Mise en examen, circonstances de la mort, enquête, autopsie, hommage de l'OGC Nice... Patrick Desjardins donne des précisions sur la procédure en cours après la mort de deux hommes lors de l'arrivée de Charles Caudrelier, le 16 novembre.
Ce devait être un jour de fête pour tous les passionnés de la mer, mais le drame qui s'est joué en marge de l'arrivée du skipper Charles Caudrelier, le premier à atteindre la Guadeloupe, ce mercredi 16 novembre au petit matin, a endeuillé la Route du Rhum.
Le procureur général de Guadeloupe Patrick Desjardins a effectué un point presse en ce début de semaine, il a livré à la rédaction de France 3 Côte d'Azur, par téléphone, les premiers éléments de l'enquête et annoncé la mise en examen du jeune homme de 21 ans qui pilotait l'embarcation.
Deux hommes ont perdu la vie dans le chavirement d'un navire suiveur, loué par l'organisation, qui avait à son bord une douzaine de personnes. Parmi les victimes, François Naveilhan, 35 ans, qui a travaillé pour plusieurs sociétés niçoises dont le club de Ligue 1, l'OGC Nice.
D'après nos informations, le club d'Ineos prévoit un hommage à son ancien employé dès le retour du championnat, le 29 décembre, avec la réception du RC Lens à l'Allianz Riviera. Les Aiglons avaient réagi très vite à l'annonce du décès de François Naveilhan.
Le déroulé des faits
Au petit matin du mercredi 16 novembre, vers 5 heures, le premier navire à boucler la traversée de l'Atlantique dans le cadre de la Route du Rhum 2022 approche des côtes de Guadeloupe. Il s'apprête à passer, avant tout autre navigateur, la ligne d'arrivée de cette course maritime mythique.
Le procureur général de Guadeloupe, Patrick Desjardins, explique que "cet accident, d’abord avec certitude, ne résultait pas d'une collision entre plusieurs bateaux, elle ne résultait pas non plus d’une mauvaise manœuvre qui l’aurait déstabilisé."
A ce moment-là, malgré l'horaire très matinal, le "plan d’eau est très chargé, très occupé, avec des bateaux qui effectuent des manoeuvres aléatoires".
L’accident a eu lieu car le bateau s’est planté dans la vague de devant, l’embarcation a été déstabilisée, ce qui a expliqué l’entrée d’eau dans le cockpit et entraîné le chavirage.
Patrick Desjardins, procureur général de Guadeloupe
"Les secours sont intervenus dans des délais qui que je juge corrects" estime également le procureur général.
Un problème de sécurité sur le bateau ?
"Les conditions de sécurité du bateau étaient réunies, il n'y a pas eu de surcharge, les gilets de sauvetage avaient été distribués et les passagers en étaient porteurs. Sachant qu’il n’y pas d’obligation pour un pilote de bateau, pour un capitaine, d’obliger ses passagers à porter le gilet. Il faut qu’il y ait autant de gilets que de passagers. Le choix du pilote a été de les faire porter dès le début. Ce qui montre bien qu’il y a eu une recherche de sécurité de sa part" estime le Patrick Desjardins.
La cause de la mort est elle, bien évidemment tragique : "L’hypothèse majeure est là, les personnes ont été bloquées avec leur gilet, ou plutôt à cause de leur gilet, sous le bateau, et n’ont pas pu être dégagées".
Pas autorisé à naviguer de nuit
"Ce qui apparait, c’est que le bateau sur lequel ils circulaient, qui est un navire de commerce, à utilisation commerciale, un NUC, n’avait un permis de naviguer que pour la journée, ce qui correspond son activité en temps normal puisqu’il organise des randonnées aquatiques sur le Grand Cul-de-sac marin, un plan d’eau relativement calme" poursuit le procureur général de Guadeloupe.
Ce bateau n’était pas habilité, il n’avait pas l’autorisation de naviguer la nuit.
Patrick Desjardins, procureur général de Guadeloupe
"Ce bateau n’avait pas à se trouver à cet endroit là, à ce moment précis, et c’est la raison pour laquelle le pilote a été placé en garde à vue dès le lendemain des faits, le 17 novembre. Le 18, il a été déféré au parquet au terme d’une garde à vue qui a duré 24 heures. Il a été présenté à une juge d’instruction, le parquet a ouvert une information judiciaire des chefs d’homicides involontaires, et blessures involontaires par inattention et manquements à une obligation de sécurité ou de moyens imposée par la loi ou le règlement" détaille le procureur général de Guadeloupe.
Le pilote remis en liberté
La personne mise en examen est un jeune homme de 21 ans, auto-entrepreneur et guide touristique maritime. Placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de piloter toute embarcation ou de quitter la Guadeloupe, il a ainsi été remis en liberté et n’est pas placé en détention provisoire.
"L’enjeu est de poursuivre les investigations et de comprendre ce qui a pu se passer, entendre les témoins, et comprendre les conditions dans lesquelles cette embarcation a pu recevoir une habilitation officielle pour accueillir les personnels ou les invités de la Route du Rhum" estime le procureur général.
Un arrêté préfectoral avait été pris pour interdire le stationnement de bateau avant la ligne d’arrivée, il y avait également une zone d’entrée vers cette ligne, un corridor, où la navigation était interdite, sauf pour les bateaux des navigateurs de la Route du Rhum, qui n’ont pas l’obligation en arrivant à Pointe-à-Pitre de respecter cette contrainte.
Patrick Desjardins, procureur général de Guadeloupe
Toutefois, le procureur le précise, "le bateau suiveur qui a chaviré n’était pas en train de naviguer dans ce corridor interdit." Une partie des circonstances de ce drame qui a coûté la vie à deux hommes trentenaires restent encore à éclaircir.