Agé de 63 ans à l’époque des faits, un Niçois se faisait passer pour un homme de 37 ans au physique de mannequin afin d’abuser de jeunes femmes. Reconnu coupable dans l'affaire des "viols par surprise" il vient d'être condamné à de la prison ferme.
Un publicitaire niçois à la retraite face aux magistrats. C’est en début d'après-midi, lundi 25 octobre, devant la cour criminelle départementale de l'Hérault, que Jack Sion a dû commencer à répondre des faits qui lui sont reprochés. 23 personnes doivent être entendues.
Beaucoup d’appréhension de la part des plaignantes
Les femmes présentes abordent le procès « avec beaucoup d’appréhension, d’abord parce qu’elles ont peur d’affronter le suspect en face, elles ont peur de sa réaction ».
Dans la salle d’audience où le coup d’envoi des débats a été donné avec 1h30 de retard, les plaignantes font savoir par l’intermédiaire de Maître Maktouf qu’elles craignent « qu’il les attaque directement en disant ce qu’il a dit pendant l’instruction, qu’elles étaient consentantes, qu’il n’y a pas de viol et qu’elles n’avaient qu’à ne pas venir chez lui. »
Pour Maître Maktouf, l’avocat de plaignantes, ce type d’agression présumée par surprise a été clairement expliqué par la justice française. « Le viol par surprise est une notion très compliquée, très pointue juridiquement. La cour de cassation, qui est la plus haute juridiction française, s’est déjà exprimée sur la question. Elle l’a définie pour la première fois dans l’histoire judiciaire française. »
« Le viol par surprise n’a pas besoin de violence, il n’a pas besoin dans sa définition de contraintes ou de provocations. C’est juste ce qu’a fait le suspect, c’est-à-dire, manipuler la victime en mentant sur son identité, en mettant une fausse photo sur un faux profil. En disant des choses qui ne sont pas vraies avec un stratagème mis en place, rodé par lui pour arriver à ses fins. » poursuit Maître Maktouf.
Le tribunal doit se prononcer d'ici à vendredi sur les « viols par surprise » qui lui sont imputés après les dépôts de plainte de 3 femmes.
Faux profil, faux mannequin
Aujourd’hui âgé de 74 ans, Jack Sion est encore plus loin du mannequin qu’il assurait être sur internet. Il y a une dizaine d’années, il a créé un profil sur des sites de rencontre au nom d’Anthony Laroche. Profession, architecte d’intérieur. Regard ténébreux et physique avantageux composaient sa photo de profil.
En réalité, l’homme de 63 ans avait emprunté ce visuel sur le site d’habillement d’une marque américaine très connue, et créé de toute pièce un personnage qui n’existait pas.
Rendez-vous pour la première fois
Une Azuréenne de 33 ans porte plainte en 2014 et révèle l’affaire. Elle raconte cette rencontre et permet aux forces de l’ordre de faire le rapprochement avec deux autres plaignantes.
« Il me disait que j’étais la femme de sa vie » précise celle qui a démasqué le retraité lors du premier rendez-vous. Une entrevue qui est survenue après de longs échanges. « C’était tous les jours, tous les soirs. On s’appelait et on avait des discussions pendant des heures et des heures. Jusqu’au jour où il a souhaité qu’on se rencontre.» explique-t-elle.
La plaignante rejoint un appartement niçois pour un premier rendez-vous. Une relation intime est même prévue dans des conditions particulières, le retraité l’a invité à se bander les yeux, à la manière de Fifty Shades of Grey, le roman américain à succès. Il me disait que j’étais « spéciale » se rappelle-t-elle.
Et de préciser : « Quand je suis rentrée dans l’appartement, la porte était ouverte. Toutes les lumières étaient éteintes. Il n’y avait que la lumière de la salle de bain qui était allumée. J’ai reconnu la voix de suite. Encore une fois, cela m’a rassurée, je me suis dit que c’était bien lui. Il m’a dit de me déshabiller, de mettre le bandeau, et de le rejoindre dans la chambre. »
Le retraité démasqué
« Il m’a attaché les mains. Ce n’était pas prévu au départ, mais à ce moment-là, j’étais loin d’imaginer ce qui était en train de se passer réellement. » s'est remémorée la jeune trentenaire devant les caméras de France 3 Côte d'Azur.
En voyant son ombre, elle découvre après leur relation sexuelle, un « ventre bedonnant ». Le profil ne correspondait pas avec ce qu’elle avait pu voir sur internet pendant des semaines.
Je me suis sentie sale, perdue. Tout s’est écroulé d’un coup.
350 noms de femmes notés sur un calepin
« Je ne comprends pas que l’on me reproche des faits de viol. Je n’ai forcé, ni menacé, ni obligé » avait indiqué Jack Sion lors d'interrogatoires. Les policiers avaient retrouvé un cahier comportant quelque 350 noms de femmes.
L'homme de 74 ans se retrouve sur les bancs du tribunal. Une audience que certains ont voulu à huis clos. La cour criminelle départementale de l'Hérault a donc rendu son jugement ce vendredi : 8 ans de prison ferme.