Lancée à l'initiative de Stéphane Ravacley et Patricia Hyvernat, l'association Patrons solidaires a pour vocation de soutenir les artisans qui sont empêchés d'embaucher des jeunes qu'ils forment et accompagnent. Implantée à Lille, Paris et Besançon, elle l'est aussi désormais à Nantes
Ils s'appellent Yaya, Bengali, Ibrahima ou Vianney.
À l'âge de 13, 14 ou 15 ans, ils ont pris le chemin de l'exil, pour fuir des conditions de vie intenables dans leurs pays d'origine.
Arrivés en France, ils ont été placés sous le statut de mineurs isolés.
Ils ont alors été accueillis, hébergés, pris en charge par les départements. Accueillis et formés, principalement aux métiers de bouche ou du bâtiment. Des fillières qui manquent cruellement de bras.
Tous ont rencontré des patrons qui les ont accompagné, ont reconnu leur envie de travailler, de s'investir et qui aujourd'hui souhaitent les embaucher.
L'histoire pourrait s'arrêter là. Un patron embauche un jeune titulaire d'un CAP, d'un brevet professionnel et tout le monde est content.
OQTF késako ?
Seulement voilà, lorsque ces jeunes exilés atteignent l'âge fatidique de 18 ans, dans 70% des cas, ils reçoivent un courrier de la Préfecture. Une OQTF, une Obligation de Quitter le Territoire Français. Retour au pays sans autre forme de procès.
Un parcours d'insertion brutalement interrompu dès lors qu'ils sont considérés comme majeurs. "C'est simple, à 18 ans, c'est merci, au revoir" résume d'un ton navré, un patron solidaire.
C'est contre ces décisions administratives, qui ne tiennent compte ni du contexte économique de l'entreprise, ni du parcours et des efforts consentis par ces jeunes, que des patrons ont décidé de lutter.
Les premiers à avoir mis ces situations en lumière et à avoir engagé des recours pour embaucher leurs jeunes apprentis s'appellent Stéphane Ravacley et Patricia Hyvernat. Ils sont respectivement boulanger et paysanne boulangère dans l'est de la France.
Ils ont été jusqu'à faire des grèves de la faim pour se faire entendre et que les dossiers de leurs apprentis, Layé et Yaya , soient réévalués par les préfectures. Et ça a marché.
Forts de cette expérience, et parce qu'ils ont été depuis leur action contacté par quelques 80 patrons dans le même cas, ils ont décidé de fonder une association d'aide aux "invisibles".
"Les invisibles ce sont ces jeunes exilés mais aussi tous ces petits patrons qui sont en manque de main d'oeuvre qualifiés, de savoir-faire et qui pourraient les recruter"
À Nantes pour soutenir Ibrahima, Bengali et d'autres...
Ce samedi, les fondateurs de Patrons Solidaires sont intervenus à Nantes, à la fois pour lancer leur antenne sur le département mais aussi pour soutenir les gérants de Sols Murs Création, Alain et véronique Écobichon.
Ils ont formé Ibrahima Fari, un jeune guinéen. Mais depuis qu'il a atteint sa majorité, il lui est interdit de travailler dans l'entreprise.
Une situation qui rappelle celle de Bengali apprenti charpentier, dont le dossier, malgré plusieurs recours, n'est toujours pas réglé.
https://www.youtube.com/watch?v=cdZTrCkQHhw
" Tous ces patrons ont des entreprises à faire tourner, ils n'ont pas les ressources et le temps pour déposer des recours, s'entretenir avec les avocats, interpeller les politiques et les préfectures. Nous on est là pour recenser les situations, porter les dossiers au plus haut niveau pour qu'enfin ces jeunes soient régularisés " décrypte encore Stéphane Ravacley.
" Un jeune formé et embauché, c'est un futur salarié qui va consommer sur le territoire et faire tourner l'économie, il ne faudrait pas l'oublier "
L'association qui a déjà porté un projet de loi (rejeté par le Sénat) revendique pour ces jeunes d'être sous statut protégé jusqu'à l'âge de 21 ans, ce qui leur permettrait d'affiner leurs parcours de formation, voire de changer d'orientation, ainsi qu'un processus d'accélération des régularisations pour faciliter des embauches. En France, on estime que la filière du bâtiment, notamment, dispose de 300. 000 emplois vacants.
- Pour contacter l'antenne nantaise de Patrons Solidaires:
référente Margot Wolf: patrons solidaires.nantes@gmail.com
- une pétition pour Ibrahima :