Jeudi 3 novembre, l'épouse du mis en cause Mohamed Ghraieb est venue témoigner devant la cour d'assises spéciale du procès de l'attentat de Nice. Pendant plus de cinq heures, à travers des réponses parfois floues et en longueur, elle a certifié l'innocence de son mari.
Merle a témoigné pendant plus de cinq heures à la barre au procès de l'attentat de Nice, ce jeudi 3 novembre. Elle est mariée avec Mohamed Ghraieb depuis 2007. Cet homme est accusé d'association de malfaiteurs terroriste et cette semaine au procès est consacrée à son cas.
Depuis six ans, Merle est persuadée de l'innocence de son mari. Elle a tenu à le signaler à la cour dès le début de son intervention et tout son témoignage est allé dans ce sens. Parfois à un tel point que cela a agacé les différents partis, le ministère public et les avocats de parties civiles notamment.
"Un couple heureux"
Merle a raconté leur rencontre en 2005 sur la Promenade des Anglais, alors qu'elle visitait Nice en accompagnant un groupe d'élèves venu de Finlande, son pays de résidence de l'époque. Très vite une relation sentimentale naît entre Merle et Mohamed Ghraieb. Un an et demi après leur rencontre, elle décide d'emménager à Nice avec deux de ses filles pour vivre avec lui. Deux ans plus tard, ils se marient. Ils forment "un couple épanoui, heureux", Mohamed Ghraieb s'entend bien avec ses filles. Ils cherchent à avoir un enfant ensemble mais n'y parviennent pas et entament des démarches pour une PMA en 2016 qui n'aboutira pas.
Merle a une société d'architecture d'intérieur et c'est avec l'argent de cette société que le couple achète une voiture pour que Mohamed Ghraieb crée une société de VTC. C'est aussi avec l'argent de cette société que le couple va acheter une voiture à Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, l'auteur de l'attentat, quelques jours avant l'attaque du 14 juillet 2016.
Lorsque la cour l'interroge sur la possibilité que son mari ait participé à un trafic d'armes, comme en témoignait un employé du kebab situé à côté de l'hôtel où Mohamed Ghraieb était réceptionniste, Merle n'y croit "pas du tout". Elle sait qu'il possédait une arme factice à leur domicile. Il l'avait acheté "pour faire peur" parce que ses deux filles avaient été embêtées par "une bande de jeunes hommes" et que Merle avait vu ses quatre pneus crevés un matin. Selon elle, cette arme n'est jamais sortie du domicile. Pourtant, un autre témoin entendu la semaine dernière avait dit que Mohamed Ghraieb avait essayé de vendre une arme, de même marque, au terroriste quand celui-ci en cherchait.
Des doutes sur sa sincérité
En donnant quelques détails sur les relations amicales de son mari, Merle mentionne quelques personnes sans parler de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel. "Vous ne croyez pas que vous oubliez quelqu’un ?", lui demande le président de la cour, Laurent Raviot. "Je ne crois pas qu'ils soient très proches", répond-elle. Malgré des éléments qui confirment cette relation de proximité pour la cour - des communications téléphoniques très nombreuses entre les deux hommes, des projets de vacances ensemble -, Merle continue de la nier.
Elle assure qu'elle ne l'a jamais vu chez eux, même lorsqu'il a aidé le couple à déménager en avril 2016. Elle se rappelle qu'une fois Mohamed Lahouaiej-Bouhlel est venu aider son mari à réparer son vélo. Elle finit par s'emporter devant l'insistance des partis : "Maintenant, on est des complices de terroristes parce qu’un homme est passé réparer une selle de vélo ? C’est quand même incroyable !"
Pour le président de la cour, il est évident que cette femme cherche à défendre son mari. "On a un peu l’impression que vous cherchez à protéger votre mari, lui dit-il, je n'y vois pas de malice mais il y a des moments, il faut dire les choses." Elle lui répond : "Je dis ce que je peux, mon mari est innocent."
L'avocate générale se montre moins indulgente que le président de la cour :
On a l’impression que parce que vous êtes mue par la conviction de l’innocence de votre mari, vous avez envie que vos déclarations ne lui nuisent pas. Vous vous contredisez sur un certain nombre de points donc ça enlève de la sincérité à votre témoignage. Je ne suis pas persuadée que ça serve votre mari donc c’est dommage l'insincérité qui se dégage de votre témoignage.
Avocate générale
Après déjà plus de quatre heures de témoignage et de réponse aux questions, les avocats de la défense ont protesté contre ceux des parties civiles. Ils leur reprochent de ne pas respecter la présomption d'innocence de leur client et de poser des questions qui n'ont rien à avoir avec les charges. Le président remet de l'ordre dans la salle agitée et permet à l'audience de reprendre.
Les longs silences et les réponses parfois très longues et très floues de Merle continuent jusqu'à ce que le président reprenne la témoin en lui demandant de répondre brièvement pour faire avancer les débats. Il est déjà presque 15 heures. Mais le témoignage de Merle dans son ensemble n'a pas apporté les réponses que cherchaient les différents partis.