Le mouvement des agriculteurs fait tache de gasoil, si l'on peut dire. Les pêcheurs se sont joints à la colère des éleveurs et des cultivateurs, dénonçant, eux aussi, le prix trop élevé du carburant et y ajoutant d'autres revendications plus spécifiques à leur métier. Ils ont manifesté ce mercredi matin à Nantes.
Tôt ce mercredi matin, quelques marins pêcheurs venus de Lorient, Concarneau et Audierne se sont retrouvés devant la direction des territoires et de la mer, boulevard Allard, à Nantes, pour y déposer des résidus de pêches, poissons, filets et autres déchets.
Un mouvement qui est, pour le moment, très réduit, le comité régional des pêches des Pays de la Loire n'avait pas appelé à se joindre à cette opération.
Du reste, les agriculteurs ne voient pas forcément d'un bon œil ce renfort, craignant que leur propre mouvement ne perde en lisibilité.
"L'État n'entend pas nos doléances"
Pour la vingtaine de marins pêcheurs qui s'était déplacée sur cette manifestation, le monde de la pêche souffre des mêmes maux que celui de l'agriculture, le coût du carburant et les contraintes réglementaires.
"On est venus exprimer notre ras-le-bol vu que l'État n'entend pas nos doléances, nos revendications, déclare David Le Quintrec, fileyeur basé à Lorient, qui s'estime solidaire avec les agriculteurs. La pression européenne, de l'administration française, la suréglementation, le gasoil, on a de multiples revendications similaires."
Action des marins pêcheurs bretons ce matin à #Nantes qui déversent du poisson et du matériel de pêche devant leur administration. Revendications et ras le bol similiaire à celui des #AgriculteurEnColere @F3PaysdelaLoire pic.twitter.com/A3UAXXEZL5
— Maxime Jaglin (@MaxJaglin) January 31, 2024
"Les professionnels ne souhaitent en aucun cas être biberonnés aux subventions comme certains veulent le laisser entendre. Ils n’ont qu’un seul objectif : vivre de leur travail et participer à la souveraineté alimentaire de la France et de l’Europe", écrivait dans un communiqué daté de mars 2023 le comité régional des pêches des Pays de la Loire, et dans lequel, la filière dénonçait déjà les restrictions imposées à la profession.
En ce début 2024, avec l'interdiction partielle de la pêche dans le golfe de Gascogne pendant un mois, les pêcheurs s'estiment toujours victimes d'une réglementation injustifiée. Mais ce mercredi, seuls des patrons pêcheurs du Finistère et du Morbihan se sont mobilisés pour venir manifester à Nantes.
"Le mouvement va s'intensifier, espère David Le Quintrec, des Sablais vont venir nous rejoindre, et des Turballais aussi."
Ces pêcheurs, bloqués à terre jusqu'au 20 février disent être pris à la gorge et dans l'impossibilité de rembourser les investissements de matériels qu'ils ont faits.
Romain Jouan, est armateur à La Turballe. Il se dit proche effectivement du mouvement des agriculteurs dont il comprend les difficultés quand ils évoquent les questions de rapport entre coût de production et prix de vente.
"Déjà pour le coup de la production, dit-il, ma lotte, je la vends à 4/5 euros (le kilo), c'est beaucoup trop juste. On est sur un fil en termes de rentabilité de nos productions qui fait qu'on n'a pas le droit à l'erreur, pas le droit à une panne. Avec nos charges qui sont exponentielles et le prix du poisson qui n'a jamais été aussi bas, c'est compliqué."
"Faut y aller, faut se joindre à eux"
Il se dit prêt à rejoindre ce mouvement "si nos représentants prennent la décision de le faire, précise-t-il. Même si la force des pêcheurs n'est pas énorme, ça fera une force en plus. Les problèmes sont les mêmes. On est des paysans des mers, eux, ce sont des paysans sur terre, faut y aller, faut se joindre à eux."
Romain reconnaît que ce peu de mobilisation, pour le moment, dans la profession des marins pêcheurs où il y a peu de jeunes, est peut-être le signe que les "anciens" n'ont plus la force de se battre. Lui, se dit inquiet.
"Ce n'est pas ce que j'avais envisagé en achetant le bateau, dit-il. Qu'est-ce qu'on va faire de la pêche en France ? ll ne faut pas laisser les clés du camion de la pêche à d'autres pays."
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