Chaque année en France, 10 millions de tonnes de nourriture consommable sont jetées. Un tiers est perdu dès la production, dans les exploitations agricoles, notamment les fruits et légumes plus fragiles. Les producteurs tentent de réduire ce gâchis.
Dans son champ de salades, Patrice Lamballe, maraicher à Sainte-Gemmes-sur-Loire en Maine-et-Loire, prend soin de ses batavias même s’il sait déjà qu’une partie ne sera pas commercialisée.
Une fois qu’on épluche la base, la salade est potable mais elle est trop petite, elle n’est plus vendable, explique-t-il.
Plutôt que de les laisser se décomposer sur place, il choisit pourtant de les récolter et de les donner chaque semaine à des associations d'aide alimentaire.
Sur 1200 salades, je vais en laisser 200 à 300, je préfère qu’elles soient données, ça me fait moins mal au cœur quand on arrive dans la parcelle.
"Elles sont comestibles, commercialisables, mais limite. Si je prends celles-là, ce sont les autres qui vont vieillir. J’ai intérêt à prendre celles de la nouvelle série qui sont encore très jeunes, et donner celles-là aux Restos du Cœur."
Les dons sont organisés par l’association Solaal, qui met en relation les agriculteurs et les associations d’aide alimentaire. En 2020, 300 tonnes de produits frais ont ainsi été récupérées en Pays de la Loire, un gain de temps pour les bénévoles.
"Si on récupère 10 cageots, cela peut paraitre peu, mais ce qu’il faut voir c’est la répétition et la globalité", confirme Patrice Houdbine, président de la Banque alimentaire du Maine-et-Loire.
14% des aliments produits sont perdus entre la récolte et la commercialisation
Une goutte d’eau dans un océan de produits alimentaires non consommés. 14% des aliments produits sont perdus entre la récolte et la commercialisation, selon le ministère de l’Agriculture et 17% de la production alimentaire mondiale totale est gaspillée.
En moyenne un tiers des salades, 8% des pommes, 4% des tomates sont jetées, perdues dès l'étape de la production.
Parfois, elles ne sont pas vendables, parfois il y en a simplement trop comme ces tomates abandonnées dans un champ en 2020, conséquence de la surproduction.
Car la production agricole est aussi liée aux aléas climatiques, à la demande des consommateurs. Pour éviter un coûteux gâchis, Nicolas Oran, maraicher installé Loire-Othion en Maine-et-Loire, a choisi de diversifier ses clients.
On va de la vente directe jusqu’aux grossistes, en passant par une Amap, des magasins spécialisés. Il faut pouvoir rebondir d’un client à l’autre, d’un système de commercialisation à un autre.
D'autres vont encore plus loin, en transformant sur place, dans l'exploitation, les produits frais invendus. Dans sa ferme de la Chapelle-sur-Erdre, en Loire-Atlantique, Alexandre Besseas transforme ainsi près de 1000 tonnes de fruits et légumes, chaque année.
"C’est quasiment zéro en perte, parce que tout ce qui est écart de calibre, de forme, de tenue, d’aspect est transformé en potage, confiture ou jus".
La vente des jus permet de rentabiliser le matériel et la logistique et les épluchures et les pépins viennent ensuite enrichir le compost. Des solutions existent donc pour éviter le gâchis à la production, à condition que valoriser coûte moins cher que jeter.
La France s’est donnée pour objectif de réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2025 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective et d’ici 2030 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale.