Nombre des mis en cause, âgés de 37 à 74 ans, ont un passé militaire ou ont décrit un attrait pour l'armée. Au gré des professions actuelles ou passées déclinées par ces personnes, on retrouve un antiquaire, un téléopérateur de nuit auprès des taxis G7, un consultant en ressources humaines, un diplomate en poste à l'ambassade de France au Salvador, un restaurateur, un artisan, une comptable, un chômeur ou encore un enseignant en lycée.
Des armes à feu et des milliers de munitions avaient été retrouvées lors de perquisitions, y compris des éléments entrant dans la fabrication d'explosif de type TATP. Les membres les plus radicaux d'AFO agissaient sous pseudo: Phoenix, Attila, Flamme ou encore Richelieu pour le chef présumé du groupe, Guy S., 69 ans, retraité de la police nationale.
Un agent infiltré à l’œuvre
Les mis en cause ont "largement contesté avoir eu personnellement l'intention de mener des actions violentes", note le Pnat. Ils ont décrit leur groupe AFO comme un club de "formation au survivalisme, au plus comme une structure patriotique destinée à venir au soutien des forces de l'ordre en cas de délitement de la société".
Le parquet national antiterroriste ne l’entend pas ainsi. Il considère que ce "groupement structuré, hiérarchisé, clandestin" avait pour "finalités réelles (...) de préparer ses membres à l'affrontement avec une communauté d'origine arabo-musulmane conçue comme un ennemi mettant en jeu la survie de la culture et l'intégrité de la population française, et d'autre part de préparer des attaques de nature terroriste à l'encontre de symboles ou membres de cette population".
Le Pnat affilie ce groupe à la thèse du "grand remplacement" et le place dans la tendance accélérationniste, qui vise à "précipiter un affrontement entre communautés", en l'espèce les musulmans, "désignés comme cibles". L'enquête a pu progresser grâce à un agent infiltré qui a participé à plusieurs réunions préparatoires. Sollicités, plusieurs avocats des mis en cause n'ont pas souhaité réagir.
Augmentation des procès contre l'ultradroite
Plusieurs groupes affiliés à l'ultradroite ont été jugés récemment à Paris. Près d'une dizaine de personnes affiliées au groupe Organisation des armées sociales, dont sa principale figure Logan Nisin, ont été condamnées fin 2021 à des peines allant jusqu'à neuf ans d'emprisonnement.
Concernant les Barjols, soupçonnés d'avoir fomenté un projet d'assassinat d'Emmanuel Macron en 2018, neuf des treize prévenus ont été relaxés en février à Paris. Un procès en appel est prévu. Une instruction antiterroriste est toujours en cours concernant un autre groupe, Honneur et nation, autour du complotiste Rémy Daillet.
Plus récemment, quatre hommes appartenant à la mouvance néonazie sont sur le point de faire l’objet d’un procès. Il doit se tenir devant la cour d'assises des mineurs spéciale à Paris, en juin. Ce qui est considéré comme une première, du point de vue judiciaire.
Avec AFP