De Menton à Nice, cette application venue d'Italie veut révolutionner les paiements du quotidien

Pour s'implanter en France, l'application de paiements par smartphone Satispay a décidé de frapper fort en promettant un important cashback. Créée il y a dix ans dans le Piémont, la start-up est une vraie success story chez nos voisins. Elle est aujourd'hui l'une des deux "licornes" italiennes.

[Article mis à jour mardi 12 septembre] Après la parution de notre article, Pascal Cotte, le directeur général France de Satispay, a souhaité apporter des précisions concernant le cashback dans les pharmacies et les propos de l'ordre des pharmaciens. Elles sont ajoutées dans le paragraphe concerné.

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"Je l’utilise vraiment pour tout : pharmacie, restaurant, achat de nourriture et de vêtements, institut de beauté…" Quand on lui demande son avis sur Satispay, Valérie, une mère de famille mentonnaise, est enthousiaste.

Avec son logo rouge, cette application, créée il y a dix ans à Cuneo (Piémont, Italie), a débarqué sur la Côte d'Azur en octobre 2022.

Depuis plusieurs mois, dans les rues de Menton (Alpes-Maritimes), impossible de passer à côté des affiches publicitaires et de sa promesse alléchante. Tous les vendredis, samedis et dimanches, utiliser Satispay pour payer ses achats du quotidien donne droit à 30% de cashback. Comme ça, sans abonnement. Et sans frais.

Et cela, c'est ce qui a plu à Valérie, cette quinquagénaire mentonnaise à l'affût de bons plans et de réductions.

Le cashback m’intéresse et l'application est très facile à utiliser. Parfois, je l’utilise aussi depuis ma maison pour payer le restaurant de ma fille à distance.

Valérie, utilisatrice mentonnaise

"Je l'utilise principalement le week-end pour le cashback, quelques fois durant la semaine", poursuit-elle.

Une arrivée en France à plusieurs millions

À ce moment-là, peut-être vous dîtes-vous "c'est trop beau pour être vrai" ou "où est l'arnaque" ? Nous aussi. Alors, nous avons testé l'application, en fournissant une pièce d'identité et un IBAN. Et il faut bien le reconnaître : le mécanisme est simple d'utilisation, le paiement chez le commerçant est instantané, tout comme les 30% de cashback, remboursés sur notre compte quelques secondes après.

Une ristourne importante, sans que ni le commerçant, ni le client n'ait à payer le moindre abonnement. L'idée est de frapper fort en touchant directement au porte-monnaie des Azuréens en pleine période d'inflation.

Pour financer cela, Satispay a réalisé une levée de fonds de 320 millions d'euros en septembre 2022 (auprès notamment de banques italiennes et d'un fonds américain).

"On a démarré en France par le centre-ville de Menton", détaille Pascal Cotte, le directeur général France de Satispay. "Le développement a été super fort les premières semaines et l'accueil des commerçants a été génial. Après Menton, on a continué ville par ville : Villefranche-sur-Mer, Eze, Beaulieu, jusqu'à Nice."

Presque un an après son arrivée sur la Côte d'Azur, l'application revendique 1.500 commerçants azuréens actifs et 30.000 utilisateurs français. Et espère bien renouveler ce qu'elle a réussi chez nos voisins italiens.

Success story italienne

L'histoire commence en 2013. À Cuneo, dans le Piémont, Alberto Dalmasso, Dario Brignone et Samuele Pinta créent Satispay.

"L'idée de départ", détaille Pascal Cotte, "était de créer un système qui permet à chacun de payer ses courses, même pour des tous petits montants comme un expresso, sans utiliser de cash ou de cartes de crédit."

"On a commencé par démarcher les commerçants de notre ville pour leur faire connaître notre nouveau moyen de paiement", expliquait Alberto Dalmasso à nos confrères de France 3 Alpes en mars dernier. Les trois entrepreneurs développent leur idée ville par ville avec cet argument choc : 0% de frais sur les transactions inférieures à 10€. Une révolution pour les commerçants.

Il n'y a pas de coût lié à l'utilisation de Satispay pour l'utilisateur. Pour le commerçant : pas de frais de transaction en-dessous de 10€ et une commission fixe de 20 centimes au-dessus.

Pascal Cotte

Aujourd'hui, la société emploie 600 salariés et revendique 4 millions d'utilisateurs et 300.000 commerçants à travers trois pays (Italie, France et Luxembourg). Rien qu'en Italie, l'application serait utilisée dans une transaction mobile sur trois. "L'utilisateur-type, c'est la génération Y entre 35 et 49 ans", détaille le directeur général France.

Chez nos voisins, la start-up a décroché le titre de "licorne" (c'est-à-dire une entreprise non-cotée en bourse et dont la valorisation est supérieure à 1 milliard de dollars). Elle sert même aux Italiens à payer un timbre fiscal, une amende routière ou encore une facture d'eau...

L'ordre des pharmaciens saisi

En France, on n'en est pas (encore ?) là. Les commerçants partenaires sont ceux "du quotidien". À l'instar de Luisa Inversi, la gérante de Pasta Piemonte. Cette Italienne originaire du Piémont connaît et utilise cette application depuis son lancement. Alors, quand la start-up a débarqué sur la Côte d'Azur, elle a tout de suite accepté ce moyen de paiement pour son commerce mentonnais.

La carte bancaire, c'est environ 4% de frais, sans compter la location ou l'achat d'un terminal de paiement. Si je pouvais m'en débarrasser, ce serait génial !

Luisa Inversi, commerçante mentonnaise

Mais d'autres commerçants sont plus inattendus : on trouve en effet des pharmaciens et des opticiens... Et ce n'est pas sans poser quelques interrogations chez les professionnels de ces secteurs.

Cyril Colombani est pharmacien à Roquebrune-Cap-Martin et préside aussi l'Union des syndicats des pharmaciens d'officine des Alpes-Maritimes. Depuis février, il comptabilise "une dizaine de transactions par semaine", principalement pour de la parapharmacie. Mais parfois aussi pour des médicaments. "Une fois, une patiente monégasque, qui n'avait pas de tiers payant et qui avait perdu son portefeuille, m'a payé en Satispay. J'avais demandé à ce que le cashback ne soit pas activé, mais il l'a été automatiquement."

Le pharmacien roquebrunois a donc envoyé un courrier à l’Ordre national des pharmaciens le mois dernier et attend un retour. Car permettre une réduction de 30% sur des produits pharmaceutiques dans certaines officines uniquement pourrait être perçu comme une sollicitation de clientèle.

Un cashback avec une liste de pharmacies, c’est une sollicitation de clientèle. Éthiquement, on ne doit pas inciter à la consommation de médicaments. On a des règles, on ne doit pas solliciter de la clientèle.

Stéphane Pichon, président PACA-Corse de l'Ordre des pharmaciens

Face à ces remarques, Pascal Cotte tient à préciser que c'est Satispay qui réalise le remboursement et que, si l'utilisateur a atteint le maximum de cashback possible (plafonné à 30€ par week-end), il n'y aura pas de remboursement supplémentaire possible. "Cette fonctionnalité est liée au client, mais pas au commerçant. Elle est événementielle, du fait du développement de l’application."

Pour les pharmaciens, il n'y a donc pas de possibilité de désactiver le cashback. À l'inverse, l'application indique qu'il n'est pas possible d'avoir de remboursement chez un buraliste (qui vend des cigarettes) car "les tabacs presse ne font pas partie des catégories que nous avons déclarées comme éligibles".

Le pari sera-t-il réussi ?

En attendant, la start-up italienne continue son implantation en France. Durant le mois d'août, elle a recensé une "dizaine de milliers de paiements sur la Côte d'Azur, c'est une performance exceptionnelle", se réjouit le directeur général France.

L'objectif est d'être l'application préférée des Niçois et, à terme, des Français.

Pascal Cotte

Mais le principe du cashback n'est pas éternel. À Menton et Nice, il est pour l'instant prévu jusqu'au 31 octobre. Passée cette date, l'application saura-t-elle conserver ses utilisateurs et transformer l'essai ?

"Si ça s'arrête, je ne sais pas si je continuerai à l’utiliser", avoue Valérie, la mère de famille mentonnaise. Mais Pascal Cotte se veut confiant : "sur la Côte d'Azur, il y a moins de transactions le week-end que la semaine".

Prochain objectif : être présent dans cent villes françaises d'ici moins de deux ans, contre sept aujourd'hui. Et, à terme, tenter de détrôner les poids lourds du secteur comme Apple pay ou Visa.

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