Un service surchargé, des soignants épuisés et des patients qui attendent de longues heures durant : le chef de service des urgences du centre hospitalier Delafontaine à Saint-Denis subit les conséquences d'une progressive désertification médicale et de la désorganisation des hôpitaux.
"Il y a des patients qui passent trois jours, quatre jours dans les services d'urgence mais ce n'est pas dû uniquement au manque de personnel, c'est une désorganisation des hôpitaux qui ne se sont jamais mis au service des patients qui sont arrivés aux urgences", déplore Mathias Wargon, chef du service des urgences de l'hôpital Delafontaine sur le plateau de Télématin ce mardi.
Pour l'invité du 8h15, la régulation des services d'urgence doit passer par un report "d'une partie de leur charge sur d'autres services". Selon lui, il n'y a pas des "patients des urgences" mais des "patients de l'hôpital", sans distinction, dénonçant une lutte entre les "patients programmés" et les "non programmés".
Cette surcharge est l'une des explications à la fatigue des soignants qui sont "au bord de l'épuisement", témoigne sur France 2 Mathias Wargon. "Les équipes en ont marre. Le risque, à ce moment, c'est qu'elles ne manifestent plus, elles s'en vont".
Des situations qui s'illustrent au quotidien, comme il le raconte : "Hier j'ai battu un de mes records, avec plus de 220 passages. Ce n'est pas gérable, dit Mathias Wargon. Mon service n'est pas dimensionné pour ça. C'est comme si j'avais une petite camionnette pour prendre l'équivalent d'un 30 tonnes !".
La Seine-Saint-Denis, territoire en tension
Depuis la crise Covid, le département de la Seine-Saint-Denis est entré progressivement en situation de désert médical. En décembre dernier, le sénateur de la Seine-Saint-Denis Fabien Gay interpellait dans une question écrite le ministre de la Santé en ces termes : "Alors que 62,4 % de la région Ile-de-France est classé zone d'intervention prioritaire, la catégorie la plus prononcée de déserts médicaux d'après l'agence régionale de santé (ARS), cette proportion atteint 97,8 % en Seine-Saint-Denis. Signe que le phénomène sévit particulièrement sur le département, l'ARS estime que celui-ci a perdu près de 25 % de l'offre médicale disponible en l'espace de 4 ans."
Cette inégalité d'accès aux soins a aujourd'hui des conséquences très concrètes. La Seine-Saint-Denis est le département métropolitain où la mortalité infantile est aujourd'hui la plus élevée avec 5,4 décès pour 1000 naissances, selon l'Insee.