À Vence, les Nuits du Sud nouvelles victimes de l'inflation

Après plusieurs années de déclin, le festival des Nuits du Sud se heurte à un budget limité de la commune durement touchée par l'inflation. Le maire de Vence a annoncé en conseil municipal que l'édition 2023 serait une formule réduite.

C’est en arrivant dans son bar dans la matinée que Jorge Lopez a appris la nouvelle, rédigée dans le journal local. "Ah, c’est une mauvaise nouvelle, c’est le moins que l’on puisse dire" s’exclame-t-il lorsqu’on lui demande ce qu’il pense de cette nouvelle formule, réduite, du festival des Nuits du Sud, prévue pour 2023, et annoncée la veille en conseil municipal.

"Ce festival représente entre 20 et 25% de mon chiffre d’affaires", poursuit celui qui avait acheté en 2007 son bar, "Les vieux fiancés", pour cet emplacement en première ligne du festival, place du Grand Jardin, à Vence. Un prix d’achat qui correspondait d’ailleurs à cette proximité avec cet évènement estival et qu’il a peur de voir baisser à la revente si les Nuits du Sud ne sont plus ce qu’elles étaient.

Plus loin, Vincent Decker a lui pris les rênes de son établissement en 2020, alors que le festival connaissait déjà une version particulière pour s'adapter à la crise sanitaire. Cette édition 2022, c'était sa première année de Nuits du Sud sur trois week-ends, avec huit soirées de concerts, mais "nous n'avons eu qu'une seule soirée intéressante avec un chiffre d'affaires à plus de 6 000€, celle de l'ouverture".

Pour laisser place à la scène et son public, il doit réduire sa terrasse, seulement l'affluence espérée pour une telle manifestation ne compense pas cette perte d'espace, et donc de tables. "On m'a dit qu'avant c'était phénoménal ce festival, mais pour moi, aujourd'hui, il faudrait le concentrer sur un week-end avec toujours des têtes d'affiches importantes" termine-t-il. 

Un déficit de près du double du budget habituel

Cette édition 2022 était pourtant prometteuse, la première du nouveau directeur du festival, Mathieu Ducos, ancien directeur de Rock en Seine. Des têtes d'affiches bien présentes comme Bob Sinclar, Benjamin Biolay et Lilly Wood and the Prick et une date anniversaire, celle des 25 ans. 

"La municipalité avait même décidé d'ajouter 70.000€ supplémentaires aux 200.000 prévus chaque année pour cette 25e édition" explique Patrick Scalzo, conseil municipal et membre du groupe d'opposition "Objectif Vence"

Seulement, comme depuis de nombreuses années, l'affluence n'a pas été au rendez-vous, "ils se sont retrouvés à devoir ajouter 130.000€ pour combler le déficit, ce qui fait que cette année, le festival a coûté le double" poursuit-il.

"Dans un contexte de surcoût de l'énergie, d'inflation et de hausse des salaires des fonctionnaires, changer de formule était inévitable" se désole celui qui a pris la parole en conseil municipal, redoutant que cette nouvelle formule qui serait dispersée dans la ville et ferait plus de place aux artistes locaux "ne soit qu'une deuxième Fête de la musique". 

Pour lui aussi, la bonne formule serait de conserver le même festival, mais sur un temps plus réduit "là on louait des scènes et du matériel sur trois week-ends pour huit soirées d'événements, j'avais déjà alerté la majorité à ce sujet". Pourtant, ce festival a connu de belles années, "dont certaines étaient même excédentaires" affirme-t-il.

Un premier déclin en 2016 avec les attentats

Créé en 1998 par Téo Saavedra, l'année de référence reste 2002, car "les fréquentations avaient explosé et on était même le premier festival à avoir un écran géant" se souvient Cécile Bronner, chargée de communication des Nuits du Sud. Le timing était bon, "c'était au début de la tendance des musiques d'Amérique latine et Téo Saavedra savait programmer les bons artistes".

Le public était présent et c'est ce fondateur historique qui faisait vivre le festival.

70% du budget venait de la billetterie

Cécile Bronner, chargée de communication des Nuits du Sud

Mais les attentats de 2016 ont été un premier coup dur pour la fréquentation mis aussi le coût d'une telle organisation en terme de sécurité. S'y ajoutent la concurrence croissante d'autres festivals comme les Nuits guitares à Beaulieu-sur-Mer (Alpes-Maritimes), les Plages électroniques à Cannes, "et le contexte du monde musical lui même. Par exemple les cachets des artistes ont explosé du fait de la baisse des ventes de CD." Sans parler du Covid-19 qui a marqué un coup d'arrêt pour l'ensemble du secteur. Des 12 dates connues sur les premières éditions, il n'en restait donc plus que huit lors de la dernière. 

Consensus sur la nécessité de changer

D'autres se plaignent du coût de ce festival depuis plus longtemps. "Je réclame depuis quinze ans qu'une nouvelle formule soit adoptée" explique Patrice Miran, conseiller municipal du groupe d'opposition écologiste "Unis pour Vence" affirmant même "qu'il ne faut pas croire que ce festival crée un enthousiasme unanime de la population vençoise". En 2019, il avait lancé une consultation citoyenne pour réfléchir à de nouvelles propositions, notamment celle de plusieurs scènes à des endroits différents de la ville. Une option que semble avoir retenu le maire. Lundi 13 décembre en conseil municipal, il proposait une version allégée du festival "avec une programmation de mini-concerts, spectacles, soirées thématiques..." comme il l'indique dans un communiqué de presse. 

L'ensemble des conseillers municipaux s'accordent sur un point, le maintien de ce festival qui fait désormais partie de l'ADN de Vence. Reste à en trouver la bonne formule. Le maire se veut optimiste, seule l'édition 2023 serait allégée pour faire face au contexte actuel, "la programmation du festival original 2024 est d'ores et déjà à l'étude pour rebondir positivement vers un événement réinventé." 

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