Au large de Cannes, sur l'île Sainte-Marguerite, une exposition pas comme les autres est proposée par la mairie : "prisonniers en terre d'exil". Elle retrace l'histoire de ces détenus déportés depuis l'Algérie durant le XIXe siècle.
C’est un lieu discret, une pinède presque oubliée. Sur l'île Sainte-Marguerite de Cannes (Alpes-Maritimes) gît une période méconnue de l’histoire franco-algérienne.
Au sol, de simples cercles de pierre représentent d'anciennes tombes. C'est le cimetière musulman de l'île cannoise.
Ces tombes sont anonymes, car la tradition musulmane rejette l'ostentation après le décès.
Christophe Roustan Delatour, directeur adjoint des musées de Cannes
"En revanche, on a des indices sur les pratiques funéraires. Parfois, une pierre va marquer l'emplacement de la tête et le mort regarde vers l’est, vers la Mecque", poursuit Christophe Roustan Delatour.
"Otages politiques"
Beaucoup de ces sépultures sont intactes, d’autres ont disparu, probablement ravinées.
La ville de Cannes veut rénover ce lieu unique en France où reposent d’anciens prisonniers, forcés à l’exil par l’armée française en pleine conquête de l’Algérie.
"C’était des otages politiques", précise le directeur adjoint des musées de Cannes. "On n'était pas dans le cas d'un bagne ou de travaux forcés."
Ils étaient des détenus qui servaient de monnaie d'échange pour obtenir la capitulation de gens qui, en Algérie, se battaient encore pour l’indépendance de leur pays.
Christophe Roustan Delatour
Plus de 3.000 prisonniers musulmans
Comme l’émir Abdel Kader, en lutte contre la colonisation. 500 membres de sa smala ont été déportés sur Sainte-Marguerite. Certaines femmes de la smala ont été détenues dans la cellule autrefois réservée à un illustre prisonnier : le masque de fer.
Christophe Roustan Delatour détaille la situation de l'époque : "dans une cellule de 30m² prévue pour un seul prisonnier, on se retrouve avec une quantité de femmes, d'enfants, leurs serviteurs... qui s’installent tant bien que mal dans ces vieux locaux".
Entre 1841 et 1884, plus de 3.000 prisonniers musulmans ont été détenus arbitrairement sur l’île, pour quelques mois ou plusieurs années.
Certains sont nés dans le fort, 274 n’ont jamais quittés l’île.
L'exposition "Prisonniers en terre d'exil" retrace l’histoire de ces hommes, de ces femmes et de ces enfants. Elle est visible jusqu'au 29 octobre 2023 au musée du Masque de fer et du Fort royal.