A Chanteloup-les Vignes, une cité éducative pour ouvrir l'horizon des jeunes de quartier

Réconcilier les différents acteurs de l'éducation (communes, Éducation nationale et parents d'élèves), c'est l'ambition des cités éducatives, avec des financements à la clef. À Chanteloup-les-Vignes, de nombreux élèves décrocheurs ont repris le chemin de l'école.

C'est l'une des rares mesures qui reste du plan Borloo (ancien ministre la Ville) pour la banlieue, remis au président de la République en 2018 et aussitôt enterré : les cités éducatives.

Ce label, donné à des communes et non à des établissements, vise à coordonner le travail éducatif de l'ensemble des acteurs d'un territoire autour de projets. Grigny (Essonne) fut la première commune à en bénéficier en 2017 avant que le dispositif ne soit étendu comme à Chanteloup-les-Vignes en 2019.

"L'idée est de dire que l'on mutualise nos esprits, nos bonnes volontés, nos savoirs. On est un peu tous acteurs de l'éducation en intégrant son premier acteur : le parent. Il ne doit pas être exclu mais faire partie du processus", explique Catherine Arenou, maire (DVD) de cette commune des Yvelines.

Après des années de mandat, l'élue fait le constat, aussi évident qu'il puisse paraître, que les différents acteurs de l'éducation ne travaillent pas ensemble. L'État propose ainsi des financements à hauteur de 350 000 euros par an pour que tous se mettent à la même table et avancent autour de projets communs.

"Ce n'est pas le tout de dire aux gens : 'travaillez ensemble !', il faut aussi leur donner des moyens. Cela a servi à porter des projets, à chercher des associations, à porter quelques postes atypiques", poursuit-elle.

Elèves décrocheurs

Mise en place juste avant la crise sanitaire, la cité éducative de Chanteloup a permis de rattraper certains jeunes. C'est le travail de Mimouna Messaour, référente suivi parcours lycéen sur la ville dont le poste a été créé grâce au dispositif. Surtout que la commune, qui possède deux collèges (500 élèves au total) n'a pas de lycée.

"Une fois qu'ils étaient sortis du territoire, on n'avait pas de visibilités. On avait des jeunes qui pouvaient être en décrochage. Maintenant, je travaille avec les 27 établissements (dans lesquels les élèves peuvent aller, ndlr). Lorsqu'un jeune est identifié comme étant fragile scolairement, absentéiste, on m'interpelle et avec l'accord des familles, on met des actions en place pour accompagner le jeune", indique-t-elle.

Difficile de savoir combien d'élèves ont été réinsérés dans le cursus scolaire grâce au dispositif. Le coordinateur jeunesse de Chanteloup, qui travaille dans les deux établissements, avance le chiffre de 152 jeunes décrocheurs à cause de l'épidémie. "Il faut que l'on fasse prendre conscience aux parents que c'est grave. On en a récupéré 52 ou 53", détaille Youssef Dkhil.

Lui aussi constate que les différents acteurs du territoire ne travaillaient pas forcément ensemble et loue l'utilité des cités éducatives pour élargir l'horizon des élèves. "Ces jeunes ont une image négative d'eux-mêmes. J'ai une élève qui va être médecin, c'est un exemple pour les autres. C'est sympa de parler du foot, de la boxe, mais il n'y a pas que ça. D'autres jeunes doivent être mis en avant", ajoute-t-il.

32 cités éducatives dans la région

La rectrice de l'Académie de Versailles, Charline Avenel, venue au collège René Cassin pour tirer un bilan de l'expérience, se montre ravie : "Le résultat est très positif. Comme on a l'habitude de se parler, quand on veut mettre en place un programme, on est vraiment en capacité de le faire".

Au total, 32 cités éducatives ont été mises en place en Île-de-France. "On a ceci en France que l'on a tendance à être chacun dans nos tuyaux. Bien sûr, on parlait aux services de santé, on se parlait entre nous. Il fallait avoir un projet fédérateur, avec des moyens, où l'on décide conjointement. Cela paraît évident, mais ça ne l'est pas tant que ça", confesse cette haute fonctionnaire.

Un outil uniquement politique ? Pas à en croire Léa Viso, proviseure du collège Magellan à Chanteloup. "Pour une fois, ce n'est pas un dispositif de plus, c'est faire autrement en utilisant les choses qui existent et en développant des partenariats utiles pour la réussite des jeunes", affirme-t-elle.

À titre d'exemple, elle cite la défiance des enseignants vis-à-vis des parents d'élèves : "Il y avait l'idée que les familles étaient dans l'attaque de l'institution", observe-t-elle. "Depuis, les réponses sont différentes. C'est lent, il y a des résistances, c'est normal, mais il y a une discussion et c'est génial. L'accueil dans les familles change et la cité éducative permet d'amplifier cela".

"Une vie après Chanteloup"

Dans son établissement, Léa Viso et ses équipes ont identifié de gros problèmes de lecture et de compréhension. Avec les crédits, ils ont décidé de promouvoir toutes sortes d'ateliers pour faire face au problème. Soutien scolaire, bien-sûr, mais aussi des cours de théâtre, d'éloquence, de cirque ont été mis en place, en ayant toujours en tête d'ouvrir le champ des possibles des élèves.

"Certains ne vont plus au lycée d'à côté parce qu'ils doivent prendre le train. Ils préfèrent aller dans l'établissement le plus proche même si ce n'est pas ce qu'ils veulent faire pour ne pas sortir de Chanteloup et rester dans leur zone de confort. On veut leur montrer un nouvel horizon et qu'il y a une vie après Chanteloup", espère cette directrice.

Seule ombre au tableau, les financements (34 millions d'euros pour les 80 labels). Ils ne sont assurés que pour trois ans, jusqu'en 2023.

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