Locations saisonnières interdites à Nice : le Tribunal administratif donne raison aux propriétaires

Depuis samedi 6 février, les locations saisonnières sont interdites à Nice, l'arrêté municipal est entré en vigueur pour 15 jours. Le maire voulait éviter le brassage des populations pendant les vacances d'hiver. Mais le Tribunal administratif a donné raison aux propriétaires. La mairie fait appel.

Fin de partie pour le maire de Nice. Les loueurs respirent un peu mieux. Le Tribunal administratif de Nice leur a donné raison ce lundi 8 février. A Nice, Airbnb était dans l'oeil du cyclone. Le maire de Nice voulait interdire les locations saisonnières le temps de la crise sanitaire. Un arrêté avait été pris en ce sens du "6 au 20 février dans un premier temps". Une mesure prise pour éviter le brassage des populations  et endiguer la flambée de l'épidémie Covid 19 dans les Alpes-Maritimes.

Référé liberté

L'audience au Tribunal administratif s'est tenue ce lundi matin. Maître Hervé Letellier, qui représente la ville de Nice, a développé l'intérêt sanitaire, le nombre de clusters et le risque de tension hospitalière. Maître Fabrice Barbaro, avocat de l’Union des Professionnels de la Location Touristique a plaidé pour les propriétaires. Il a déposé un référé liberté. Selon lui, l’effet de cette mesure est « complètement restreint, car c'est une décision isolée. » Des arguments entendus par le juge : 

L’arrêté attaqué portait une atteinte immédiate au droit pour les citoyens d’user, de jouir et de disposer de l’intégralité de leurs biens et à la liberté du commerce et de l’industrie des professionnels dont l’activité porte sur la location saisonnière, a, dès lors, prononcé la suspension de l’arrêté du maire de Nice en date du 25 janvier 2021.

Le juge des référés.

Voici les arguments avancés pour expliquer cette décision : 

  • la situation sanitaire dans les AlpesMaritimes, pour préoccupante qu’elle soit, n’avait pas conduit le représentant de l’Etat dans le département à prendre des mesures supplémentaires d’interdiction de déplacement ou de limitation des locations saisonnières
  • l’afflux massif de touristes invoqué sur la Côte d’Azur en période hivernale n’était pas démontré et ce, alors que le Carnaval de Nice 2021 a été reporté à 2022 
  • il y a une rupture d’égalité entre les différents acteurs du tourisme et les maires des communes de Cagnes-sur-Mer, Saint-Laurent-du-Var et Villefranche-sur-Mer qui n’ont pas pris de mesures similaires
  • l’UPLT a prévu une charte sanitaire stricte ainsi qu’un guide pratique de la gestion de la Covid-19 qui sont appliqués par l’ensemble de ses adhérents 

La mairie fait appel

Mais face à la suspension de son arrêté par le Tribunal administratif, le maire de Nice a décidé de faire appel. Pour Christian Estrosi, la situation sanitaire s'aggrave, les hôpitaux sont en limite de saturation, les variants font leur apparition. Pour la ville de Nice, toute augmentation du nombre d'habitants pourrait augmenter les contaminations. Même difficulté pour contrôler les locations saisonnières. Selon le maire, "la police a dû intervenir quatre fois à Cannes de 21h00 à 2h00 pour mettre fin au tapage nocturne provoqué par des groupes de personnes venus fêter des anniversaires dans des appartements loués sur Airbnb."

"Quelle bizarrerie !"

Christian Estrosi s'emporte par voie de communiqué de presse :

« La même juridiction qui m’a reconnu le droit, voire le devoir d’agir face aux circonstances exceptionnelles que connaissait la Ville de Nice lors de l’examen du recours contre le couvre feu ou le port du masque, tient aujourd’hui le raisonnement inverse, estimant que comme le Préfet n’est pas intervenu c’est que la situation ne serait pas exceptionnelle, et ne justifierait pas de mesures exceptionnelles ! Quelle bizarrerie ! Allez comprendre ! Mieux vaut s’en remettre au Conseil d’Etat. Nous ferons donc appel de cette décision ».

Christian Estrosi, maire de Nice, président de la Métropole Nice Côte d’Azur.

Vacances d'hiver

Les locations n'étaient pas interdites dans les autres villes de la Côte d'Azur. Le maire de Nice avait aussi demandé au préfet d'élargir cette mesure au département. Un arrêté qui a fait grincer des dents les petits propriétaires. Mais est-il respecté ? Pas vraiment ! Nous n'avons pas eu de difficulté à trouver une location à Nice pour les vacances d'hiver.

Recours non suspensif

Sur la plate-forme Airbnb, 300 biens sont actuellemnt disponibles à la location. Voici la réponse reçue à notre demande de location : "je serais ravi de vous recevoir, pas de souci." La propriétaire savait qu'un recours avait été déposé au Tribunal Administratif. Ce recours n'est pas suspensif, donc les locations sont toujours légales. Sur le site du Bon Coin, une autre propriétaire explique comment elle compte contourner l'arrêté : 

Il faut être hyper discret. Je peux faire un faux contrat de location et dire après que vous êtes partie. Si il y a des voisins qui dénoncent, je dis que vous êtes là pour du moyen terme. L'arrêté, je m'en fous complètement ! Je prendrai mes dispositions pour qu'il n'y ait pas de problème.

Une propriétaire, sur le site du Bon Coin.

Fronde sur les réseaux sociaux

Car des contrôles existent. Ils sont effectués par la mission 'protection des logements' et des agents de la police municipale. La fronde contre cet arrêté s'organise aussi sur les réseaux sociaux de manière plus concertée. Sur Facebook, Isabelle Nicolas rassemble 500 propriétaires loueurs à travers le Club des hôtes de Nice

Selon elle, aucun n'est en infraction. La plupart des loueurs saisonniers sont de petits propriétaires qui possèdent un, voire deux appartements. 

Je ne me risquerai pas à faire ça. Après, je comprends tout à fait que des gens en viennent à cette situation car il faut survivre, la période de restriction est longue et les gens ont besoin d'argent pour vivre. 

Isabelle Nicolas, coordinatrice du Club des hôtes de Nice. 

Retournement de situation

Elle dénonce une 'concurrence déloyale' avec les hôtels qui ne subissent pas cette interdiction et peuvent donc accueillir des touristes. Curieux retournement de situation. Il y a quelques années, c'était les hôtels qui dénoncaient une concurrence déloyale car les locations Airbnb n'étaient pas assujetties aux mêmes normes. Nice, est l'une des villes les plus attractives pour ce type de logement. 

Complément de revenus

A Nice, les propriétaires possèdent en moyenne 1,1 appartement ou studio à louer. Ce sont de petits propriétaires pour qui il s'agit souvent d'un complément de revenus. Certains financent aussi le remboursement de leur crédit immobilier. Avec la crise sanitaire, ce type de revenus a sensiblement décliné. D'après une étude du magazine immobilier de Particulier à Particulier, de nombreux propriétaires renonceraient actuellement à louer leur bien. Certains l'ont mis en vente.

Contrôler et réguler

Une opposition qui n'est pas nouvelle entre Nice et les propriétaires. Alors qu' un groupe de loueurs Airbnb souhaitait une exonération fiscale , la mairie souhaitait surtout qu'il y ait moins de locations meublées pour des séjours de courte durée. En 2014, Nice a été parmi les premières villes à tenter de réguler l'essor des locations touristiques,

Nuisances

Un essor qui se faisait au détriment du logement des actifs, des hôteliers et des riverains obligés de subir des nuisances. La réglementation a été encore musclée en 2019, sans être aussi sévère que celle de Paris ou Bordeaux. La location touristique est limitée à 120 jours par an. Des contrôles réguliers avaient été annoncés pour traquer les propriétaires fraudeurs. Juste avant le premier confinement, il y avait 12.500 annonces à Nice au plus fort de la saison.

Activité transparente

Par ailleurs, Airbnb annonce ce lundi souscrire en partie aux engagements demandés par des associations d'élus, des collectivités territoriales et des métropoles, afin que l'activité des plateformes de locations touristiques entre particuliers soit plus transparente.

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