Des élèves de 6e et de 5e au collège Victor Hugo d'Aulnay-sous-Bois, établissement classé prioritaire, n'ont pas de professeur de français depuis la rentrée. Les parents se sont rassemblés ce lundi 18 novembre devant l'établissement, pour alerter le rectorat.
Ils auront deux heures de sport en plus en tant qu'établissement classé en réseau d'éducation prioritaire (REP), mais ils sont pour l'instant sans professeur de français. Des élèves de 6e et de 5e du collège Victor Hugo à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), quartier Rose des Vents, sont inquiets.
Depuis la rentrée de septembre, ces élèves n'ont eu que peu d'heures de français, au grand dam de leurs parents. Ils affirment avoir alerté à plusieurs reprises le rectorat d'académie de Créteil (Val-de-Marne), dont dépend le collège.
Ces demandes seraient restées sans réponse, selon les parents mobilisés. D'où la poursuite de leur mobilisation, ce lundi 18 novembre au matin. Objectif : obtenir le retour des cours de français pour leurs enfants.
Une longue quête depuis septembre
"Certains élèves estiment qu'ils n'ont pas de chance. Ils veulent changer de collège, car ils estiment qu'on ne leur donne pas les moyens de réussir. C'est triste d'entendre cela, de la part d'élèves de 12 ans", relate Mme Sylla. Cette membre de l'association des parents d'élèves de la Rose des Vents (Aperdv) a sa fille scolarisée en 5e, une des classes qui est actuellement démunie de professeur de français et de latin.
"Ce professeur a été nommé, mais il a refusé l'affectation. Il devait enseigner les deux matières. Nous avons donc fait une demande pour avoir un professeur de français. On a demandé à dissocier l'enseignement du latin et du français, pour ne pas être trop en retard. La demande a été acceptée par la direction du collège, qui a transmis la demande à l'académie. Nous attendons maintenant la réponse de leur part", complète celle qui siège aussi comme suppléante au conseil d'administration de ce collège.
Le rectorat est injoignable, d'après elle. "Nous les avons appelés, mais nous tombons sur le répondeur. Nos mails sont restés sans réponse. Les élèves ont déjà perdu un trimestre de cours. 40 heures, cela ne se récupère pas facilement. Cela représente 4 à 5 heures de français perdues chaque semaine, par les élèves. C'est pourquoi on s'est mobilisés aujourd'hui. On est en zone prioritaire, on parle de 'choc des savoirs', mais là, on donne aux enfants la vision qu'ils ne sont pas prioritaires", déplore Mme Sylla.
Matérialisation poétique du problème dramatique des heures de cours non remplacées au collège Victor Hugo d'Aulnay-sous-Bois.#planDurgence93#H2CP pic.twitter.com/wli2hi1veR
— Alixe Rivière (@AlixeRSs) March 19, 2024
Ce sentiment d'abandon est renforcé par l'absence de solution pérenne à ce problème, selon elle : "Avant les vacances scolaires, un professeur volontaire leur a donné sept à huit heures de cours. Il a consacré deux heures de plus par semaine, pour eux. Les élèves ont eu le temps de se remettre dans le bain, avant que ces cours ne s'arrêtent de nouveau."
Un tableau sombre que complète sans hésiter la vice-présidente de l'association. "Les évaluations de niveau ont eu lieu en 6e et en 5e, et ses résultats sont catastrophiques. Cette absence de professeur dans une matière aussi fondamentale que les mathématiques perturbe aussi les enfants, notamment dans leur hygiène de vie. Leur emploi du temps comporte plusieurs 'trous', donc beaucoup d'heures de permanences. Ils commencent parfois très tard puisqu'il y a des matinées sans cours, où, à l'inverse, très tôt", ajoute la coresponsable de l'association Aperdv.
Des associations de parents d'élèves dépitées
La situation n’étonne malheureusement pas la FCPE de Seine-Saint-Denis. "Il s’agit d’une redite des années précédentes. Les groupes de besoin ont reculé dans le 93, car il manque des professeurs. 800 millions d’euros manquent pour les bâtiments scolaires et le personnel de l’Éducation nationale, par exemple pour les professeurs, assistantes sociales ou les intendants", se désole Alix Rivière, porte-parole départementale de cette association de parents d’élèves.
La période à venir ne semble pas plus positive, d'après Alix Rivière : "4000 postes d’enseignants ont été supprimés du dernier projet de loi de finances du gouvernement, car ils n’ont même pas été recrutés. Sans compter que la nouvelle ministre de l’Éducation nationale affirme que le taux d’encadrement dans le 93 est à faire pâlir d’envie les autres départements."
Une pénurie bien perceptible dans l'académie de Créteil
Ce manque de professeurs n'est pas un exemple isolé, dans l'académie de Créteil (Val-de-Marne), touchée par le manque de professeurs, d'après le Snes-FSU. "Parmi les académies les plus touchées, on peut trouver celles de Versailles avec 72 % des établissements dans lesquels il manque au moins un professeur, mais aussi Créteil avec 63 %."
Toujours pas un·e enseignant·e devant chaque classe !
— SNES-FSU (@SNESFSU) September 6, 2024
Notre enquête de rentrée confirme la pénurie.
Pour le @SNESFSU, les solutions existent :
👉revaloriser les salaires
👉améliorer les conditions de travail https://t.co/g8yGbQOpwG #Rentrée2024 pic.twitter.com/OCOmypAd7G
Selon l'enquête de ce syndicat du second degré, le déficit est particulièrement marqué dans certaines disciplines. "On note un grand nombre de postes de professeurs de français non pourvus, mais également en maths et dans une moindre mesure de langues vivantes, technologie, éco-gestion", détaille le Snes-FSU.
Ce syndicat a mené "une enquête réalisée par téléphone et mails auprès des responsables de sections SNES-FSU sur un échantillon de 893 établissements". Son site internet précise qu'elle a été menée "du 30 septembre, 8h au 5 septembre 10h30, et qu'elle a vocation à faire une photographie à un instant T" de ce problème.
Contactée, l'académie de Créteil n'a pas répondu ce jour à notre sollicitation.