Faut-il créer des commissions départementales pour lutter contre la désinformation médicale ?

« Wake-up, du chaos à la lumière », un film jugé complotiste, ésotérique, antivax et propice aux dérives sectaires. Il devait être projeté dans un cinéma niçois, propriété du Conseil départemental. Il a été déprogrammé en urgence.

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Jusqu’où peut aller la liberté d'expression ? Jusqu'à la désinformation ? Ce n'est pas un sujet de philosophie au bac mais un problème de société. 

A Nice, tout est parti d'un documentaire : « Wake up, du chaos à la lumière ». Un film jugé complotiste, antivax et propice aux dérives sectaires. 

Il devait être projeté dans un cinéma niçois, propriété du conseil départemental des Alpes-Maritimes. 

Il a été déprogrammé en urgence. Le projet Wake-up est une série de six épisodes de 90 minutes réalisés par Christophe Cossé.

Seuls quatre épisodes ont été réalisés grâce à l’aide de donateurs en ligne.

Celui qui a alerté sur la désinformation, c'est Jérôme Barrière, oncologue à Cagnes-sur-Mer dans les Alpes-Maritimes. 

Une victoire de plus pour ce médecin, mais chèrement payée. Depuis la crise du Covid, il fait partie de ceux qui luttent contre la désinformation médicale.

Cela lui a valu des menaces de mort, une plainte devant le Conseil de l’Ordre des médecins et même des avis négatifs sur Google.

Il faut qu’il y ait une protection des lanceurs d’alerte, il faut qu’il y ait des relais, il n’y a pas de lutte contre la désinformation.

Jérôme Barrière, oncologue à Cagnes-sur-Mer

Créer une commission départementale, c’est son nouveau cheval de bataille pour lutter contre "les désinformateurs".

Face aux experts médicaux, un autre groupe se fait appeler les "Divers-Gens."

Sylvie Bonaldi, rencontrée dans une ferme bio à Contes, en fait partie. Elle est conseillère municipale et métropolitaine (Nice) et sympathisante Divers-Gens : « il serait inadmissible de créer une telle commission, laissons les gens s’exprimer ».

Pour ce groupe, la déprogrammation du documentaire relève de la censure et la création d’un organe de vigilance les inquiète. 

Au nom d’une liberté d’expression sans limites, ils se disent ouverts à tout et à tous.

"Guerre sémantique"

Le samedi 17 juin, comme quasiment chaque samedi, ils sont rassemblés place Masséna à Nice.  

Sur leurs pancartes, il y a des personnes présentées comme des victimes du vaccin contre le Covid. 

Selon Alexander Samuel, un autre lanceur d’alerte azuréen, enseignant et Docteur en biologie moléculaire« Il y a une guerre sémantique chez ces personnes qui refusent de dire le mot vaccin, qui disent le mot injection et qui vont essayer de nier le conspirationnisme », affirme-t-il.

Alexander Samuel, très présent sur les réseaux sociaux pour démasquer les complotistes, milite aussi pour la création d’une commission locale de lutte contre la désinformation médicale. 

Il voudrait sensibiliser les élus, ces mêmes élus qui ont parfois vanté les bienfaits de la chloroquine sans preuve scientifique en pleine crise du Covid.

C'est le cas du maire de Nice, Christian Estrosi. Il poursuit : 

J’aurais aimé que ces personnes qui ont fait une énorme promotion fassent un mea culpa ou disent qu’il y a eu un problème. Mon inquiétude est davantage dans le fait que perdurent les pseudo-sciences, les dérives sectaires avec l’aval d’institutions. » 

Alexander Samuel, lanceur d'alerte

Séverine Falkowicz, enseignante chercheuse en psychologie sociale, à l'université Aix-Marseille est aussi favorable à la création d’une commission locale et médicale. Elle a écrit un livre : « Au cœur de l’esprit critique ».

Sur le plateau de France 3 Côte d’Azur, elle explique : « Nous sommes des cibles (…) nous sommes exposés de toutes parts : médias, réseaux sociaux, thérapeutes à des contenus de ce type, sans même que nous le sachions. »

Exemple avec le traitement contre le cancer. Sur internet, on propose des jus de carotte pour en guérir. La chercheuse met en garde le public :

Quand on ne dispose pas de critère de tri, quand on n’a pas cette compétence pour savoir des deux propositions quelle est la bonne, on est susceptibles de choisir la mauvaise et de ne pas prendre le bon traitement.

Séverine Falkowicz, enseignante chercheuse en psychologie sociale, à l'université Aix-Marseille

Contacté, Christian Estrosi n’a pas souhaité s’exprimer sur ce sujet. Le département n'a pas non plus tranché officiellement pour ou contre la création de cette commission.

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