Témoignage. "Je suis effrayée", dit Svetlana, menacée d'être reconduite à la frontière sans son enfant né en France

Publié le Écrit par Olivier Quentin
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On a du mal à imaginer qu'une administration ait pu prendre une telle décision. Svetlana est russe et vit à Nantes depuis 2018. Elle a eu, depuis, un enfant, mais a reçu un courrier de la préfecture, une OQTF, obligation de quitter le territoire français. Des parents d'élèves la soutiennent.

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C'est en 2018 que Svetlana Dzhamalova est arrivée en France. Divorcée, Svetlana vient chercher en France un environnement plus serein que ce qu'elle fuit en Russie. Elle a emmené avec elle ses deux enfants, Safiya et Oumar qui ont alors 8 et 5 ans. La jeune femme a engagé une procédure de demandeur d'asile. 

C'est à Nantes que Svetlana fait la connaissance de Khandoula, russe, lui aussi, en situation régulière et qui a un travail. Ils auront ensemble un enfant, Mouhammad, né en 2022. 

Une demande de régularisation

En mai 2023, aidée par un intervenant social de l'association Trajet, Svetlana fait une demande de régularisation auprès de la préfecture de Loire-Atlantique. Pas de réponse. Elle s'inquiète, demande où en est son dossier... et reçoit, le 3 avril 2024 un courrier. Mais ce n'est pas une bonne nouvelle, la famille russe, Svetlana, Safiya et Oumar, fait l'objet d'une OQTF, obligation de quitter le territoire français. Nulle part, dans la décision de la Préfecture, il n'est mentionné l'existence du concubin, encore moins du petit Mouhammad. La famille recomposée est sous la menace d'une séparation forcée.

C'est une douche glacée pour cette famille très bien intégrée, selon ce qu'en disent ceux qui la connaissent. 

Dans l'école primaire Ampère où est scolarisé Oumar, 10 ans, une quarantaine de parents d'élèves se sont mobilisés pour témoigner auprès de la Préfecture. De son côté, Safiya, qui a aujourd'hui 13 ans, est une élève brillante au collège Chavagnes à Nantes. Et son histoire a provoqué également un mouvement de soutien de la part du proviseur et de parents d'élèves.

Soutien actif de parents d'élèves

"Ce sont des enfants adorables, bien intégrés", dit Emilie Houdmon, représentante des parents d'élèves de l'école Ampère.

"Ces enfants ont toute légitimité à rester sur le territoire, confirme Angéline Petitgas, autre parente d'élève. En tant que parents, on s’est mobilisés. On a créé un réseau solidaire pour qu’il y ait un soutien dans les recours." 

Ce comité de soutien est choqué que l'on puisse ainsi séparer une famille et ne pas prendre en compte les efforts qu'elle produit pour s'intégrer en France. L'article 3.1 de la convention internationale des droits de l’enfant (ratifiée par la France en 1990) est invoqué. Celui-ci affirme que "dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale." 

"C'est une OQTF un peu à l'aveugle"

Même étonnement de la part de l'intervenant social de l'association Trajet qui accompagne la famille. "Svetlana fait un effort considérable pour s’intégrer, constate Souleymane Yahaha Namassa. Elle prend des cours de Français. Safiya est l’une des meilleures de sa classe. L’administration se borne à rappeler des faits qui datent de 2019 sans prendre en compte le fait qu’elle a évolué."

L'association Trajet a orienté Svetlana vers un avocat qui connaît bien les procédures en matière de droit des étrangers. 

"La préfecture n'a pas examiné la situation comme elle l'aurait dû, estime Maître Bourgeois. Ce qui est absurde, c'est que Madame Dzhamalova avait fait une demande de titre de séjour en 2023 qui n'a pas été examinée. C'est une OQTF un peu à l'aveugle. L'éloignement du territoire est inenvisageable. Il y a une vraie problématique au regard de la vie privée familiale."

Maître Bourgeois se dit confiant. Tous les éléments pour une régularisation sont réunis selon lui. Des éléments réunis dans un mémoire de 24 pages qu'il a communiqués au service des titres de séjour de la Préfecture.

"Je ne peux pas laisser le petit qui est né là"

"C’est triste, déclare la jeune Safiya qui n’a que quelques souvenirs fugitifs de la Russie. On habite ici depuis cinq ans, je considère ça comme ma vie de naissance. On n'a personne là-bas (en Russie)"

Oumar, lui, considère Khandoula comme son père.

"Je suis effrayée depuis que j’ai reçu le papier, dit Svetlana, la maman des trois enfants. Si, encore, ce n’était que moi, mais ça touche aussi mes enfants. Je ne peux pas laisser le petit qui est né là."

Un recours a été tenté devant le Tribunal Administratif de Nantes, qui suspend la décision de la Préfecture. Une attente a commencé, angoissante.

"On les soutiendra jusqu’au bout" assure Angéline, parent d'élève du comité de soutien. "Jusqu’à ce qu’ils aient leur titre de séjour", confirme Emilie.

Actualisation le 23 avril à 18h36 : la préfecture de Loire-Atlantique annonce la régularisation de la famille Dzhamalova.

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