Témoignage. "Votre fils s’est enfui de l’hôpital, on ne sait pas quoi vous dire" : le cauchemar d'une maman d'un enfant de 13 ans à Nice

Publié le Écrit par Sofian Aissaoui
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Un adolescent de 13 ans et demi, hospitalisé à l’hôpital Lenval de Nice pour des troubles du comportement alimentaire, a quitté l’établissement sans autorisation le 23 septembre 2024, provoquant l’inquiétude de ses parents. Si la mère de l’enfant n’a pas porté plainte, elle souhaite "alerter" et "comprendre" comment une telle situation a pu se passer.

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"Quand je suis arrivée sur place, on m’a simplement dit : 'Votre fils s’est enfui de l’hôpital, on ne sait pas quoi vous dire'", nous rapporte Vanessa Blin, mère d’un adolescent de 13 ans et demi pris en charge au sein de l’hôpital de Lenval de Nice (Alpes-Maritimes). La structure niçoise est spécialisée dans l’accueil des mineurs et gère plusieurs troubles psychiatriques.

Au sein de l’établissement, le jeune garçon avait été admis pour des troubles du comportement alimentaire. Son IMC (Indice de masse corporelle) très bas en fait un individu "vulnérable", nous précise la maman.

"Mon fils était dans l’hôpital depuis un peu plus de deux mois. Il a beaucoup de mal à prendre du poids et c’est possiblement une maladie héréditaire qui en serait la cause. Les médecins font des recherches en ce sens."

Une maman perdue et inquiète

Ce lundi 23 septembre, les équipes de l’hôpital annoncent à la maman ne pas savoir où se trouve son fils.

J’étais très inquiète. Je demandais le maximum d’informations pour savoir où il se trouvait, mais l’hôpital refusait de me donner celles que je cherchais.

Vanessa Blin, maman d’un adolescent pris en charge à Lenval

à France 3 Côte d'Azur

À ce moment-là, la mère pense que son fils s’est enfui avec l’une des patientes, elle aussi atteinte de troubles psychiatriques.

"Quand on est parent, on se fait beaucoup de scénarios dans la tête. Et c’est vrai que là j’ai tout imaginé…", confie-t-elle. Alors que la brigade des mineurs est sur place - contactée par l’hôpital - la mère dit toujours avoir trop peu d’informations sur le lieu où pourrait se trouver son fils. Elle tente de mener l’enquête elle-même, épaulée par son compagnon.

J’étais dans tous mes états. J’ai mis des annonces partout sur les réseaux sociaux, je suis allée voir un conducteur de tram pour lui donner la photo de mon fils. Tout ce que je pouvais faire, je l’ai fait.

Vanessa Blin, maman d’un adolescent pris en charge à Lenval

à France 3 Côte d'Azur

Quand une information lui remonte selon laquelle son fils serait au niveau de Cap 3000 - un centre commercial de Saint-Laurent-du-Var accessible depuis la Promenade des Anglais - elle décide de faire toute la route depuis Nice en voiture : "on regardait des deux côtés en espérant le voir quelque part".

Au bout de quelques heures de cauchemar, la mère retrouve enfin la trace de son fils. Par elle-même. "J’ai klaxonné comme une dingue honnêtement. Je n’ai même pas su l’engueuler tellement j’étais heureuse de le savoir sain et sauf…"

"Je n'ai pas eu d'excuses"

Pour la maman, cet incident est d’autant plus étonnant qu’elle dit ne pas avoir reçu l’écoute et la bienveillance nécessaires de la part de l’établissement.

"Quand je l’ai ramené dans le service, je n’ai même pas eu le droit à des excuses… Et le lendemain, surtout, on m’a appris comme par hasard que mon fils était apte à sortir de l’hôpital."

Aujourd’hui encore, la mère dit ne pas comprendre : "est-ce que je dois appeler ça une fugue, une fuite ?", se questionne-t-elle. En colère face au manque de vigilance et de compassion dont elle accuse l’établissement, la maman assure ne pas vouloir porter plainte, mais voudrait comprendre. "On signe une décharge selon laquelle notre enfant est sous la responsabilité de l’hôpital. (…) Ça a tout l’air d’une prison alors que c’est le club Med !"

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L’hôpital se défend

"Des ados qui fuguent, ça arrive malheureusement", précise l’établissement, contacté par France 3 Côte d’Azur, et rappelant que la situation a été très difficile à gérer en interne du fait de l'inquiétude et de la virulence des proches.

Au moment des faits, nous avons donné toutes les informations que nous pouvions donner aux parents, en préservant ce qui relève du secret médical.

La communication de l'hôpital Lenval

à France 3 Côte d'Azur

L’établissement nous précise que la procédure à suivre en cas de fuite d’un patient mineur est claire : "cette procédure est ficelée et approuvée par nos partenaires de police. Il y d’abord un appel à la brigade des mineurs, puis une notification écrite et ensuite un appel aux deux parents."

L’hôpital reste cependant évasif quant à la question de sa responsabilité légale dans ce type de situation.

La responsabilité de Lenval, c’est d’accompagner l’enfant, de tout faire pour qu’il aille mieux. C’est notre mission première. (…) Nous n’avons pas l’autorité des parents.

La communication de l'hôpital Lenval

à France 3 Côte d'Azur

Dans le cadre de sa mission de soins, l’établissement précise également l’importance d’accueillir les jeunes patients dans un environnement qui ne les coupe pas totalement de la réalité : "l’accompagnement passe aussi par l’instauration d’un climat de confiance avec les patients. L’hôpital n’est pas une prison. (…) Le service dans lequel l’enfant se trouvait était ouvert, mais ce service peut être fermé quand une situation le requiert. Au moment où il est parti, le service était ouvert".

Qu'en est-il des dispositions légales ?

La sortie sans autorisation d’un patient "n’est pas définie juridiquement" précise la juriste Valériane Dujardin-Lascaux dans un article consacré à la question. Elle explique notamment que "l’établissement doit pouvoir démontrer qu’il prend toutes les mesures nécessaires pour prévenir ce risque de fugue".

Le Code de la santé publique indique en ce sens que "les établissements de santé publics, privés d'intérêt collectif et privés assurent, dans les conditions prévues au présent code, en tenant compte de la singularité et des aspects psychologiques des personnes, le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades".

D’un point de vue juridique, la responsabilité des établissements médicaux se décide ainsi au cas par cas et souvent en prenant en compte la jurisprudence en la matière.

Plusieurs décisions de justice ont notamment donné raison aux services médicaux pour des cas, par exemple, de suicide. "Une personne admise dans un établissement de santé ne se trouve pas liée par un contrat médical, mais elle est placée dans une situation d’usager du service public hospitalier", poursuit la juriste, auteure d'un livre sur la question de la prise en charge des mineurs.

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